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La quasi nationalisation d'Alstom, cache-misère de l'échec du patriotisme économique à la Montebourg
©Flickr

Revue d'analyse financière

Dans l'œil des marchés : Jean-Jacques Netter, vice-président de l'Institut des Libertés, dresse, chaque mardi, un panorama de ce qu'écrivent les analystes financiers et politiques les plus en vue du marché.

Jean-Jacques Netter

Jean-Jacques Netter

Jean Jacques Netter est vice-président de l’Institut des Libertés, un think tank fondé avec Charles Gave en janvier 2012.

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L’Etat faible a de plus en plus de mal à résister aux divers corporatismes français qui disposent d’un pouvoir de nuisance considérable sur l’économie tout en étant absolument pas représentatifs. Un petit nombre salariés de la SNCF prend en otage la France entière, les intermittents du spectacle menaçent d’annuler tous les festivals de l’été, les aiguilleurs du ciel veulent se mettre en grève et bientôt on peut s’attendre à ce que les salariés de la SNCM, assurant la liaison Corse Continent, se mettent une fois de plus en grève. Ils sont les véritables naufrageurs de la France.

Pendant ce temps, l'Elysée et le gouvernement se sont mobilisés sur le dossier Alstom pour éviter la démission d’Arnaud Montebourg ministre de l’Economie, du redressement productif et du numérique. Toutes les solutions retenues sont le contraire de ce qu’Arnaud Montebourg préconisait depuis deux mois, ce qui ne l’a pas empêché de crier victoire, car François Hollande lui a accordé la nationalisation partielle d’Alstom. Celle qu’il n’avait pas obtenue pour Florange ! Au passage, on notera que les principes les plus élémentaires de la gouvernance de toute entreprise privée et en plus côtée en bourse n’ont absolument pas été respectés !

On a également, pour le moment, du mal à bien comprendre les contreparties obtenues par Bouygues pour mettre à disposition de l’Etat ses titres Alstom sans les avoir vendus. Quelle est la contrepartie ? On ne devrait pas tarder à avoir la réponse, lors des prochaines décisions sur le passage à la TNT de LCI et le rachat de plus en plus probable de Bouygues Telecom par Orange. Au total, l’Etat entre à 20% dans le capital d’Alstom,ce qui revient à une quasi nationalisation et à une addition qui pourrait atteindre 2Md€….

Toute cette histoire est une fois de plus la démonstration de l’incapacité de la France à développer de grandes filières industrielles. L’industrie ne pèse plus que 12,9% du PIB de la France contre 15,6% en 2006.

Le Conseil d’Analyse Economique dont Agnès Benassy-Quéré est la présidente déléguée a invité l’Etat à repenser sa politique industrielle et surtout cesser de protéger l’existant pour financer des projets innovants. La puissance publique devrait adopter une vision plus schumpétérienne de la politique industrielle, explique Lionel Fontagné, un des rapporteurs du document intitulé "Pas d’industrie, pas d’avenir ?". Il faut cesser d’aider systématiquement ce qui est visible et en difficulté ou assez proche des élites dirigeantes pour susciter leur écoute. Il faudrait savoir stopper les projets qui ne marchent pas ou plus. On en est très loin. D’ailleurs, pour Elie Cohen, directeur de recherche au CNRS, le prochain Alstom, c’est Alcatel. La société survit car elle a mis tous ses brevets en gage auprès de Goldman Sachs. Elle est en train d’abandonner les infrastructures mobiles qui sont le cœur des réseaux car elle est dépassée par Huawei, société chinoise qui est devenue le champion de la future 4G.

En France, le déficit public pourrait dépasser cette année les 4% du PIB contre les 3,8% promis par le gouvernement. Ceci est la conséquence du fait que la baisse des dépenses publiques est pour le moment une totale illusion. La Cour des Comptes préconise une fois de plus une réduction drastique des effectifs de la masse salariale de l’Etat. Au lieu de s’y employer, le gouvernement a cédé sur les intermittents et sur l’écotaxe, soit une addition de 4Md€.

Après le "cagnoting" de la semaine dernière qui consistait à redistribuer les rentrées fiscales de l’ISF et de la lutte contre la fraude fiscale supérieures à ce qui était prévu,  une partie importante des députés socialistes frondeurs réclament maintenant de "faire pause" dans la diminution des dépenses publiques. 

Devant les nouveaux essais de la France d’obtenir encore du temps pour diminuer ses déficits, Angela Merkel a recadré sèchement Paris et Rome. Elle refuse toute remise en cause du pacte de stabilité. L’écart se creuse avec nos partenaires européens. Les derniers chiffre d’activité enregistrés selon les premières estimations de Markit pour le moi de juin sont très mauvais. Le monde sans croissance, sans usines et donc sans emploi avance à grands pas. Il n’y a pas de fonds de pension car l’argent, c’est sale. Il est détesté à la fois par la gauche et par la droite. Résultat : les investisseurs institutionnels achètent peu d’actions, les particuliers matraqués par la fiscalité pénalisante ne bougent plus. Heureusement avec la coupe du monde de football, la machine médiatique va mouliner du vide pendant trois semaines.

Aux Etats-Unis, la croissance est remise en question par le FMI. Janet Yellen, la présidente de la Fed, a encore réduit de 10Md$ le montant  des actifs rachetés chaque mois par la banque centrale américaine. On est désormais à 35Md$ contre 85Md$ il y a un an.

