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Séoul et le monde de la K-pop frappés par les scandales sexuels
©Ed JONES / AFP

Gangnam style

Prostitution de mineures, viols, abus... Plusieurs stars de K-pop sont dans le viseur de la justice en Corée du Sud. Des actes qui semblent se multiplier à Séoul. La BBC a recueilli de nombreux témoignages bouleversants.

C'est un véritable séisme en Corée du Sud depuis le début de l'année 2019. Le monde de la K-pop est visé par de nombreux scandales, notamment sexuels. En point d'orgue, la mise en détention le 14 mai dernier de Seungri, star du groupe BigBang. Le chanteur de 28 ans, accusé d'avoir fourni des prostituées à de potentiels investisseurs japonais et des clients de la boite de nuit qu'il possède à Gangnam, arrondissement le plus riche de Séoul, en 2015.

Il lui est également reproché d'avoir détourné 400 000 euros de cette discothèque nommée Burning Sun et d'avoir enfreint les règles sanitaires. Cela ne s'arrête pas là puisque Seungri a également été cité dans une affaire où des célébrités partageaient sur un groupe de chat des vidéos de leurs relations sexuelles à l'insu de leurs partenaires.

Mais ces scandales ne sont que la partie immergée de l'iceberg car le Gangnam, considéré comme le Berverly Hills de Séoul, possède des pages encore bien plus sombres. La BBC a mené son enquête et découvert la face cachée de nombreuses discothèques : femmes droguées puis violées et mineures exploitées sexuellement.

"La vidéo est trop bouleversante pour être décrite"

Les journalistes anglais ont donc recueilli de nombreux témoignages pour comprendre l'horreur de ce système. Ils ont découvert que de nombreux VIP étaient prêt à payer le prix fort pour pouvoir droguer des femmes, les emmener à l'hôtel et les abuser sexuellement tout en filmant.

Un des journalistes de la BBC raconte une de ces vidéos : "Une femme nue est allongée sur un canapé rouge. Trois hommes la fixent. J'appuie sur lecture, un homme s'approche d'elle. Il lève un des membres, le lâche, il tombe. Ça le fait. Le corps est mou, elle ne réagit pas. Les deux minutes de vidéo sont trop bouleversantes pour être décrites. Elle semble avoir été agressé sexuellement par les trois hommes, à plusieurs reprises."

La vidéo a été partagée sur un chat réunissant plusieurs employés et est désormais entre les mains de la police d'investigation.

"Heureusement que j'étais éveillée quand c'est arrivé"

Une jeune femme, que l'on nommera Kim, raconte à la BBC son expérience vécue en décembre dernier :

"Un homme d'affaire asiatique s'intéresse à moi et commence à me servir du whisky. Quand il verse la boisson, je ne peux pas le voir, il a le dos tourné. J'ai bu environ trois ou quatre verres. A chaque fois, il me donnait aussi un verre d'eau à boire." Elle affirme avoir été droguée puis violée. Elle reprend connaissance à l'hôtel.

"Il m'a forcé à m'allonger mais je ne voulais pas, poursuit-elle. Quand je me levais, il me prenait par le coup et me forçais à rester sur le lit. J'ai commencé à pleurer et crier puis il s'est mis sur moi et a commencé à presser fort avec ses mains contre ma bouche. Il me répétait : "relax, relax."".

Kim a alors commencé à craindre pour sa vie : "Je n'arrivais plus à résister. Je souffrais tellement que je pouvais mourir, alors j'ai abandonné et suis resté étendue, comme un cadavre." La jeune femme a ensuite supplié son agresseur de la laisser partir. Il la force à prendre une photo avec lui et la laisse rentrer.

La victime s'est rendue à la police le lendemain mais aucune trace de drogue n'a été retrouvée dans son sang. Sans doute a-t-elle été victime du GHB. “Heureusement que j'étais éveillé quand c'est arrivé et que je peux décrire en détail ce que j'ai subi” confie-t-elle à la BBC.

