Et pour vous, M. le député, quelles étaient les meilleures mesures votées cette année (et les plus contestables) ?<!-- --> | Atlantico.fr
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L'heure du repos est arrivée pour les députés.
L'heure du repos est arrivée pour les députés.
©Reuters

Bilan de la session parlementaire

La session parlementaire s'est achevée ce mercredi 23 juillet et les députés ne reviendront sur les bancs de l'Assemblée nationale qu'au mois d'octobre. Entre satisfactions et exaspérations, certains d'entre eux ont accepté pour Atlantico de faire le bilan de cette année chargée.

Hervé Mariton

Hervé Mariton

Hervé Mariton est ancien ministre, député-maire de Crest, délégué  général de L’UMP chargé du projet, et président de Droit au Cœur.

 

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Philippe Vigier

Philippe Vigier

Philippe Vigier est député UDI de la 4e circonscription d'Eure-et-Loir, et président du groupe UDI à l'Assemblée nationale.

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Christophe Caresche

Christophe Caresche

Christophe Caresche est député de Paris du 18e arrondissement, membre du Parti socialiste.

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François de Rugy

François de Rugy

François de Rugy est député de Loire-Atlantique, président du Parti Ecologiste et vice-président de l'Assemblée nationale.

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A l'issue de la session parlementaire achevée le mercredi 23 juillet, Atlantico a recueilli les impressions de plusieurs députés sur le travail légisaltif accompli depuis octobre. Christophe Caresche (PS), Hervé Mariton (UMP), Philippe Vigier (UDI) et François de Rugy (EELV) expliquent pourquoi certaines dispositions votées marquent à leurs yeux de réelles avancées, et dévoilent également les raisons de leurs déceptions sur certains autres textes.

Christophe Caresche (PS) :

"Deux moments bien distincts sont apparus au cours de cette session parlementaire : celui qui a précédé les élections municipales, qui n'a pas été marqué par un afflux de textes, puis celui qui a suivi le changement de gouvernement, avec une accélération significative, notamment au travers de la mise en œuvre du Pacte de responsabilité. Ce fut à la fois une période intense, et également difficile en raison de la contestation interne au groupe PS qui a beaucoup mobilisé notre énergie. Dans ce contexte, la session qui se termine a tout de même permis d'adopter des textes importants, avec le début de la mise en œuvre du Pacte de responsabilité, ce qui était l'engagement du président de la République, et du Premier ministre lors de son discoure de politique générale. In fine, au regard des résultats, la session se termine sur une note positive, malgré des difficultés politiques.

Les meilleures mesures :

La mise œuvre du Pacte de responsabilité, avec deux textes importants que sont le Projet de loi de finances rectificative et le Projet de financement de la sécurité sociale rectificatif : cela implique des mesures pour les entreprises, au travers de l'allègement de charges et de la fiscalité. Allègement qui concerne également les ménages les plus modestes, au travers du Pacte de solidarité.

La réforme de la carte territoriale est importante, car elle marque le début d'une réforme encore plus importante, qui permettra de donner lieu à des débats essentiels sur la décentralisation, l'organisation territoriale et le rôle de l'Etat.

Les mesures contestables :

La proposition de loi sur les taxis et les VTC n'a pas été convaincante, car trop restrictive. On a essayé d'apporter une réponse à la surrèglementation des  taxis, finalement en surréglementant une autre profession, au moment même où le gouvernement considère qu'il faut en déréglementer certaines, comme au travers de la loi Montebourg qui sera discutée à la rentrée. Mais il s'agit d'une proposition qui n'a pas fini son parcours, donc il est encore possible d'améliorer les choses.

La réforme ferroviaire nécessitera sûrement qu'on y revienne à un moment ou un autre, car la formule des trois établissements publics est lourde, et que d'autres formules juridiques seraient mieux adaptées. Beaucoup de concessions ont été faites à la CGT, qui malgré tout s'est mise en grève. On verra bien quelle sera la destinée de cette réforme.

