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Angela Merkel désavouée : cette nouvelle Allemagne que dessinent les sévères résultats des élections locales
©Reuters

Du changement dans l'air

Selon les premières estimations, le parti chrétien-démocrate (CDU) mené par Angela Merkel a perdu les élections régionales de ce dimanche dans deux Länder sur les 3 concernés. Un résultat qui témoigne de la complexification du paysage politique allemand ces dernières années.

Lothar  Ruhl

Lothar Ruhl

Lothar Ruhl est un journaliste et politlogue allemand.

Il est notamment l'auteur de "l'Empire du Bien" (Klett-Cotta, Stuttgart 2005)

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Jérôme Vaillant

Jérôme Vaillant

Jérôme Vaillant est professeur émérite de civilisation allemande à l'Université de Lille et directeur de la revue Allemagne d'aujourdhuiIl a récemment publié avec Hans Stark "Les relations franco-allemandes: vers un nouveau traité de l'Elysée" dans le numéro 226 de la revue Allemagne d'aujourd'hui, (Octobre-décembre 2018), pp. 3-110.
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Atlantico : Ce dimanche se sont déroulées des élections en Allemagne visant à renouveler les élus de trois Länder : le Bade-Wurtemberg, la Rhénanie-Palatinat et la Saxe-Anhalt. Selon les premières estimations, la CDU, le parti d'Angela Merkel, aurait été battu dans les deux premiers, respectivement face aux Verts (30,5%) et au SPD (36,5%). Peut-on parler de désaveu de la chancelière ? 

Jérôme Vaillant : La première impression est bien celle d’un désaveu tant il a été possible au parti AfD qui, en tant que nouveau venu dans le paysage politique allemand, a pu rassembler sur soi, dans ces Länders, un pourcentage de voix impressionnant allant de 12 à 24%, alors qu’il s’est essentiellement battu contre la politique des réfugiés de la chancelière par peur d’une islamisation croissante de l’Allemagne, et sur le thème de la criminalité, associant volontiers les deux sujets. Politiques et observateurs ont bien relevé que la crise migratoire a, pendant la campagne électorale, largement dominé les débats aux dépens des thèmes habituellement propres à des élections régionales tels que l’éducation et les infrastructures. Il n’est pas moins exact de dire que les Verts relèguent la CDU pour la première fois dans l’histoire du Bade-Wurtemberg, où celle-ci avait régné 58 ans durant, sans discontinuité jusqu’en 2011, à la 2e place – la CDU perdrait 12 points quand les Verts en gagnerait près de 7. La CDU perd également le match en Rhénanie-Palatinat face au SPD sortant de Malu Dreyer qui l’emporte plutôt aisément, avec environ 4 points d’écart, contre sa concurrente chrétienne-démocrate, Julia Klöckner, alors que les sondages les avaient placées coude à coude.

Cette première impression doit cependant être nuancée : en regardant de plus près la situation propre à chacun de ces Länder, il apparaît en effet que le désaveu du parti chrétien-démocrate ne signifie pas automatiquement celui de la chancelière et de sa politique des réfugiés. En Bade-Wurtemberg, la grande césure a déjà eu lieu en 2011 quand les Verts  - sur fond de crise provoquée par le drame de Fukushima et le conflit autour du grand projet d’infrastructure dit de Stuttgart 21 - et le SPD ont ensemble (47,3% contre 39%) supplanté la CDU pourtant encore sortie des élections parti le plus fort du Land. Le charismatique ministre-président vert, Winfried Kretschmann, a, malgré tous les pronostics alarmistes des milieux économiques, conduit les affaires du Land avec le sens qu’il faut dans ce pays de la modernité mais aussi de la tradition. Au fond, W. Kretschmann était le meilleur ministre-président chrétien-démocrate qui avait jusqu’alors manqué au Bade-Wurtemberg, avec en plus, le nécessaire grain d’écologie et de développement durable qu’il fallait.  A cela s’ajoute le fait qu’au nom des valeurs humanitaires de l’Europe, W. Kretschmann a pendant la campagne électorale ouvertement soutenu la politique des réfugiés d’Angela Merkel, alors que son challenger chrétien-démocrate, Guido Wolf, espérait, lui, gagner des points en se démarquant de celle-ci. On retrouve le même cas de figure en Rhénanie-Palatinat où J. Klöckner a cru pouvoir l’emporter sur M. Dreyer en critiquant la politique migratoire de la chancelière. Si les succès de Kretschmann et de Dreyer sont des victoires remportées sur la CDU au plan régional, ce sont autant de succès pour la politique des réfugiés défendue par Angela Merkel. Leur échec, à n’en pas douter, lui aurait été, par contre, imputé. 

