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Les travaux parlementaires sont normalement encadrés par la Constitution, des lois organiques, et le règlement de chaque assemblée.
Les travaux parlementaires sont normalement encadrés par la Constitution, des lois organiques, et le règlement de chaque assemblée.
©LIONEL BONAVENTURE / AFP

Chroniques parlementaires

Les travaux parlementaires sont normalement encadrés par la Constitution, des lois organiques, et le règlement de chaque assemblée.

Samuel Le Goff

Samuel Le Goff

Ancien assistant de députés, ancien journaliste parlementaire et aujourd'hui consultant, Samuel Le Goff fréquente le palais Bourbon et ses environs depuis 20 ans.

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Les travaux parlementaires sont normalement encadrés par la Constitution, des lois organiques, et le règlement de chaque assemblée. Pourtant, il reste beaucoup d’espaces de liberté, qui sont gérés par des coutumes parlementaires non écrites, des sortes de gentlemen’s agreements.

L’un des buts des débats parlementaires est d’encadrer et de pacifier les débats politiques, qui peuvent parfois être conflictuels. Au-delà des désaccords de fond, il faut qu’il y ait un minimum de consensus entre parlementaires, sur le bon fonctionnement de l’institution. C’est notamment le cas pour ce qui concerne les droits de l’opposition.

Cette coutume parlementaire est assez peu évoquée, sauf lorsqu’elle est transgressée, ou qu’elle subit une interprétation qui ne fait pas consensus. C’est ce qui est arrivé, de manière très feutrée, lors d’une réunion de commission, au Sénat.

Les écologistes ont inscrit, dans leur journée parlementaire du 30 mai, un texte très médiatique, celui relatif à l’encadrement des PFAS, une famille de substances chimiques qualifiées de “polluants éternels” par leurs détracteurs. Le texte ayant été adopté dans le cadre de la niche écologiste à l’Assemblée nationale, le 4 avril, il était logique que le groupe au Sénat prenne le relais à la première occasion.

Vient le moment de la désignation du rapporteur, poste hautement stratégique. Le groupe écologiste estime qu’il doit lui revenir, puisqu’il s’agit d’un texte inscrit dans sa niche, qui plus est issu de la niche du groupe écologiste à l’Assemblée nationale. La majorité sénatoriale l’entend d’un autre oreille, et s’attribue le poste. Un passage en force que le président (centriste) de la commission assume politiquement, mais qu’il prend la peine de couvrir d’une argumentation sur l'interprétation de la coutume, pour sauver au moins les formes.

Il estime qu’effectivement, si la proposition de loi avait été déposée par un sénateur écologiste, le droit du groupe à obtenir le poste de rapporteur aurait été incontestable, mais comme c’est un texte qui vient de l’Assemblée nationale, la situation est un peu différente. Une position qui ne semble pas vraiment convaincre les écologistes, mais la loi de la majorité s’imposant, leur capacité à résister est très limitée. Il n’y a que 16 sénateurs écologistes (sur 348).

Le fait que le président de commission ait quand même eu besoin d’argumenter montre la force de ces gentlemen’s agreements, car ils sont le ciment du fonctionnement de l’institution. Si la majorité décide, elle a parfois besoin de l’opposition, soit pour afficher une unanimité qui renforce la légitimité d’un vote, soit pour qu’elle ne fasse pas (trop) d’obstruction. De temps à autre, des petits accrocs peuvent être tolérés, mais ils peuvent aussi se payer plus tard, sur le même texte, ou sur un autre. Je ne serais pas surpris que ce choix du rapporteur soit rappelé, en préambule des travaux, dans l’hémicycle, et ne fasse l’objet d’une protestation, juridiquement symbolique, mais politiquement significative.

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