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Attention aux quantités excessives de sucre que contiennent un bon nombre de boissons marketées pour les Fêtes de fin d’année
©750g / Capture d'écran

A bit much ?

Une étude d'Action on Sugar révèle que les 200 boissons chaudes analysées par l'association contiennent jusqu'à 23 cuillères de sucre par tasse. Méfiez-vous de votre Starbucks...

Guy-André Pelouze

Guy-André Pelouze

Guy-André Pelouze est chirurgien à Perpignan.

Passionné par les avancées extraordinaires de sa spécialité depuis un demi siècle, il est resté très attentif aux conditions d'exercice et à l'évolution du système qui conditionnent la qualité des soins.

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Atlantico : Comment expliquer l'engouement des urbains pour ces boissons chaudes si sucrées vendues par les cafés tels que Starbucks ou Caffé Nero ?

Guy-André Pelouze : Les citadins sont fortement sollicités, dans l’espace urbain, pour consommer, et ce par des moyens divers. C’est vrai de toute marchandise. C’est vrai aussi pour les aliments. Depuis longtemps l’industrie agro-alimentaire tout comme le commerce de proximité ont compris que les odeurs, les goûts, la vision et le toucher sont de puissants leviers de l’acte d’achat baptisé compulsif quand il est devenu incontrôlable. Un exemple simple les odeurs de cuisson sont affriolantes et les boulangers, les kebabs ou les fabricants de pizza comme les restaurants le savent. Quelle que soit la gamme des aliments, la cuisson surtout à haute température crée en général des molécules volatiles dans la vapeur et la fumée qui se dégagent. Ces molécules sont extrêment attractives et leur ingestion n’est pas dénuée d’effets sur la santé (https://cordis.europa.eu/publication/rcn/12731_fr.html). L’odeur du chocolat chaud, du café chaud en font partie. Mais aussi d’autres flaveurs ou arômes que les industriels testent en laboratoire (https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/16355226). 

Concernant les boissons sucrées l’addiction est au centre du comportement alimentaire. 

Le goût sucré est inné mais il est fortement renforcé par sa réactivation à chaque prise alimentaire sucrée (https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2717031/ ). Ainsi les petits déjeuners de l’industrie qui contiennent tous beaucoup de sucre ajouté sont des renforçateurs du goût sucré très puissants puisque consommés tous les jours, dès la première prise alimentaire et depuis la petite enfance. La récompense à l’ingestion de sucre devient donc un mécanisme puissant du comportement alimentaire uniquement sur des bases neurobiologiques et non en fonction des besoins métaboliques ou caloriques. 

Les choses se compliquent pour le consommateur non averti car le froid et le chaud entravent la perception du goût sucré. C’est vrai l’été pour les glaces et c’est aussi vrai l’hiver pour les boissons chaudes (https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/7100291). Ainsi ce que l’on appelle l'alli-esthésie c’est à dire la fin de l’envie de manger ou boire un aliment et dès après l’aversion pour une nouvelle ingestion est trompée. Le choix de consommer est fait sur la perception d’autres goûts ou flaveurs et la quantité ingérée augmente car la perception de la quantité de sucre contenue est diminuée. Or ces boissons chaudes sucrées contiennent des quantités importantes de sucre. Cette quantité est calibrée au dessous d’une perception désagréable voire écoeurante chez la majorité des consommateurs afin de maximaliser l’effet d'entraînement de la consommation.

Y a-t-il une fourchette d'apports journaliers de sucre nécessaire ? 

Nous savons par des preuves factuelles que certains nutriments dans les alimenst sont essentiels. Les vitamines sont les plus connues, l’histoire du scorbut devrait être enseignée systématiquement comme exemple du caractère indispensable des vitamines (vitamine C) mais aussi de la perspicacité de l’esprit humain. Un apport minimal en acides gras essentiels (oméga 3 et oméga 6 ), en protéines (grammes par kilo de poids et en fonction de l’âge) et en micronutriments (comme le zinc, le fer, etc)  est aussi clairement démontré. En revanche il n’y a pas d’apport minimal essentiel en sucres. Pourquoi? Parce que le foie est tout aussi capable de stocker les sucres non utilisés en triglycérides que de synthétiser du glucose à partir de différentes sources; c’est la néoglucogénèse. Il n’est donc pas nécéssaire de manger du sucre. Une alimentation en aliments entiers peu transformés contient suffisamment de sucres. Une alimentation basée sur des céréales ou des aliments transformés en contient beaucoup trop.