Laloi Alur sur l'immobilier avait beau être intéressante sous certains aspects, elle n'était pas opportune, car elle a crispé beaucoup d'acteurs du marché à un moment où l'on cherchait à relancer la construction de logements. La priorité était à la construction, et en s'attaquant à d'autres sujets on a créé des doutes."

Hervé Mariton (UMP) :

"Pour décrire très brièvement cette session parlementaire qui s'achève, je dirais que l'ambiance entre la majorité et l'opposition reste extrêmement tendue, sans compter les tensions au sein de la majorité même. Le climat est tel que certains de mes collègues socialistes me disent  qu'ils "n'aiment pas" ce mandat.

Les meilleures mesures :

Le début du détricotage de la loi Alur marque la prise de conscience par l'opposition, et même la majorité, que cette disposition a bloqué le marché immobilier. On était dans de la pure idéologie. Dans un moment de lucidité, le gouvernement a fait le choix de détricoter, et on peut seulement déplorer qu'il n'ait pas poursuivi plus loin cette logique.

Les baisses de charges dans le Pacte de responsabilité ne sont pas suffisantes, mais sont utiles par nature, et on ne peut pas réclamer une baisse des charges et en même temps refuser de donner acte quand la baisse a lieu.

On a beau chercher, mais même lorsqu'un texte convenable comme la réforme ferroviaire est présenté, je considère que les concessions faites à la CGT ont gâché la marchandise. Les concessions faites notamment sur l'employeur unique abîment un peu cette réforme à court terme, et très certainement à moyen et long terme.

Les mesures contestables :

Dans le Pacte de responsabilité, autant les allègements de charges sont au rendez-vous, autant les mesures fiscales ne le sont pas.

La réforme territoriale est une occasion manquée, car la stratégie du gouvernement sur les deux questions fondamentales que sont les compétences et la fiscalité n'est pas claire. Le problème a été pris à l'envers.

La Loi Famille quant à elle témoigne de l'entêtement du gouvernement à abimer la politique familiale. En dépit de quelques évolutions et modifications, la majorité continue d'être marquée par une démarche très idéologique."

Philippe Vigier (UDI) :

"Cette session parlementaire a été extrêmement chargée. De l'avis général on a rarement vu une telle avalanche de textes, et leur examen n'a pas pu se faire dans la sérénité. L'étude de la réforme territoriale nous a par exemple fait travailler de nuit, puis nous a fait terminer dans la nuit de vendredi à samedi à 2h du matin, avec une foule d'amendements. Quand on sait l'attention que ce type de texte requiert, c'est absolument incroyable, et c'est d'autant plus dommage que beaucoup de parlementaires étaient présents. Il faut donc revoir l'organisation du travail parlementaire, car le législateur ne peut faire son travail correctement. Le gouvernement, qui émet 90% des textes, doit cesser de "charger la mule".

Les meilleures mesures :

La simplification de la vie des entreprises est une mesure qui va dans le bon sens, car tout ce qui peut oxygéner les entreprises, et redonner de la confiance, est bon à prendre. Sans être révolutionnaire, elle contribue à faire bouger les choses.

La réforme ferroviaire permet de réorganiser ce grand corps malade qu'est la SNCF, et qui se trouve pourtant être un fleuron de la France. Même si là aussi tout n'est pas parfait, c'est une avancée.

La loi agricole, même si elle n'est pas d'envergure pour le secteur, permet par quelques dispositions d'organiser une meilleure cohabitation entre l'écologie et l'environnement.

Les mesures contestables :

Le Pacte de responsabilité / pacte de stabilité est loin de nous avoir convaincus : les abaissements de charges prévus ne sont pas à la hauteur des enjeux auxquels font face les entreprises. On voit bien que la copie n'est pas remplie, et rien ne s'appliquera avant 2015 ? C'est une erreur considérable.

La loi de finances rectificative sur la baisse des impôts pour les classes les plus modestes n'empêchera pas 8 millions de Français de payer encore plus d'impôts cette année. C'est ce qui me permet de dire que sur les questions financières, la majorité n'est pas du tout à la hauteur des enjeux.

