SOS décodeur : y a-t-il vraiment un message dans les urnes ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Les urnes ne font pas émerger un "message" intelligible.
Les urnes ne font pas émerger un "message" intelligible.
©Reuters

Boîte de réception

Les politiques convaincus d'entendre le "message des urnes" ont le même problème que Jeanne d'Arc. Ça doit pouvoir se soigner.

Hugues Serraf

Hugues Serraf

Hugues Serraf est écrivain et journaliste. Son dernier roman : La vie, au fond, Intervalles, 2022

 

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Les responsables de partis qui, la semaine dernière encore, ont « entendu le message des Français », doivent être dotés d'une sacrée sensibilité auditive parce que moi, de mon côté, je n'ai rien entendu du tout.

Et cette notion d'un corps électoral homogène adressant un courrier collectif et démocratique à la classe politique me paraît de plus en plus comique. Les Français, on imagine, aimeraient pour la plupart vivre dans un pays prospère et pacifié, libre et sûr. OK, il doit bien y avoir une minorité de psychotiques pour rêver du contraire – un pays pauvre, en guerre, ultra-fliqué et dangereux –, mais bon...

Au-delà de ce consensus présumé, les urnes ne font pas plus émerger un « message » intelligible que les entrailles d'un poulet n'aident à prédire l'avenir ou la météo. D'où la capacité des gagnants comme des perdants à venir expliquer à la télé, dès les premiers résultats connus, ce qu'ont « voulu dire » les électeurs et comment leur répondre.

Ce coup-ci, le gouvernement est convaincu qu'on lui demande surtout de ne rien changer à rien ; la gauche de la gauche assure que c'est parce que Valls n'est pas assez comme Mélenchon que les ouvriers votent pour Le Pen ; les écolos envisagent de se couper en deux parce qu'ils ont reçu deux messages distincts et contradictoires ; le FN lit dans le fait d'avoir décroché une poignée de sièges sur des milliers l'annonce d'une irrésistible marche en avant. Et la droite, indiscutablement victorieuse sans qu'on sache vraiment ce qu'elle avait à raconter d'intéressant sur la gestion des départements (ce dont on se fiche d'ailleurs complètement puisqu'ils seront bientôt supprimés), entend qu'on lui demande de revenir faire ce qu'elle faisait avant d'être chassée du pouvoir...

Les messages plutôt que le message

Les Français, en fait, n'envoient aucun message particulier à quiconque. Moi qui vous parle, je n'ai pas envoyé de message du tout parce que j'ai changé d'adresse et que je ne me suis pas débrouillé à temps pour accomplir le micmac administratif qui permet de voter. Et si j'avais voté, ça aurait été à gauche par habitude, mais bien malin qui en aurait déduit que je suis un social-libéral pro-européen et atlantiste avec une vague sensibilité écolo et en aurait tiré la moindre considération pratique.

En fait, il faudrait abandonner cette habitude d'invalider les bulletins tâchés et inciter au contraire les électeurs à écrire ce qu'ils veulent sur ces petits carrés de papier recyclé. Le dépouillement serait long et compliqué, il y aurait des tas de contestations, mais lesmessages plutôt que lemessage des Français seraient rendus un poil plus clairs. A quoi ça servirait concrètement ? Mais à rien du tout. Tout comme le décompte des votes blancs ne sert à rien non plus, si on va par là. Et on continuerait juste d'être élu parce qu'on a eu plus de voix que les autres, ce qui est bien la moindre des choses dans un pays démocratique.

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