Cigarette électronique : les ados français sont devenus accros au vapotage en un temps record <!-- --> | Atlantico.fr
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Une e-cigarette reste un produit toxique et addictif, déconseillé sauf aux fumeurs.
Une e-cigarette reste un produit toxique et addictif, déconseillé sauf aux fumeurs.
©Reuters

À double tranchant

Avec un million d'usagers en France et 7 millions en Europe, la e-cigarette prend de l'ampleur. Louée comme produit de substitution à la cigarette, sa version électronique présente pourtant des risques non négligeables chez les jeunes.

Bertrand  Dautzenberg

Bertrand Dautzenberg

Bertrand Dautzenberg est professeur de pneumologie à l'université Paris VI. Il exerce à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris au CHU Pitié-Salpêtrière. Il est également président de l'Office français du tabagisme et auteur de plusieurs ouvrages dont "Le petit livre pour arrêter de fumer"" (Editions First).

 
 
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Atlantico : Observe-t-on en France, comme aux États-Unis où ce chiffre a doublé entre 2012 et 2011 (voir ici), une augmentation du nombre de jeunes ayant expérimenté des cigarettes électroniques ? Quels sont les chiffres connus ?

Bertrand Dautzenberg : Oui le doublement de l’expérimentation des jeunes est retrouvée dans toutes les études dont notamment deux analyses qui ont été faites à un an d’intervalle. En France, on n’a actuellement que les données de Paris Sans Tabac (PST) de 2012 publiée en début d’année montrent une expérimentation par près de 8% des collégiens et lycéens. Les données 2013 de PST seront publiées l’an prochain mais ne dérogeront pas à cette règle d’un doublement de l’expérimentation d’une année sur l’autre. Ceux des élèves qui ont expérimenté l’e-cigarette ont plus souvent expérimenté que les autres tous les produits (chicha, cannabis, tabac, cuite d’alcool, etc.). Et peut-être plus inquiétant, un petit nombre des expérimentateurs d’e-cigarette se déclarent non-fumeur au moment de l’expérimentation.

Ne sous-estime-t-on pas les risques de la cigarette électronique comme produit d’appel à la dépendance à la nicotine ? Faut-il s'inquiéter de ses conséquences à plus long terme ?

Au nom du principe de précaution, il faut absolument s’inquiéter des conséquences à moyen et long terme et du risque d’initiation d’une dépendance. Mais il faut reconnaitre qu’à ce jour on reste en grande ignorance. On sait cependant  que le fait d’expérimenter l’e-cigarette ne veut pas dire que les jeunes l’utiliseront régulièrement après. Les données sont encore très insuffisantes, mais déjà on peut affirmer que la majorité de ceux qui ont expérimenté une fois le produit ne l’adoptent pas de façon régulière. A ce jour aucune donnée n’est disponible sur l’existence d’un risque d’initiation d’une dépendance à la nicotine ou d’un tabagisme du fait de l’expérimentation de l’e-cigarette. Tout doit donc être fait pour réduire le nombre d‘adolescents qui expérimentent et utilisent régulièrement l’e-cigarette.

Pourquoi ce produit de substitution adapté pour les gros fumeurs peut-il se révéler particulièrement incitatif pour les jeunes ?

Pour les fumeurs comme pour les non-fumeurs, le médecin ne peut que recommander de ne rien prendre, ni cigarette ni e-cigarette. Une e-cigarette, même de la meilleure qualité, même la mieux contrôlée restera un produit toxique, un produit addictif, un produit déconseillé sauf aux fumeurs.

S’il faut que pour le fumeur le produit soit attractif et qu’en particulier il reproduise bien la sensation d’arrivée de la fumée du tabac sur la gorge par une utilisation judicieuse d’arôme, ce produit ne peut en aucun cas être recommandé à des non-fumeurs et dans l’idéal il faudrait que le produit soit pour eux le moins attractif et accessible possible. Aussi longtemps que le produit est presque exclusivement utilisé par les fumeurs, on ne peut que recommander une large disposition des arômes, en revanche si dans les mois ou années qui viennent ces arômes se révèlent produits d’initiation du tabagisme, il faudra les réglementer plus sévèrement où les interdire.

Faut-il une régulation différenciée ? Comment encadrer efficacement la "e-cig" en prenant en compte les risques qu’elle représente pour cette population plus fragile ?

Oui et c’est toute la difficulté de la réglementation qui doit laisser un accès facile du produit pour les fumeurs tout en limitant au maximum l’accès du produit aux non-fumeurs, et en particulier aux adolescents.

Il est impossible d’atteindre parfaitement ces deux objectifs. Des compromis doivent donc être faits, mais surtout il est indispensable de mettre en place un observatoire qui permette d’ajuster rapidement la réglementation de façon à atteindre ce double objectif en fonction de la répartition de l’utilisation par les fumeurs et les non fumeurs.

Propos recueillis par Pierre Havez

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