Quels sont les ingrédients particulièrement nocifs dans ces boissons chaudes ?

Les ingrédients potentiellement nocifs.

Si on peut regretter que dans les produits alimentaires salés, il y ait encore en France des acides gras trans industriels, car leur nocivité est avérée, les boissons sucrées ne sont pas concernées. Rien n’est à proprement parlé nocif, puisqu’aucun des composants de ces produits n’est toxique. Il faut donc abandonner cette approche de bons ou mauvais aliments de bon ou mauvais cholestérol de bons ou mauvais sucres. Elle est profondément fausse sur le plan scientifique et elle est contre productive sur le plan de la santé. Jamais nos aliments n’ont été aussi sûrs du point de vue de la toxicité ou du risque de contamination par des bactéries pathogènes. En disant cela je sais que je heurte certaines affirmations sans preuve au sujet de l’alimentation industrielle. En effet, il est facile et simpliste de diaboliser tel ou tel mais beaucoup plus difficile de considérer les faits pour en appeler à la responsabilité de chacun. L’alimentation industrielle est obésogène, diabétogène et carencée en micronutriments mais elle n’est pas toxique. Simplement nous ne sommes pas du tout adaptés à ce type d'aliments. 

Le sucre ajouté s’ajoute à tous les autres sucres que vous consommez. 

Ce qu’il faut comprendre ce sont les conséquences d’un apport même minimal en sucres rapides sur le métabolisme. Trois facteurs majeurs sont à l’origine de conceptions erronées dans le grand public.

Nous vivons depuis notre petite enfance en excès de calories.

Notre ration alimentaire est très excédentaire en calories et ce depuis les lendemains de la deuxième guerre mondiale au moins dans les pays développés. Ainsi nous n’utilisons pas par le fonctionnement de notre cerveau, de nos muscles et le métabolisme de base toutes les calories que nous ingérons. 

Notre ration en sucres est très élevée dans l’absolu et en pourcentage des autres nutriments

Tous les sucres digestibles se terminent métaboliquement en molécules de glucose, de fructose ou de galactose. Ainsi au bout de la journée ces milliers de molécules constituent une part considérable de notre ration alimentaire. Toutes les molécules de glucose (les amidons contiennent des centaines voire des milliers de molécules de glucose et le saccharose contient moitié de glucose et de fructose) provoquent, entre autres une augmentation de l’insuline sécrétée par le pancréas, dès qu’elles sont absorbées dans le sang. Une des actions de l’insuline dans ce contexte d’excès calorique, est de favoriser le stockage de cette énergie sous forme de triglycérides. C’est le foie qui fait la transformation et c’est le tissu adipeux qui stocke les wagons de triglycérides appelés LDL (lipoprotéines de basse densité) car ils contiennent aussi du cholestérol qui est facilement mesurable.

Nous sommes tous différents dans le comportement alimentaire, la digestion et la capacité à stocker l'énergie

Voilà pourquoi une alimentation sensiblement identique donne des résultats différents par exemple dans un couple. Beaucoup de consommateurs seraient très surpris, après la consommation de ces boissons chaudes sucrées, de constater l'élévation considérable de la glycémie (quantité de sucre dans le sang en gramme par litre).  Ce qui est plus préoccupant c'est que cette quantité de sucre présente dans les boissons sucrées n'est pas clairement mentionnée ce qui pour le patient obèse, ayant un syndrome métabolique ou pire ayant un diabète type 2 est extrêmement dangereux. Je suis toujours surpris de constater que dans les propositions des associations qui défendent les diabétiques, dans celles des gouvernements, il y a des accusations de l'industrie agroalimentaire, toujours des projets d'interdiction ou de taxes mais jamais l'obligation d'information en terme de quantité de sucre contenu dans le gobelet que vous achetez. Et ce de manière lisible et compréhensible pour tous.

En conclusion ces boissons sont en réalité des bombes métaboliques, comme les boissons sucrées consommées à température ambiante, mais avec une plus grande difficulté pour le consommateur de percevoir et d’évaluer la quantité de sucre. Elles contribuent à un apport continu de sucres dans l’organisme tout au long de la journée. Cette perfusion continue de sucres de diverses origines entraine une élévation anormale de l’insuline à jeun, premier signe de l’insulinorésistance et voie rapide vers le diabète type 2.

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