Kim est entrée en contact avec d'autres femmes qui pensaient avoir été droguées et violées après un passage dans cette discothèque, mais ne se souviennent de rien. L'homme d'affaire a été retrouvé mais nie les faits. L'enquête est en cours.

Au cours des derniers mois, près de 4000 personnes ont été entendues par la police pour des allégations de drogues, de prostitution, d'agressions sexuelles et tournages illicites de vidéos. Ces révélations encouragent de plus en plus les femmes à parler.

Un système parfaitement rôdé

En continuant son enquête, la BBC a découvert que les clubs embauchaient des hôtes, appelés  "médecins", dont le but est de satisfaire les clients les plus riches. Leur rôle est d'attirer des jolies femmes avec des entrées et boissons gratuites. Boissons contenant évidemment de la drogue. Les "médecins" encouragent les filles à boire avec leurs clients. Entre 13 et 15% de la vente des boissons leur revient ensuite. Certains se font jusqu'à 20 000 dollars par mois.

L'un de ces médecins a confirmé à la BBC que les femmes ordinaires pouvaient être droguées et violées dans ce club. Un habitué du salon VIP explique avoir vu de près ce système de prostitution. Un soir, un serveur lui amène une femme : "Je me demandais si elle était malade mentalement. Elle bavait et son corps était mou. Je me suis demandé si elle allait mourir ici. J'ai dit au serveur qu'elle était trop ivre et il m'a répondu : "Elle n'est pas ivre. Elle ne se souviendra de rien pour que vous puissiez faire ce que vous voulez"".

Les mineures pas épargnées

Joo Won-Gyu est devenu l'un des plus grands militants contre les violences sexuelles faites aux femmes dans le Gangnam. Il a découvert, en 2015, que 20 adolescentes disparues travaillaient comme prostituées dans des clubs. Il a alors décidé de devenir leur chauffeur pour savoir comment elles étaient traitées et recrutées.

Après avoir travaillé au club pendant deux ou trois ans, on leur promettait qu'elles deviendraient artistes, actrices et qu'elles bénéficieraient de chirurgie plastique. L'une des plus jeunes a été recrutée à l'âge de 13 ans. En Corée du Sud, les relations sexuelles avec des mineurs sont considérées comme du viol.

Le pasteur explique à la BBC avoir été témoin d'agressions trois à quatre fois par semaine. Des femmes droguées, violées et battues. Il a essayé à plusieurs reprises de retirer des filles de ces clubs. Sans succès. Avec les enquêtes en cours, Joo Won-Gyu se fait le porte-parole des femmes agressées. Il a d'ailleurs mis en relation la BBC avec deux adolescentes enrôlées à l'âge de 16 ans. Des jeunes filles qui subissent le chantage. Filmées en mleur demandant d'avoir l'air innocentes, de faire "comme si" on les violaient. "C'est comme de la pornographie. Je dois faire comme si je ne voyais pas la caméra" explique l'une d'elles. Joo affirment qu'ils s'en servent pour les empêcher de partir ou d'aller voir la police.

Le commerce du sexe en Corée du Sud s'élèverait à 13 milliards de dollars. Suites à ces scandales, de nombreuses manifestations ont régulièrement lieu à Séoul. 354 personnes ont été arrêtées ces derniers mois. Malheureusement, des policiers auraient fermé les yeux sur de nombreux dossiers concernant ces clubs. Le président Moon Jae-in a ordonné l'ouverture d'une enquête sur des allégations de corruption policière. Le chef de la police de Gangnam a été démis de ses fonctions.

La Police nationale coréenne a créé une unité spéciale chargée d'enquêter sur les crimes commis contre les femmes. Les choses sont peut-être en train de changer mais encore de nombreuses victimes hésitent à témoigner et porter plainte, craignant le jugement d'une société très patriarcale.

BBC

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