Concurrence à mort : quand des économistes allemands reconnaissent que personne d'autre en Europe ne peut reproduire les réformes Hartz sous peine de détruire le système <!-- --> | Atlantico.fr
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Concurrence à mort : la baisse des coûts salariaux allemands était déjà largement à l’œuvre avant même toute réforme Hartz.
Concurrence à mort : la baisse des coûts salariaux allemands était déjà largement à l’œuvre avant même toute réforme Hartz.
©Reuters

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Érigées en symbole de la compétitivité retrouvée, les réformes engagées par Peter Hartz en 2003 en Allemagne ne seraient pas la recette miracle annoncée, selon une récente étude intitulée "L’expérience allemande ne permet pas de donner un quelconque support à des recommandations européennes".

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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10 ans après leur application, les réformes Hartz font encore parler d’elles. Symbole de la compétitivité retrouvée pour une pléiade de commentateurs germanophiles, il semblerait finalement que ces réformes n’aient à peu près rien à voir avec le statut « superstar » de la première économie européenne.

Une récente étude produite par les économistes allemands, Christian Dustmann, Bernd Fitzenberger, Uta Schönberg et Alexandra Spitz-Oener offre une conclusion différente à la légende Hartz.

« D’une part, la chute du mur de Berlin en 1989 et son coût sans précédent pour l’économie allemande a provoqué une longue période de mauvaises performances macroéconomiques. D’autre part, cette situation a ouvert la possibilité aux employeurs allemands d’accéder à de nouveaux voisins à l’est, auparavant bloqués derrière le rideau de fer, et qui se caractérisaient par de faibles coûts salariaux (…). Ces facteurs ont changé le pouvoir de main entre les employeurs et les employés, et ont forcé ces derniers à répondre d’une manière bien plus flexible que certains n’avaient pu le prévoir. »

La thèse développée par les économistes est que la baisse des couts salariaux allemands était déjà largement à l’œuvre avant même toute réforme Hartz, et résultaient principalement de la réunification allemande, qui aura imposé une pression considérable sur les salaires. Selon les auteurs, une telle baisse a également été rendue possible par le mode de relation des partenaires sociaux en Allemagne.

« Nous soutenons qu’au début des années 1990, la structure de gouvernance spécifique qui prévalait dans les relations industrielles a permis une accélération sans précédent de la décentralisation du processus de fixation des salaires, des heures de travail et des autres aspects des conditions de travail, (…) au niveau des entreprises elles-mêmes ou même à l’échelle du travailleur ».

Les auteurs font ici remarquer que les négociations salariales se sont progressivement mais rapidement détournées des échelons régionaux ou de branches, pour se fixer à un niveau quasiment individuel.

Ainsi la pression exercée par la réunification et la concurrence de l’Est sont le fait générateur, le processus de négociation salarial est le moyen, et le résultat est une baisse progressive des coûts du travail en Allemagne.

Cette baisse des coûts salariaux peut s’observer grâce aux indices construits par les auteurs dans le graphique suivant :

 (Cliquer pour agrandir l'image)

Il est en effet très perceptible que la baisse des salaires allemands a débuté bien avant la mise en place des réformes Hartz. Le processus était déjà à l’œuvre. Le graphique permet surtout de mettre en évidence la stabilité des salaires en France, et la baisse des salaires allemands. Il s’agit alors bien plus d’une stratégie de captation de la croissance européenne par l’Allemagne, que d’une supposée inconséquence salariale française.

Une modération salariale allemande qui se traduit par une totale stabilité des salaires réels depuis 20 ans, alors même que le niveau de PIB réel par habitant progressait de façon importante. Ce qui traduit une importante croissance des inégalités.

 (Cliquer pour agrandir l'image)

Les auteurs poursuivent « Les réformes du marché du travail Hartz, mises en place sous le Chancelier Schröder, ne sont pas centrales dans le processus d’amélioration de la compétitivité de l’industrie Allemande. Ces réformes ont été appliquées presque une décennie après que le processus de décentralisation et de renforcement de la compétitivité ait commencé. De plus, alors que l’objectif des réformes était de créer une incitation à la recherche d’emploi, elles n’ont que peu apporté à la remarquable restriction salariale à l’œuvre depuis le milieu des années 90, qui est bien le facteur expliquant les gains de compétitivité. »

Pour conclure et sur un ton assez clair « L’expérience allemande ne permet pas de donner un quelconque support à des recommandations européennes basées sur des réformes du type Hartz ».

Mais le mythe continue. C’est ainsi que François Hollande recevait leur auteur à l’Elysée, Peter Hartz, au mois de décembre dernier et ce juste avant le supposé virage « social-démocrate » du Président.

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