Lothar Ruhl : Il est certain qu'un bon nombre d'électeurs des partis chrétien-démocrate (CDU) et social-démocrate (SPD) ont quitté leur camp. Pour beaucoup, ils ont porté leur choix sur l'AfD (Alternative für Deutschland), un mouvement de droite assez récent qu'il est encore difficile d'appeler un parti. Il ne s'agit pas, à proprement parler, d'un parti d'extrême-droite bien qu'ils en aient une. C'est eux qui l'ont désigne par droite populiste et effectivement, les chrétiens-démocrates comme les sociaux-démocrates perdent du terrain face à cette formation.  C'est quelque chose de certain. Les sondages montrent par ailleurs que les sociaux-démocrate sont plus touchés que les chrétiens-démocrates par ce phénomène.

Les conséquences potentielles de la défaite électorale dans les Länder de Bade-Wurtemberg ou de Rhénanie-Palatinat, pour Angela Merkel, s'ancreraient plus dans le long-terme que dans le court. Considérant les échéances électorales de l'année prochaine  – l'élection fédérale – on peut supposer qu'il y aurait des conséquences psychologiques réelles, susceptibles de nuire à l'autorité de la Chancelière, ainsi qu'à affaiblir les soutiens qu'elle trouve aujourd'hui dans son propre parti des chrétiens-démocrates.

La ligne d'Angela Merkel sur les migrants est très critiquée en Europe. Jusqu'où est-elle soutenue par son propre camp et son électorat ?

Lothar Ruhl : Au sein du parti chrétien-démocrate et à l'intérieur de son groupe parlementaire du Parlement fédéral  – le Deutscher Bundestag – on sait qu'il existe plusieurs mouvements critiques à son égard. Néanmoins, il s'agit le plus souvent d'élus qui craignent le résultat des prochaines élections fédérales de l'année prochaine et ne souhaitent pas perdre leurs propres sièges. Cela étant, ils ne peuvent absolument pas se séparer d'Angela Merkel. Il est d'ailleurs intéressant de constater que dans deux des Länders concernés par les élections régionales du 13 mars, le Bade-Wurtemberg et la Rhénanie-Palatinat, les électeurs de la CDU envisageant de voter se prononcent d'une façon particulièrement critique. Non pas à l'égard d'Angela Merkel, mais bel et bien à l'égard des candidats régionaux qui ont fait le choix de prendre des distances avec la chancelière. C'est particulièrement interessant et cela témoigne d'un soutien indéfectible chez son électorat. Certes, il est affaibli par les critiques formulés par les députés de sa formation au Bundestag, sur sa personne et sa politique concernant les migrants et les réfugiés.

En Saxe-Anhalt, le parti populiste AfD (Alternative pour l'Allemagne) arriverait en deuxième position derrière la CDU, avec 24% des voix. Comment doit-on interpréter ce chiffre particulièrement élevé ? Le fait que la Saxe-Anhalt se situe à l'Est est-il significatif de ce résultat ? 

Jérôme Vaillant : L’AfD est en passe d’être représentée dans tous les parlements régionaux, au fur et à mesure qu’ont lieu des élections régionales, aussi bien à l’Ouest qu’à l’Est. Ce qui surprend, c’est effectivement le niveau du succès remporté en Saxe-Anhalt, 24% selon les estimations à 20h de la première chaîne de télévision allemande. Et peut-être faut-il prendre également en compte le score du parti NPD pour prendre pleinement la mesure du succès remporté par les mouvements populistes et même néo-fascistes. Certes, le NPD passe d’une élection régionale à l’autre de 4,6 à " seulement " 3,2%, mais ces 3,2% sont à ajouter aux 24% rassemblés par l’AfD, soit un total de plus de 27%. Le parti néo-nazi NPD rencontrait traditionnellement plus de succès à l’Est qu’à l’Ouest, il a sans aucun doute nourri de son activisme les incendies de foyers destinés à accueillir des réfugiés.

Mais le part qui emporte la mise au niveau parlementaire, c’est l’AfD dans la droite ligne des différents mouvements qui essaiment dans l’Est de l’Allemagne, dans les nouveaux Länder, autrement dit dans l’ex-RDA qui se caractérise depuis l’unification allemande par une exacerbation xénophobe fantasmée puisque le pourcentage d’étrangers y résidant y est nettement inférieur à celui de l’Allemagne de l’Ouest. Certes le phénomène est aussi un phénomène Ouest-allemand, pourtant la gravité des actes xénophobes en ex-RDA ne peut qu’interpeller. Il faut assurément y voir, même plus de 25 ans après l’unification,  un aspect résiduel du manque de savoir-vivre démocratique hérité de la RDA où les citoyens n’ont pas appris le débat libre d’idées et n’ont pas appris à respecter l’autre et le vivre ensemble avec les autres. Ces autres, quand il y en avait en RDA, étaient de petits groupes imposés d’en haut par l’Etat et le parti sans autre explication, ni introduction au respect de l’autre. A leur façon, les nouveaux Länder de l’Est se coulent dans le schéma des autres anciens pays de l’Est, les pays de Visegrad, qui s’opposent avec Viktor Orban en Hongrie à la politique des réfugiés menée par la Chancelière allemande – pourtant elle-même originaire de l’Est.

