"Un mauvais maître" de Frédéric Rouvillois : un polar universitaire... un monde impitoyable <!-- --> | Atlantico.fr
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Frédéric Rouvillois a publié "Un mauvais maître" aux éditions La Nouvelle Librairie.
Frédéric Rouvillois a publié "Un mauvais maître" aux éditions La Nouvelle Librairie.
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Frédéric Rouvillois a publié "Un mauvais maître" aux éditions La Nouvelle Librairie.

Isabelle De Larocque Latour pour Culture-Tops

Isabelle De Larocque Latour pour Culture-Tops

Isabelle De Laroque Latour est chroniqueuse pour Culture-Tops. Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).  Culture-Tops a été créé en novembre 2013 par Jacques Paugam , journaliste et écrivain, et son fils, Gabriel Lecarpentier-Paugam, 23 ans, en Master d'école de commerce, et grand amateur de One Man Shows.

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"Un mauvais maître" de Frédéric Rouvillois

La Nouvelle Librairie, 18 décembre 2020 - 276 pages - 16.90 €

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Thème

Un matin de juin, un joggeur découvre dans les fourrés du Square Montholon (ancien jardin des Sanson, bourreaux de Paris) le cadavre d’un homme, la carotide tranchée et une scarification sur le front formant les chiffres XXI (ou XXL ?). Ce mort bien habillé se révèle être François Desnard professeur agrégé de droit, universitaire de grand renom. 

Enlisés qu’ils sont dans la recherche infructueuse d’attaquants nocturnes de Starbucks parisiens, le commissaire Lohmann et sa jeune capitaine, Valérie Morin, sont chargés de l’enquête.

Points forts

-Le portrait au vitriol de ce « mauvais maître », le professeur Desnard, qui a toutes les caractéristiques du pervers narcissique. Star dans sa partie, aussi médaillé “ qu’un maréchal soviétique en fin de carrière” , d’une intelligence hors pair, il se doit d’être le meilleur toujours et partout quitte à écraser quiconque risquerait de lui faire de l’ombre, épouse, amis ou collègues. Grand bourgeois aisé, affichant partout son portrait en grande tenue de cérémonie, c’est un snob (ne pas oublier que Rouvillois a écrit une Histoire du snobisme) qui se fait un temps appeler « d’Esnard » avant d’y renoncer, trop intelligent pour confondre longtemps être et paraître.

-Un réquisitoire très argumenté contre un monde impitoyable, celui de la haute université, les modalités du concours d’agrégation, le parcours épuisant des « thésards », les chausse-trapes, les coups tordus et le mépris des grands universitaires pour les simples avocats qui gagneront pourtant deux fois plus qu’eux en fin de carrière.

-La description minutieuse d’univers peu connus, celui des amateurs de livres rares ou celui des « survivantistes », qui affirment que Louis XVII n’est pas mort au temple. Nombreux ont été les prétendus Dauphins rescapés et il est amusant de noter que même Léon Bloy fut un adepte de Naundorff le plus célèbre d’entre eux.

- Les enquêteurs, le gros commissaire pataud et la jeune capitaine fine et souple, sont tout à fait conformes aux personnages d’une série télévisée -quoique dans ce type d’œuvrette la jeune femme serait commissaire et le bonhomme capitaine- mais Rouvillois s’amuse en faisant de Lohmann un homonyme du policier de M. le Maudit avec ses manies et ses travers physiques. 

- De nombreux clins d’œil à l’actualité, à la limite du complotisme (la destruction organisée des Starbucks), dans un style élégant, plein d’humour, qui n’exclut pas l’érudition.

Points faibles

Si les témoins interrogés ont tous cinquante mille raisons d’avoir buté ce professeur manipulateur et méprisant, cela ne suffit pas à créer un suspense bien construit. Les invraisemblances sont nombreuses et l’auteur ne maîtrise pas les règles élémentaires du roman policier en multipliant les fausses pistes uniquement pour le plaisir.

En deux mots...

A lire plutôt comme l’étude cruelle d’un microcosme élitiste de gens bien élevés que comme un polar pur et dur. A cette condition, le plaisir de lecture est bien là.

Un extrait

« Et voici qu’après avoir sué sang et eau, ils se retrouvent, souvent encore jeunes, tout au sommet et constatent alors qu’ils n’ont plus rien à faire ni à espérer (…) 

Pour ceux qui ne sont passionnés ni par l’enseignement ni par la recherche, et qui ne voyaient dans l’université qu’une carrière socialement prestigieuse, c’est une désillusion atroce, la roche Tarpéienne après le Panthéon. Etc. etc. Vous imaginez l’accumulation des « passions tristes » comme aurait dit Spinoza en plagiant Alain Minc ? Des passions qui se traduisent de différentes manières, mais notamment par le désir de vengeance et la fringale de pouvoir… » p. 184/185

L'auteur

Né en 1964 à Paris, Frédéric Rouvillois est un juriste doublé d’un essayiste et d’un romancier. Docteur en droit et agrégé de droit public,  maître de conférences à l'Université de Rouen (1994-1998) puis professeur agrégé de droit public à Caen (1998-2002), il est nommé à Paris Descartes en 2002 où il  enseigne le droit et le contentieux constitutionnel.

Monarchiste bibliophile, collectionneur, c'est un fin connaisseur de l'histoire des mœurs et des mentalités françaises du XIXe au XXIe siècle.

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