Climat : tous les moyens techniques et financiers existent pour résister au réchauffement. Tout sauf l’adhésion des populations.<!-- --> | Atlantico.fr
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Des manifestants marchant contre le réchauffement climatique, AFP
Des manifestants marchant contre le réchauffement climatique, AFP
©Fabrice COFFRINI / AFP

Atlantico Business

Le Haut Conseil pour le Climat réclame une fois de plus des efforts supplémentaires pour lutter contre le réchauffement, mais les populations n’y sont pas prêtes et aucun pouvoir politique ne pourra imposer cette mutation. Du moins actuellement.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

Il est aussi l'auteur du blog http://www.jeanmarc-sylvestre.com/.

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Le gouvernement a l’intention de relancer les projets d’éoliens terrestres et toutes les autres sources de production d'énergie renouvelables en même temps qu’il a confirmé le programme de modernisation et développement des équipements nucléaires.

Il répond-là aux injonctions du Haut Conseil pour le Climat qui vient une fois de plus, de tirer les sonnettes d'alarme.

Les dernières mesures du réchauffement climatique sont effectivement alarmantes, puisqu’elles indiquent une progression inéluctable de la température dans nos régions de près de 5 degrés dans les trente prochaines années, ce qui nous imposera effectivement de grands changements dans nos habitudes de vie. Ces changements ne seront pas forcément négatifs mais ils vont entraîner des mutations importantes dans l’agriculture ou l’habitat notamment.

Mais même si ce réchauffement est gérable pour les habitants des zones tempérées, il va devenir insupportable pour les démographies du sud, et notamment pour l’Afrique. D’où les courants  de migrations vers le nord qui eux deviendront ingérables.

Bref, le diagnostic du Haut Conseil pour le Climat est absolument partagé par la majorité des scientifiques et des responsables politiques qui l’entendent… mais ses mots d’ordre : « acter d’urgence , engager les moyens », relèvent au mieux de la profession de foi, au pire de la supercherie cynique… Parce que tout le monde sait désormais , ce qui se passe et ce qui va se passer, tout le monde sait que les techniques existent et les moyens financiers sont disponibles pour lutter contre le réchauffement climatique, mais ce qui manque, relève de l'adhésion des opinions publiques. Donc d’une pédagogie, d’une prise de conscience, d’une adhésion et donc d’un traitement politique.

Les seuls courants d’opinion qui sont entendus et écoutés d’une oreille attentive portent sur la nécessité d’abandonner le modèle de croissance économique pour s’installer dans un modèle frugal de non-croissance, à telle enseigne d’ailleurs que les partisans d’une économie sans croissance nous rappelle avec un brin de nostalgie que les confinements liés au covid ont réussi à baisser de façon draconienne les émissions de CO2. Et quand on objecte qu’une économie sans croissance nous entraînerait dans la misère et la guerre civile, les écologistes radicaux en viennent à proposer des mesures punitives et autoritaires pour interdire les activités polluantes. Les positions prises par Greta Thunberg ont rencontré un succès mondial, parce qu’elle relance le commerce de la peur en rappelant des diagnostics de catastrophe plausible, mais quand elle égraine quelques moyens pour éviter le pire, elle en reste aux interdits, aux  pénalités et aux leçons de morale publique. Intéressant mais inapplicable.

Le plus inquiétant  dans cette situation, c’est  que les « anti-croissance » sont appuyés par des groupes qui répondent à une  idéologie radicale et autoritaire. La lutte pour le climat passe donc par la non-croissance qui passe par la suppression des libertés individuelles et du coup fait le lit de la dictature.

Que disent les scientifiques et les responsables politiques ? Ils disent que les moyens techniques pour organiser une croissance verte et propre existent et qu’ils sont  créateurs de valeur pour tout le monde donc de progrès compatible avec l’exigence légitime de prospérité économique et sociale.

On sait produire de l'énergie non carbonée, le nucléaire, l’hydraulique, l’hydrogène, les bio énergies, l’éolien, le solaire, etc. etc. on sait moins la stocker et la distribuer mais on apprend à le faire.

Les responsables politiques sont évidemment conscients des urgences sauf qu’ils sont coincés par les opinions publiques qui sont cramponnées à l’optimisation de leurs intérêts et leur confort individuel immédiat,  ce qui les rend très souvent réfractaires au changement en dépit des discours et des promesses, et des sondages. La réalité est ailleurs. Les  faits sont  têtus : la mutation des mobilités vers plus d'électricité est  freinée, la rénovation des logements est en panne. Etc… 

Pour préserver le calme social, les gouvernements successifs veillent tous avec plus ou moins de bonheur, à amortir les chocs de conjoncture d’où le « quoi qu’il  coûte » qui a trop souvent protégé les statuts-quo et notamment les énergies fossiles (chèque anti inflation , chèque énergies, etc. etc.)  Autant de moyens qui retardent les innovations et même le développement du nucléaire qui a été l’objet d’un désordre invraisemblable au niveau de l’État français qui disposait pourtant d’un avantage comparatif certain au niveau mondial. 

Bref le gouvernement aurait intérêt à être très clair dans ses objectifs et transparent dans les moyens. Ce sont les seules conditions favorables à une pédagogie des opinions publiques. Le gouvernement a le droit (il en aurait même le devoir)  de prendre le risque de l’impopularité si c’est pour une bonne cause.

Les moyens existent pour financer les investissements nécessaires qui sont énormes. Le rapport Pisani-Ferry estime les besoins à près de 60 milliards par an pendant plus de dix ans. La France dispose de ces moyens sans augmenter les impôts ni faire des plans  de réductions de dépenses publiques qui s'avéreraient insupportables. Il existe des moyens dans la masse d’épargne disponible et liquide détenue par les français (3 000 milliards d’euros). Il ne s’agit pas de confisquer cette épargne, il s’agirait de la flécher vers des investissements innovants.

Mais une telle révolution nécessite de mobiliser les marchés et si les marchés fonctionnent mal pour répondre à cet enjeu, c’est que les esprits ne sont pas préparés au changement.

L’État et l’administration contrôlent, réduisent, incitent parfois, avec des gadgets fiscaux, mais le principal levier c’est de punir. Les responsables politiques ont beaucoup de mal à sortir de la démagogie.

La solution viendra peut-être des entreprises dont l'intérêt est de respecter ses partenaires. Les clients sont écoutés par les chefs d’entreprises et pour cause leur chiffre d’affaires en dépend. Quand les clients demandent des produits décarbonés, les entreprises répondent à cette demande. 

Les salariés ont de plus souvent envie que leur travail ait un sens. Ils sont écoutés parce que les chefs d’entreprise ont besoin de leur fidélité. La RSE ne restera pas  une ambition purement théorique. 

Les actionnaires surveillent eux aussi, de plus en plus, ce qu’on fait de leur argent. Or le chef d’entreprise a besoin d’investir donc ils écoutent les investisseurs. Du moins beaucoup commencent à les écouter. Ils n’ont pas le choix. Faut reconnaître que les politiques font, eux aussi, beaucoup de promesses mais trouvent des raisons pour ne pas trop les réaliser si elles dérangent  leurs intérêts politiques.

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