La réforme territoriale est à ranger entre les deux, car nous restons sur une déception. Nous verrons ce qu'il en sera en deuxième lecture, mais il est à craindre que ce soit un nouveau rendez-vous manqué : le texte a été décharné au Sénat, les discussions ont été bloquées. On marche sur la tête : on défend des mesures mais on ne les vote pas. C'est comme si un journaliste écrivait des articles sans que jamais ils ne soient publiés."

François de Rugy (EELV)

"Nous avons atteint le point de saturation dans les procédures, qui sont mal maîtrisée dans le temps. Il n'y a pas de fatalité à ce qu'un projet de loi mette 8 à 10 mois après sa sortie du Conseil des ministres pour être adopté. Et je n'inclue pas dans cette durée les travaux préparatoires et les décrets d'applications qui viennent après. Les Français ne comprennent pas que cela mette autant de temps, que l'on parle de certains textes pendant un moment, pour qu'ensuite ils disparaissent, et ressurgissent de nouveau dans le champ médiatique ; sur le fond et sur la forme, c'est illisible. Par exemple la loi Alur sur le logement a nécessité neuf mois, et a été adoptée sur compromis de manière accélérée juste avant les municipales. Avec la Loi Agricole, c'est reparti pour dix mois. Certains disent que ce sont des lois très lourdes, mais il faudrait justement cesser de rédiger des pavés, ce qui nuit à la compréhension. De toute façon, ce travail législatif ne devrait pas prendre autant de temps.

Les meilleures mesures :

Même nous députés avons tendance à perdre le fil des textes. Nous venons d'adopter la loi sur l'égalité hommes-femmes et la loi sur l'économie sociale et solidaire, qui sont de bonnes mesures, mais dont plus personne ne parle. On les commente au début, mais leur adoption définitive se fait dans la discrétion la plus totale.

La loi agricole est un bon texte, mais encore une fois, nous n'avons pas eu le temps d'achever son examen. Nous serons obligés d'y revenir à l'automne. Par ailleurs la réforme territoriale a fait couler beaucoup d'encre, et continuera de déclencher des commentaires jusqu'au bout de par son objet ; mais qu'en est-il de tous ces textes dont les dernières lectures sont passées sous silence ?

Les mesures contestables :

La loi de programmation militaire a fait relativement peu parler en dehors de l'hémicycle, ce qui est regrettable. Elle était indissociable de choix budgétaires, des débats sur la politique étrangère, et malheureusement j'ai eu le sentiment d'un débat escamoté, avec des choix peu clairs. Pourtant, 31,5 milliards d'euros par an, ce n'est pas une petite masse budgétaire !

L'impression générale est que même lorsque certaines questions font l'objet d'un consensus, on constate que pour bien des raisons les lectures sont suspendues, reportées, comme par exemple dans le cas de la taxe poids lourds. Nous avons voté la nouvelle mouture de cette dernière dans le projet de loi rectificatif, mais nous gardons une frustration à cause de la difficulté à aller au bout de projets ayant fait l'objet d'énormément de discussions et de contreparties.

Sur le front de l'emploi, la stratégie législative, fiscale et budgétaire a été mal définie. Lorsqu'on décide d'une mesure, celle-ci ne s'applique qu'un an après, par conséquent les résultats ne sont pas là.

Dans le domaine sociétal, la réforme sur le mariage a généré un traumatisme, or je pense que si des problèmes sont intervenus c'est parce que la méthode ne convenait pas. C’est-à-dire qu'une fois de plus, on ne maîtrisait pas le temps politico-législatif. Conclusion, on ne fait plus rien, et on recule même sur des projets comme la Loi famille, alors qu'il est question de problèmes concrets concernant des millions des gens dans l'attente. C'est également le cas de la fin de vie, rien n'avance alors que depuis deux ans on nous annonce que le projet sera relancé. Cet ensemble de contre-annonces ne fait qu'aboutir à une impression de recul permanent."

Propos recueillis par Gilles Boutin

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