Bobos gentrifieurs des quartiers populaires : mais pourquoi tant de haine ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Les frères Keery ont ouvert ce bar à céréales, à Londres, en décembre 2014
Les frères Keery ont ouvert ce bar à céréales, à Londres, en décembre 2014
©Reuters

Salade mixte

Axiome : les pauvres s'installent chez les riches, c'est de la mixité sociale. Les riches s'installent chez les pauvres, c'est de la colonisation.

Hugues Serraf

Hugues Serraf

Hugues Serraf est écrivain et journaliste. Son dernier roman : La vie, au fond, Intervalles, 2022

 

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S'il y a une catégorie socio-économique universellement détestée, en dépit de l'impossibilité manifeste d'en définir les contours exacts, c'est bien celle des bobos – et plus spécifiquement celle des bobos « gentrifieurs » qui métamorphosent les quartiers populaires en coins branchés à coups de disquaires vinyle et de restos sans gluten.

Ça n'est pas un phénomène exclusivement français (où aucune attaque de bar à céréales pour hipsters n'a encore été rapportée), mais l'idée selon laquelle la mixité sociale n'est une bonne chose que lorsque les pauvres emménagent chez les riches est, pour le coup, bien de chez nous. Lorsque que ça se passe dans l'autre sens, on appelle ça de la colonisation.

C'est ainsi que l'on se félicite de la construction de HLM dans le 16e arrondissement, où une bourgeoisie assez peu bohème aime bien cultiver l'entre soi, mais que l'on s'indigne de l'ouverture d'une brasserie chic à Barbès, au prétexte que les vendeurs de clopes à la sauvette des environs ne gagnent pas assez pour la fréquenter. La mixité sociale serait donc un peu comme le cholestérol, il y aurait la bonne et la mauvaise.

On pourra s'en étonner parce que ce n'est pas d'une grande logique : les quartiers modestes où s'installent journalistes web, psychothérapeutes gestalt et designers d'applis Facebook sont généralement faiblement pourvus en équipements collectifs, écoles de qualité et épiceries bio. Les trottoirs y sont mal nettoyés et les poubelles ramassées n'importe comment. Parce qu'ils connaissent toujours quelqu'un à la mairie, les nouveaux venus se débrouillent généralement pour faire mettre le secteur aux normes et, au moins en théorie, ça profite à tout le monde – vendeurs à la sauvette compris.

Bon, il est vrai qu'ils font aussi grimper le prix du mètre carré, mais pas tant que ça en fait : les bobos ne sont pas de vrais riches, juste des pas pauvres. S'ils en avaient vraiment les moyens, ils iraient s'installer directement dans un coin de rupins au lieu de chercher à transformer Belleville en Passy – ce qui prend du temps comme chacun sait.

L'e-book, nouveau Polaroid ?

L'immobilisme qui nous caractérise en tant que Français, et notre refus d'adopter rapidement les modes nouvelles, nous permet parfois, et paradoxalement, d'être en avance. Ainsi, et alors que le reste du monde a depuis longtemps troqué le livre-papier pour des liseuses électroniques et que l'on se demande, chez Darty, si nous allons enfin sauter le pas, voici que la tendance s'inverse.

Dans les pays les moins rétifs à l'e-book, États-Unis et Grande-Bretagne en tête, c'est la Bérézina numérique et les ventes de liseuses s'effondrent littéralement, à tel point que certaines grandes chaînes de distribution arrêtent purement et simplement de les proposer au public, en parallèle d'une hausse inédite de la demande de « vrais » livres.

N'étant pas moi-même amateur de Kindle (j'ai essayé, ça n'a pas pris) et assez bibliophile, je ne peux que m'en réjouir et me ranger à l'avis de Good e-reader, un webzine professionnel observant ce marché et pour les liseuses sont « l'équivalent moderne des appareils-photo Polaroid : un marché de niche ». Pour lui, les consommateurs se sont effectivement amusés avec les produit pendant quelques années parce que c'était rigolo, puis sont revenus au papier parce que c'était plus pratique et qu'on était effectivement propriétaire de ses bouquins.

Voyons voir, quel autre truc moderne avons-nous refusé d'adopter ?

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