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"Une bête aux aguets" : un roman dément et addictif
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Marine Baron pour Culture-Tops

Marine Baron pour Culture-Tops

Marine Baron est chroniqueuse pour Culture-Tops.

Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).
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Une bête aux aguets
De Florence Seyvos
Editions de l’Olivier, 144 pages, 17 euros Paru le 20 août 2020

Recommandation

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Thème

Peu après une maladie étrange, une petite fille se trouve dans une tourmente et un décalage avec son entourage qui ne la quitteront plus. Cette petite fille devient une femme qui sombre peu à peu dans un dérangement permanent, lequel ressort lorsqu’elle observe le monde qui l’entoure, en se remémorant des souvenirs d’enfance. Le déclenchement des troubles les plus manifestes a lieu lorsque la jeune femme aperçoit, dans un livre d’art, un tableau dans lequel elle croit s’être reconnue.

Points forts

- L’écriture de ce roman est absolument lumineuse. C’est un plaisir de lire un texte aussi richement écrit, qui n’économise ni les adjectifs, ni les adverbes, ni certaines répétitions nécessaires qui explicitent descriptions et dialogues. Les sensations de la narratrice s’expriment toujours avec élégance, précision et profondeur par le corps, ce qui permet une communication instantanée avec le lecteur.

- L’écrivain parvient à entraîner le lecteur dans un univers très particulier, détaché du réel, avec succès. On plonge immédiatement dans cette description envoûtante des souvenirs de la narratrice, dans son incommunicabilité avec sa mère, avec l’homme dont elle partage la vie, aussi naturellement que dans un raisonnement logique. L’auteur parvient en effet à rendre son glissement dans l’inconnu et ses paradis artificiels les plus étranges de façon imperceptible. 

Points faibles

Si l’univers de ce livre est très particulier, il pourra sans doute, et c’est en quelque sorte la rançon de son originalité, déstabiliser plus d’un lecteur. L’adhésion au monde de la narratrice pourra sans doute être problématique pour les adeptes des fictions réalistes.

En deux mots ...

Un roman original fulgurant qui entraîne le lecteur dans un monde parallèle avec une facilité déconcertante. 

Un extrait

« Elle m’a dit qu’il était médecin. Ils ont parlé très longtemps dans la pièce à côté, elle a eu beaucoup de mal à le convaincre. J’entendais sa voix à elle qui insistait, revenait à la charge, et je l’entendais, lui, repousser ses arguments. J’ai senti qu’on me redressait sur mes oreillers. À travers mes paupières gonflées, j’ai vu un homme s’approcher. Il était assis sur mon lit, il m’a obligée à ouvrir un peu la bouche, j’ai senti le contact d’une pipette et un liquide extrêmement sucré et extrêmement amer s’est répandu sous ma langue. Le goût était si atroce que j’ai voulu le cracher, mais au même instant, une fraîcheur comme scintillante s’est répandue dans ma tête et dans ma poitrine. J’ai eu l’impression que ma tête s’ouvrait, et respirait. Mes poumons aussi se sont ouverts, je les ai sentis se déplier comme deux ailes soyeuses et amples. Et pendant ce temps, le scintillement continuait à courir dans mes artères et mes vaisseaux, il gagnait joyeusement mon ventre, y tourbillonnait, il envahissait mes bras et mes jambes jusqu’au bout de mes doigts, de mes orteils. Scintillement est le seul mot que j’aie jamais trouvé pour décrire cette sensation ». (p12).

L'auteur

Florence Seyvos, née en 1967, a notamment publié, en 1992, un récit, Gratia, aux Éditions de l'Olivier. En 1995 est paru son premier roman, Les Apparitions, pour lequel elle a obtenu en 1993 la bourse jeune écrivain de la fondation Hachette, ainsi que le prix Goncourt du premier roman 1995 et le prix France Télévisions. Depuis 1987, elle a également publié une dizaine de livres jeunesse pour « L’école des Loisirs ». Elle a, par ailleurs, coécrit les scénarios de deux films : Les Années lycée : Petites ,La vie ne me fait pas peur  (prix Jean-Vigo), et Les Sentiments  (prix Louis-Delluc en 2003).

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