Apparition de nouveaux partis aussi bien à l'extrême-gauche qu'à l'extrême-droite (ce qui met un peu à mal la prédominance des deux partis traditionnels SPD et CDU), diversité renforcée des coalitions, confusion des électeurs et élus de la CDU face à la politique migratoire promue par Merkel (qui attire d'ailleurs de nombreux sympathisants SPD et Vert), etc. Le paysage politique allemand n'est-il pas, à l'heure actuelle, en train de connaître un bouleversement majeur ? 

Jérôme Vaillant : La formation de coalitions stables de gouvernement n’est plus simple depuis déjà, au plus tard, la précédente législature, quand il est apparu que les Länder, comme ensuite le Bund (le niveau fédéral) allait devoir faire avec un système non plus tripartite, mais avec un système pluripartite en voie de développement. A côté des partis traditionnels comme la CDU/CSU – que d’aucuns comptent d’ailleurs comme deux partis puisque, pour aussi proches qu’ils soient, sont autonomes et ne sont liés au Bundestag que par l’appartenance à un même groupe parlementaire -, le SPD, le FDP – chancelant, en cours de réanimation – et les Verts, désormais comptés parmi les partis de l’establishment. Il existe encore Die Linke/La Gauche, issue de la fusion du parti successeur du SED de RDA avec des groupements contestataires se situant à la gauche du SPD à l’Ouest, et désormais l’AfD. On peut oublier le parti des Pirates qui a pourtant perturbé le jeu politique il y a quelques années, comme d’autres partis protestataires régionaux sans lendemain. Plus il y a de partis et moins il est facile de composer une coalition gouvernementale stable. Le régime politique allemand est fondé sur l’idée que le mode de scrutin à la proportionnelle, chère au pays, est supportable tant que quelques éléments de régulation – comme le seuil des 5% en dessous duquel un parti n’est pas représenté au Parlement – limite le nombre des partis ayant vocation à œuvrer au Parlement et capables de former entre eux des coalitions stables.  Jusqu’à maintenant, le pluripartisme n’a pas empêché la formation de gouvernements dans les Länder et dans la Fédération, mais il risque d’induire de plus en plus souvent la formation de grandes coalitions  alors que celles-ci sont jugées peu favorables à l’épanouissement de la démocratie dans la mesure où elles provoquent en même temps l’éclatement, et ce faisant l’affaiblissement de l’opposition. Sauf que les Allemands ne détestent pas les grandes coalitions, que leurs votes ont fait naître ces dernières années tant au niveau fédéral que régional.

La question conduit à celle de savoir si en plus des cinq partis existants, l’AfD s’établira durablement comme un sixième parti ? Il n’y a pas de réponse évidente à cette question. Le politologue Karl-Rudolf Korte estime qu’il serait hasardeux de tabler sur la disparition rapide de l’AfD. Certes, c’est un parti pour lequel les électeurs votent par protestation : ils veulent envoyer un message d’avertissement aux gouvernants du pays sur des questions précises comme la crise migratoire, la sécurité dans la société. Il convient dans ce contexte de rappeler que l’AfD s’est d’abord constitué dans le refus de l’Europe et surtout de l’euro, que le parti est donc en mesure de proposer un programme fondamental sur, non pas seulement quelques questions occasionnelles, mais sur des questions de fond. L’AfD se présente comme un parti conservateur, libéral ; il est plutôt à placer dans la mouvance nationale-conservatrice à droite de la droite.

Pour sa part, Angela Merkel estime et espère que les succès remportés par l’AfD sont circonstanciels et que ce parti se réduira comme peau de chagrin  au fur et à mesure que son gouvernement résoudra les problèmes qui provoquent les craintes de ses électeurs.  Elle est habilitée à l’espérer dans la mesure où il s’agit encore d’un parti essentiellement contestataire et protestataire. Elle reste confiante dans la capacité de l’Allemagne à relever les défis auxquels elle est confrontée (dans la plus pure vaine de son slogan " Wir schaffen das ! " ("Nous réussirons") parce que le pays est riche en ressources et compétences. Mais c’est évidemment un pari sur l’avenir dont on ne saura que plus tard s’il a abouti.

