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Catastrophe annoncée : et si la révolution digitale ne créait pas assez d’emplois pour compenser ceux détruits par la mondialisation et la technologie ?
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Atlantico Business

La destruction créatrice si chère à Schumpeter est peut-être prise en défaut. Les vieilles sociétés matures ont du mal à créer les emplois nouveaux pour remplacer ceux que la technologie digitale détruit.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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C'est un peu la chronique d’une catastrophe annoncée : si la révolution digitale ne crée pas les emplois industriels capables de compenser ceux que le progrès a détruit, on va assister à la mort lente de régions toute entières.

Déjà, on le voit, les premières vagues de mondialisation ont vidé une grande partie de la France de ses infrastructures industrielles. Le textile a disparu, l’industrie automobile a réduit ses effectifs au maximum, les industries de transformation ne transforment plus rien.

Tout ce potentiel-là n’a malheureusement pas été remplacé par des emplois nouveaux. Il y a eu des créations d’emplois dans l'informatique, les services, la banque, mais pas en nombre suffisant.

Le résultat, c’est que la plupart des villes moyennes en France sont désormais en voie de paupérisation. Les villes de 20 ou 30 000 habitants vivent principalement avec les emplois publics : l’hôpital, les Assedic, les préfectures, mais au final assez peu d’entreprises.

La conséquence, c’est un taux de chômage qui ne se réduit pas. D’où le marasme actuel de la situation française.

Alors la lutte contre le chômage passe évidemment par une amélioration de la compétitivité des entreprises, ou le soutien de la demande, ou l’amélioration du marché de l’emploi... Mais on voit bien que tous ces outils ne fonctionnent pas comme il conviendrait. Et c’est un peu vrai dans tous les pays occidentaux. Et pour cause. Ils ne traitent pas forcément la réalité du problème.

Autrefois, la modernité et l'évolution technologique donnaient une telle impulsion à la croissance et aux gains de productivité qu'il y avait des créations d'emplois en nombre. Joseph Schumpeter avait conceptualisé ce phénomène sous le vocable de "destruction créatrice". Il prenait l’exemple d’une exploitation forestière où l'on doit abattre les vieux arbres pour favoriser les jeunes pousses.

L’économie, disait-il, répond à la même règle. Il faut sans doute laisser mourir les vieilles industries pour permettre aux nouvelles de se développer. Et c’est vrai que l’invention de la machine à vapeur et la découverte de l'électricité ont donné naissance à des vagues d’innovations créatrices d’une formidable richesse, d’activités et d’emplois. Les industries nouvelles ont enterré les plus anciennes. L'automobile et l'électricité ont bouleversé les systèmes économiques et sociaux.

La question est de savoir si la révolution digitale qui entraîne un changement radical du fonctionnement de l’économie va engendrer une vague de créations de richesses considérables avec en prime des créations d’emplois en très grand nombre.

Actuellement, personne ne sait si les créations d'emplois vont suivre. Tout le monde le pressent, tout le monde l'espère en se référant au théorème de Schumpeter, mais personne n’en a la preuve.

La digitalisation, l’ubérisation et surtout la robotisation vont créer énormément de productivité et de richesse, mais assez peu d’emplois. Il faudra donc inventer un nouveau partage des richesses.

Prenons un exemple, celui du transport individuel. Au siècle dernier, le transport individuel était assuré par des voitures à cheval. Quand l’automobile a été inventée, les cochers se sont retrouvés au chômage, mais les conducteurs de taxis ou de voitures se sont multipliés pour en arriver à être beaucoup plus nombreux que les cochers qu’ils avaient remplacés. Quand les chauffeurs Uber sont arrivés sur le marché, les chauffeurs de taxis ont cru qu’ils allaient mourir. Les plus malins sont allés chez Uber. Maintenant que les Uber se préparent à l’automatisme, et que finalement on n’aura plus besoin de chauffeurs, on aura du mal à les former au développement et à la recherche.

Tant qu’une révolution technologique oblige des salariés à s’adapter à un nouveau job, c’est gérable. Mais si la révolution technologique ne sécrète pas de nouveaux jobs, on fabrique des chômeurs ou des rentiers.

La véritable inquiétude aujourd'hui à laquelle aucun homme politique n’a été capable de répondre est de savoir si, à terme, le digital est capable de créer les emplois nécessaires où s’il faudra inventer une autre forme de vie.

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