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La crise de l’euro 
finira-t-elle un jour ?
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Sans fin ?

Les chefs d'État et de gouvernement européens se sont retrouvés mercredi soir à Bruxelles pour un sommet informel. Reste le constat des précédentes réunions, où des mesures courageuses et décisives ont été arrêtées, mais rendues obsolètes en seulement quelques mois. Ne s'agit-il que de digues incapables d'enrayer la montée des flots ?

Franck Lirzin

Franck Lirzin

Franck Lirzin est économiste, membre du comité d'orientation d'Europa Nova, le réseau de conférenciers de la Commission européenne.

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A chaque sommet, les dirigeants européens prennent des mesures courageuses et décisives, et quelques mois plus tard, elles sont déjà obsolètes. Paquet fiscal, règle d'or, fond de stabilité financière européen, ne s'agit-il que de digues incapables d'enrayer la montée des flots ?

La récession de la zone euro en 2012 va ralentir l'économie mondiale et freiner la reprise. Tous les regards se tournent vers l'Europe, en espérant qu'elle parvienne enfin à renouer avec la croissance. L'élection de François Hollande en France et l'arrivée de partis extrémistes au Parlement grec ont ravivé le débat entre les partisans de davantage d'austérité, et ceux qui prônent une politique économique de croissance. L'Europe se fissure en deux, et seule la synthèse de ces deux positions antagonistes apporteront les solutions à nos maux.

L'Europe est prise entre Charybde et Scylla, entre des dettes publiques qu'elle se doit de contrôler afin d'éviter un emballement incontrôlable et une grave crise bancaire, sans oublier un chômage aggravé par la récession économique qui fragilise les gouvernements en place et pousse les citoyens vers des solutions plus extrêmes, comme le protectionnisme ou la sortie de la zone euro. L'étroit passage entre les deux monstres nécessite un art du gouvernement digne du héros mythologique Ulysse : nos gouvernants y parviendront-ils ?

En toile de fonds se joue une révolution majeure. La crise des années 30 avait révélé l'inadéquation d'un État simplement libéral et le besoin d'un État-providence. Aujourd'hui, ce même État-providence est en crise. Bientôt, il n'aura plus les moyens de sa générosité, et c'est tout l'enjeu de la consolidation budgétaire : comment sauver notre modèle social.

Mais, plus inquiétant, il ne sait plus comment générer de la croissance. La politique économique de l'offre, visant à rendre l'économie plus innovante et compétitive et à compter sur le dynamisme de PME, ne paie plus. Le marché commun a démultiplié les échanges commerciaux en Europe, mais il a aussi créé de profonds déséquilibres entre les territoires, dont la crise actuelle est la conséquence directe. Et toutes les mesures de réformes structurelles menées tambour battant dans les pays en crise, comme en Espagne, sont bien loin d'avoir prouvé leur efficacité.

Pourtant, l'Europe a des atouts indéniables. Contrairement aux États-Unis, sa balance commerciale est équilibrée, elle est leader dans beaucoup de domaines d'avenir comme la biotechnologie, les nanomatériaux, les écotechnologies ou l'aéronautique. Elle dispose d'un excellent système de recherche, d'une diversité de cultures qui sont sources de créativité, et d'un immense réseau dans le reste du monde de par son histoire. Sa structure horizontale, dynamique et innovante en fait même un modèle pour l'industrie du 21e siècle.

Tout l'enjeu est de transformer l'essai. Et d'avoir une politique économique européenne digne de ce nom. Les pouvoirs publics doivent avoir deux rôles fondamentaux : garantir un environnement économique stable et simple pour les entreprises, et donner une vision de long terme. Il faut un État stratège qui n'hésite pas à prendre des risques, et à être le lieu où des citoyens construisent ensemble leur avenir.

Cette construction de long terme nécessite un travail patient impliquant l'ensemble des acteurs, partenaires sociaux et fédérations professionnelles. Eux seuls connaissent suffisamment les enjeux technologiques et humains pour donner les pistes d'avenir, mais les pouvoirs publics seuls ont la capacité de les transformer en chemins.

L'Union européenne pourrait se doter d'un Conseil stratégique, à l'image de ce qui existe déjà dans de nombreux pays, où des représentants de la société civile, aux côtés d'experts et de fonctionnaires, réfléchiraient à l'avenir de l'Europe. Ces propositions, si elles n'étaient que technocratiques, n'auraient aucune chance d'être jamais mises en œuvre, et il est fondamentale qu'elles émanent de ceux qui en assumeront la responsabilité.

L'Europe renouera avec la croissance quand elle saura surmonter ces problèmes de gouvernance, et se doter d'une véritable politique économique et industrielle. En donnant des perspectives de long terme, elle redonnera confiance aux investisseurs et aux entrepreneurs, même si cela implique d'augmenter certaines dépenses d'investissements ou de mettre en place des euro-obligations.

Il est clair aujourd'hui que ni l'Italie ni l'Espagne ne parviendront à s'en sortir seules. Même l'Irlande qui a été le meilleur élève de la classe reste déprimée. Ces pays ont besoin d'une véritable solidarité européenne, qui ne soit ni un apport de garantie qui leur laisserait la responsabilité de leur salut, ni des versements financiers sans fin ni fonds, et qui soit inscrite dans une approche géographique du développement économique. L'Europe doit apprendre enfin à penser sans frontière.

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