Dans quelle mesure la victoire dans un ces Länder est-elle significative ? Qu'est-ce que ces résultats peuvent traduire du rapport de force en vue des prochaines élections fédérales qui auront lieu en 2017 ? 

Jérôme Vaillant : Les succès de l’AfD , qui font l’effet dans le pays d’un tourbillon, ne peuvent que pousser les partis à repenser non seulement leurs programmes politiques, mais à revoir leur stratégie en termes d’alliances pour ramener vers eux des électeurs égarés et les fidéliser à nouveau. Jusqu’à maintenant, le régime politique et institutionnel de l’Allemagne a permis aux partis d’y trouver les outils des transformations nécessaires parce que, malgré la crise de défiance latente des citoyens à l’égard des partis, il n’y a pas, malgré tout, de réelle crise de légitimité démocratique d’un système fondé sur la représentativité, mais qui cherche à introduire en son sein davantage d’éléments de démocratie directe pour maintenir le lien entre citoyens et partis. Autrement dit, le système se révèle suffisamment souple pour s’adapter aux évolutions, sans remettre en cause ses fondements.

RCela est également lié à l’autorité que donne au chancelier son statut institutionnel. Il est le garant de la stabilité gouvernementale puisqu'l ne peut être renversé que par la substitution d’une nouvelle majorité à celle qui a permis son élection  par le parlement fédéral à la majorité qualifiée de ses membres. Une fois élu, parfois au prix de négociations longues et difficiles pour trouver et définir une telle majorité, un chancelier a normalement la garantie de pouvoir gouverner jusqu’au terme de son mandat et de partir en campagne pour  un nouveau mandat avec le bonus que lui donne la fonction. Par ailleurs, au-delà de son autorité constitutionnelle, tout chancelier apprend dès qu’il dépend d’une coalition l’art du compromis – ce qui va dans le sens même des institutions d’un système fédéral qui ne peut subsister que par l’art de trouver des compromis aux multiples niveaux du système. C’est là la force du système politique allemand que ne menacent pas les succès de l’AfD.

Lothar RuhlTrès clairement, l'enjeu principal est de savoir qui a perdu le plus d'électeurs ; et comment les partis concernés parviendront – ou non – à retrouver leurs positions respectives après coup. Cela décidera de qui, de la politique fédérale ou de la politique régionnale, aura le dessus. Jusqu'à présent, la politique régionale influence la politique fédérale plus que l'inverse, notamment en raison des pertes subie par la coalition CDU-SPD.

Quoiqu'il arrive, Angela Merkel se maintiendra au gouvernement. Le but stratégique, l'objectif qu'elle nourrit, consiste à se ménager plus de temps pour voir comment la situation évoluera d'ici la date des élections fédérales prochaines, en automne de l'année qui vient. La victoire de la  droite populiste pourrait l'isoler rapidement :  personne ne voudra former un gouvernement avec eux, quelque soit le Land où elle pourrait l'emporter, en Rhénanie-Palatinat, en Bade-Wurtemberg ou en Saxe-Anhalt. 

Il n'y aura peut-être pas de majorité gouvernementale en Saxe-Anhalt. Cela sera probablement très difficile en Rhénanie-Palatinat. Dans le Bade-Wurtemberg, le parti vert est particulièrement populaire, notamment grace à Winfried Kretschmann. Installé au pouvoir depuis quatre ans maintenant, il est probable qu'il se maintienne dans le cadre d'une coalition avec les sociaux-démocrates. Si ces derniers perdent trop de voix, il ne serait pas surprennant que cela se fasse avec les chrétiens-démocrates. Le parti vert est assez stable dans le Bade-Wurtemberg. Il est peu probable de trouver de rose en Rhénanie-Palatinat, ou dans le Saxe-Anhalt. Cela dit, pour la CDU, le Bade-Wurtemberg est l'Etat le plus important à côté de la Bavière. 

La question de la majorité au Conseil fédéral, dans la chambre des Länders demeure un enjeu : si les chrétiens-démocrates ne parviennent pas à remporter une victoire dans au moins l'un des trois Landër, leur position au Conseil sera affaiblie. C'est cela qui est en jeu pour Angela Merkel : l'ampleur et la gravité de l'affaiblissement.

Pour ce qui est de la deuxième partie de la question, il est très difficile de fournir une réponse à ce propos. Les élections fédérales se tiennent l'an prochain ; en octobre. Il reste suffisamment de temps pour qu'énormément d'événements se produisent, dans un sens ou son contraire. Tenter un pronostic, plus que compliqué, me parait exclu.

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