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Pour le Pape François : "Apprendre à recevoir son propre corps, à en prendre soin et à en respecter les significations, est essentiel pour une vraie écologie humaine"
©REUTERS/Tiziana Fabi

Bonnes feuilles

Présentée à Rome le 18 juin 2015, la nouvelle encyclique du pape François, Laudato Si’, sous-titrée "Sur la sauvegarde de la maison commune", met en avant un concept d’une grande portée, celui d’écologie intégrale. Frédéric Rouvillois nous permet de comprendre la pensée du Pape François sur l’écologie et d’en tirer des conclusions politiques. Extrait "La clameur de la terre - Les leçons politiques du Pape François", de Frédéric Rouvillois, aux éditions Jean-Cyrille Godefroy 2/2

Frédéric Rouvillois

Frédéric Rouvillois

Frédéric Rouvillois est Professeur de droit public à l’université de Paris. Il est à l'origine de la Fondation du Pont-Neuf. Dernier livre paru : Liquidation, Emmanuel Macron et le Saint-Simonisme, Cerf, sept. 2020.

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À elle seule, la régulation ne saurait répondre à la spécificité du problème écologique : "Nous ne pouvons pas penser que les projets politiques et la force de la loi seront suffisants pour que soient évités les comportements qui affectent l’environnement […]" (123).

Toute la difficulté tient alors à obtenir une prise de conscience, et au-delà, une adhésion active et responsable des personnes – qu’il est peu pertinent de prétendre contraindre, par la loi, à être écologiquement vertueux.

Sur ce plan, le point de départ paraît bien sombre, pour ne pas dire plus : "étant donné que le marché tend à créer un mécanisme consumériste compulsif pour placer ses produits, les personnes finissent par être submergées dans une spirale d’achats et de dépenses inutiles. Le consumérisme obsessionnel est le refl et subjectif du paradigme techno-économique" (203). Et un indice inquiétant pour le destin de l’humanité dans la nature.

"Cependant, souligne le Pape, tout n’est pas perdu, parce que les êtres humains, capables de se dégrader à l’extrême, peuvent aussi se surmonter, opter de nouveau pour le bien et se régénérer au-delà de tous les conditionnements mentaux et sociaux qu’on leur impose" (157). La principale difficulté, en l’espèce, consiste à surmonter des habitudes de facilité, de renoncement et de confort – notamment chez des jeunes qui, quoique sensibilisés aux problématiques environnementales, ont "grandi dans un contexte de très grande consommation et de bien-être qui rend diffi cile le développement d’autres habitudes. C’est pourquoi, insiste l’Encyclique, nous sommes devant un défi éducatif" (209). Un défi d’autant plus grand que cette éducation, quoiqu’ayant "pour vocation de créer une citoyenneté écologique, se limite parfois à informer, et ne réussit pas à développer des habitudes" (211), qui se substituerait aux anciennes au point de devenir "un style de vie."

Cette "éducation à la responsabilité environnementale" aurait donc pour rôle de participer à la "révolution culturelle" de l’écologie intégrale. Pour ce faire, elle devrait être globale, permanente, et relayée à tous les niveaux de la société, à l’école, dans les médias, mais surtout, au sein de la famille, qui constitue par excellence, "contre ce qu’on appelle la culture de la mort, […] le lieu de la culture de la vie1 ." "Dans la famille, poursuit le Pape François, on cultive les premiers réfl exes d’amour et de préservation de la vie, comme par exemple l’utilisation correcte des choses, l’ordre et la propreté, le respect pour l’écosystème local et la protection de tous les êtres créés. La famille est le lieu de la formation intégrale, où se déroulent les diff érents aspects, intimement reliés entre eux, de la maturation personnelle. Dans la famille, on apprend à demander une permission avec respect, à dire merci comme expression d’une juste évaluation des choses qu’on reçoit, à dominer l’agressivité ou la voracité, et à demander pardon quand on cause un dommage. Ces petits gestes de sincère courtoisie aident à construire une culture de la vie partagée et du respect pour ce qui nous entoure" (213). Inculquée dans la famille, la politesse est ainsi le premier moment du politique : le passage de la civilité à la civilisation. Quant à la famille, elle demeure le lieu d’apprentissage des limites et de la responsabilité, à rebours de la culture du déchet.

De même est-ce à ce niveau, celui de la famille, que s’apprend et s’intègre ce que Benoît XVI a appelé l’écologie de l’homme, rappelant que ce dernier aussi "possède une nature qu’il doit respecter et qu’il ne peut manipuler à volonté". Dans ce sens, remarque le Pape François, "il faut reconnaître que notre propre corps est en relation directe avec l’environnement et avec les autres êtres vivants. L’acceptation de son propre corps comme don de Dieu est nécessaire pour accueillir et pour accepter le monde tout entier comme don du Père et maison commune ; tandis qu’une logique de domination sur son propre corps devient une logique, parfois subtile, de domination sur la création. Apprendre à recevoir son propre corps, à en prendre soin et à en respecter les significations, est essentiel pour une vraie écologie humaine" (155).

Extrait "La clameur de la terre - Les leçons politiques du Pape François", de Frédéric Rouvillois, publié aux éditions Jean-Cyrille GodefroyPour acheter ce livre, cliquez ici

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