Les matières premières agricoles à surveiller : porc, riz et sucre

Le prix du porc est en train de s’envoler aux Etats-Unis à la suite d’une épidémie de diarrhée qui a touché plus d’un million de porcs répartis sur trente états américains. La production devrait baisser de 3% à 4% in 2014. Le prix évolue autour de $80 à $85 pour 100 livres, comparé à  $55/$60 il y a un an. Les principales sociétés concernées sont : Hormel Food, qui abat 10 500 porcs et Hillshire Brands.

En Chine, on avait détecté à Shanghai un circovirus de type 2 (PCV2) appelé syndrome de dépérissement post sevrage. Des cadavres avaient été repêchés dans le Huangpu la rivière qui traverse Shanghai. Les sociétés les plus importantes sont China Yurun Food et WH Group.

L’Allemagne est maintenant le numéro un en Europe. Les abattoirs allemands traitent 60M de porcs par an contre 25 M en France. La filière a su investir pour valoriser ses coproduits avec des outils de méthanisation. La vente de gaz rapporterait maintenant autant que la vente de viande. Les sociétés concernées sont : Tönnies, le n°1, avec  25% de part de marché. Livre les chaines discount Aldi et Lidl. A racheté zur Mühlen le n°6, Vion Food , PHW , WestFleisch.

La France a du mal à profiter de cette évolution, car les exploitations sont trop petites (183 truies contre 573 aux Pays-Bas), les abattoirs sont vétustes et les produits sont trop moyen de gamme. Il y a peu d'innovations commerciales et la filière est désunie.

Les principales sociétés sont des coopératives comme Cooperl-Arc-Atlantique (4,8M de porcs abattus en 2012), Bigard-Socopa Viandes (4,6), Groupe Gad (2,3), Kermené (1,8 /Groupe E Leclerc), Groupe Jean Floc'h (1,7), Gâtine Viandes (1,1 Mousquetaires), Tradival (1), Abera (1/Groupe Glon).

Le cours du riz ne cesse de baisser. C’est une donnée très importante, car 3,5Md de personnes dans le monde obtiennent 20% des calories qui leur sont nécessaire avec du riz.

La Thailande n’est plus le premier exportateur de riz (6,9MT). Madame Yingluck Shinawatra,  ex premier ministre, avait mis en place un système de subventions pour les producteurs de riz qui a obligé son gouvernement à acheter 17MT de riz 50% au dessus du prix international. A la suite du dernier coup d’état intervenu en Thailande, le système a été supprimé. Il reste à vendre les stocks, ce qui pèse bien évidemment sur les cours.

Le royaume est devancé par l’Inde (9,5MT) avec  REI Agro, Kohinoor Foods et le Vietnam (7,6MT).

Les stocks de sucre sont au plus haut depuis dix ans. La consommation baisse sous la pression des lois sur la santé qui s’attaquent à la consommation excessive de sucre combinée avec des matières grasses et du sel. Compte tenu du développement exponentiel de l’obésité dans le monde, l’Organisation Mondiale de la Santé vient de déclarer le sucre ennemi numéro deux pour la santé après le tabac. Elle recommande de diminuer la consommation de sucre quotidienne par deux. Paradoxalement les cours, autour de 18,75 cents la livre à New York  renouent avec un niveau qu’il n’avait plus atteint depuis huit mois. Toutes les valeurs qui sont liées au sucre sont vulnérables à ces campagnes.

En France, Tereos est le n°4 mondial avec les marques Béghin Say, la Perruche, L'antillaise. La société est une coopérative dont les résultats ont baissé de 29% au cours de l’exercice 2013-2014. Les sucriers français sont devenus les plus compétitifs d’Europe. Tereos fabrique du sucre à partir du maïs, du blé, de la pomme de terre et du manioc.

Aux Etats-Unis, la production est pratiquement toujours excédentaire. Le gouvernement a même été obligé de racheter en 2013 400 000 tonnes de sucre aux transformateurs pour leur éviter la faillite. Les principales sociétés américaines sont : American Crystal Sugar, Amalgamated Sugar Co, US Sugar Corp, International Flavor and Fragrances (substitut de sucre).

En Ukraine, le cours du sucre a progressé de 47% en 2013. Astarta est le numéro un avec 19% de part de marché. La valeur est côtée sur le marché polonais.

En Inde, le gouvernement avait été obligé avant les élections de subventionner les exportations pour faire diminuer les stocks qui s’élevaient à 9MT soit un plus haut depuis cinq ans.

Le Crédit Suisse propose aux investisseurs la possibilité de vendre à découvert les valeurs du secteur. Les principales valeurs du  panier CSERSUGA Indexshort sont aux Etats-Unis : Archer Daniel Midland (produits agricoles), Coca Cola Company (soft drinks), Dr Pepper Snapple (soft drinks), Ingredion (Produits agricoles), Pepsico (softdrinks); en Grande-Bretagne : ABF (produits alimentaires), Tate & Lyle (sucre et amidon); en Allemagne : Suedzucker (produits alimentaires);  au Brésil : Cosan (éthanol), Sao Martinho (produits alimentaires);  au Mexique : Arca Continental (soft drinks), Coca Cola Femsa (softdrinks), Culiba (softdrinks), Fomento Economico (softdrinks), Grupo Bimbo (produits alimentaires); en Afrique du Sud : Illovo (produits alimentaires), Tongaat (produits alimentaires);au Chili :Embotelladora Andina (softdrinks).

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