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Les personnes à la tête des institutions européennes auront changé d'ici un an.
Les personnes à la tête des institutions européennes auront changé d'ici un an.
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En mai 2014, les élections européennes vont chambouler les postes clés des institutions européennes. Les enjeux de ce mercato institutionnel concernent tous les pays membres, et le poste de président de la Commission sera déterminant.

Jean-Luc  Sauron

Jean-Luc Sauron

Jean-Luc Sauron est professeur associé à l'Université Paris-Dauphine.

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Atlantico : D'ici un an les personnes à la tête des institutions européennes auront changé. Dans les faits, chacune d'entre elles nomme son président, et les tractations semblent avoir déjà commencé. Comment se passent-elles ?

Jean-Luc Sauron : Il y a un équilibre entre les postes de président de la Commission européenne, de président permanent du Conseil européen, de Haut représentant pour les affaires étrangères et, dans une moindre mesure, de Président de la BCE.

Il convient de  différencier entre, d’une part, les postes de Président de la Commission européenne et du Parlement européen, et, d’autre part, ceux de Président permanent  du Conseil européen et de Haut représentant pour les affaires étrangères.

Les postes de Président permanent du Conseil européen et de Haut représentant pour les affaires étrangères sont gérés quasi uniquement par les chefs d’État et de gouvernement au sein  du Conseil européen.

Alors que les postes de Président de la Commission européenne et celui du Parlement européen sont dépendants, pour partie, du résultat des élections européennes de mai prochain, et par suite, l'expression du choix démocratique des peuples européens peut jouer un rôle. Le "mercato intentionnel" n'est pas le même pour ces deux catégories de postes.

Le résultat des élections européennes influera sur le choix du Président de la Commission européenne. Selon la règle posée par le traité de Lisbonne, le Conseil européen devrait le choisir au sein du parti européen qui aura gagné les élections au Parlement européen. C'est d'ailleurs sur cette règle que le parti socialiste européen (PSE) et le parti populaire européen (PPE) ont conduit leur stratégie électorale pour mai prochain. Le PSE a désigné Martin Schulz et le PPE va désigner en mars son candidat comme Président de la Commission européenne, peut-être Michel Barnier. Les chefs d’État et de gouvernement au sein du Conseil européen ont contesté cette lecture, car ils souhaitent "garder la main" sur la désignation du Président de la Commission européenne. Mais en fonction du score électoral du PSE ou du PPE, il y aura un rapport de force politique qui obligera le Conseil européen à tenir compte, contre sa volonté peut-être, des résultats aux élections de mai 2014 pour déterminer qui sera le successeur de José Manuel Barroso.

Pour sa part, le président du Parlement européen est le fruit de la majorité des parlementaires européens élus en mai prochain, mais d’une majorité déterminée par un accord entre le PPE et le PSE.

La grande question de l'année prochaine, pour le Président du Parlement européen, sera de savoir de quelle manière va évoluer l'alliance politique en le PPE et le PSE  (les deux cumulés faisant 63 % des parlementaires). Pour les trois dernières législatures ils se sont partagés le mandat de la présidence en deux fois deux ans et demi. Durant ces cinq dernières années, se sont succédé  comme Président du Parlement européen, d'abord le polonais PPE Jerzy Buzek, puis le PSE allemand Martin Schulz . Mais actuellement les autres postes, à savoir le Président de la Commission européenne, le Président permanent du Conseil européen (qui a fait deux mandats de 2 années et demi) et le Haut représentant pour les affaires étrangères sont élus pour 5 ans. Il serait difficile alors que le Président du Parlement européen soit  le seul poste à changer de titulaire  à mi-parcours.

Dans ce contexte-là, l’avenir de l’accord politique entre le PPE et le PSE pour la présidence du Parlement européen est incertain.  Par suite, cette modification risque de compliquer  les relations entre PPE et PSE au sein du Parlement européen, et de brouiller  le "mercato intentionnel", ces deux partis n’étant plus sûrs de la maîtrise de ce poste important.

Est-ce facile de trouver des candidats aux postes à pourvoir ? Quelles sont les règles à respecter ?

Le Président de la Commission européenne et les membres de la Commission européenne doivent être d’une couleur politique proche de celle du Parlement européen, puisqu'il faut que ces postes soient approuvées  par le Parlement européen.

Ce sont des postes qui sont stratégiques sur la conduite de l’avenir du continent européen. Actuellement, ce sont des gens qui ont une expérience nationale de haut niveau. Grâce à celle-ci, ils ont déjà eu accès aux problématiques internationales auxquels ils sont confrontés à la tête de telle ou telle institution européenne. Il faut déjà avoir une certaine expérience internationale, pour avoir une certaine crédibilité y compris vis-à-vis des partenaires internationaux de l’Union européenne.

En quoi l'actuel contexte électoral dans les pays membres vient-il compliquer encore plus la tâche (montée des eurosceptiques, morcellement des partis) ?

Si le Parlement européen a une composition morcelée d’où ne pourrait être dégagée une majorité, c’est toute la mécanique institutionnelle européenne qui s’en trouverait bloquée. Aujourd'hui les textes sont adoptés au Parlement européen par une majorité qui comprend le PPE, le PSE, l’ADLE (les libéraux) et les Verts européens, soit près de 80 % des voix. Il paraît  improbable, que les eurosceptiques puissent  compliquer les votes au point de bloquer les décisions. L’assise majoritaire des textes adoptés sera réduite à 70 % au pire... Mais l’équilibre global entre européistes et eurosceptiques ne paraît pas devoir être bouleversé à ce point au sein du futur du Parlement européen.

Les discussions seront plus rudes, mais le système ne serait pas bloqué.

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