Travail dominical : pendant que la France y réfléchit... Amazon agit <!-- --> | Atlantico.fr
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Amazon lance avec "l'US Postal Service" un service de livraison de colis le dimanche à New York et Los Angeles.
Amazon lance avec "l'US Postal Service" un service de livraison de colis le dimanche à New York et Los Angeles.
©Reuters

Éditorial

Amazon va lancer avec la poste américaine un service de livraison de colis le dimanche, alors que le rapport sur le travail dominical de l’ancien patron de la Poste Jean-Paul Bailly s'apprête à sortir en France.

Pierre Guyot

Pierre Guyot

Pierre Guyot est journaliste, producteur et réalisateur de documentaires. Il est l’un des fondateurs et actionnaires d’Atlantico.

 

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Il est des coïncidences qui ont valeur de symbole. 

Alors qu’on attend d’un jour à l’autre le rapport de l’ancien patron de la Poste, Jean-Paul Bailly, que le gouvernement a chargé d’une mission sur le travail dominical, c’est précisément avec la poste, américaine celle-là, que le géant Amazon vient de conclure un accord pour pouvoir livrer ses produits… le dimanche ! Dans le livre d’enquête The Everything Store: Jeff Bezos and the Age of Amazon sorti le mois dernier (pas encore publié en français mais disponible en anglais chez Little, Brown and Company ou sur Amazon), le journaliste du Bloomberg Businessweek, Brad Stone, a décortiqué le fonctionnement de ce site de vente en ligne, "magasin de tout" selon lui : à la fois concurrent du géant de la grande distribution Wal-Mart en sachant vendre, d’Apple en inventant et fabriquant des appareils nouveaux et d’IBM en fournissant également des services à ses clients.

C’est pour appliquer ce dernier principe qu’Amazon lance donc avec "l’US Postal Service" un service de livraison de colis le dimanche. Le consommateur pourra recevoir un achat commandé le samedi dès le lendemain. Cette possibilité de livraison dominicale ne concerne pour l’instant que les mégalopoles de New York et de Los Angeles mais s’étendra dès l’année prochaine à Phœnix, Dallas, Houston ou la Nouvelle-Orléans.

Il n’est pas question ici de faire un panégyrique d’Amazon. Le bonheur des consommateurs ne fait pas automatiquement celui des salariés. A ce titre, l’exemple du site de vente en ligne est même éloquent. Les méthodes de management de l’entreprise américaine ou la façon dont elle peut massacrer ses concurrents sont régulièrement critiquées (c’est le cas dans le bouquin de Brad Stone cité ci-dessus, mais aussi dans En Amazonie : infiltré dans le meilleur des mondes de Jean-Baptiste Malet, même si dernier ouvrage est assez marqué idéologiquement). 

Mais la conjonction des évènements que sont l’annonce de ce nouveau service d’Amazon avec les interrogations françaises sur le droit du travail le dimanche ou sur les moyens de sauvegarder les réseaux traditionnels de distribution des livres - bien mal en point - interpelle et illustre combien notre façon de réfléchir et de légiférer les évolutions de la société est déconnectée de la réalité. 

Les législateurs français, incapables d’anticiper, condamnent toujours la loi à tenter de s’adapter au développement des technologies, au progrès des sciences, à l’évolution des comportements. Jamais à les accompagner et encore moins à les anticiper. Face à l’accélération provoquée par la révolution industrielle des nouvelles technologies de l’information, ce décalage prend même des proportions gigantesques. Le fiasco de la loi Hadopi et, sans tomber dans un "jeunisme coûte que coûte" par définition stupide, la nomination il y a quelques mois par François Hollande de Pierre Lescure, grand homme de télévision des années 70 et 80, pour lui remettre un rapport sur l’avenir des pratiques numériques, sont aussi des exemples de cette totale déconnexion. Le futur rapport de Jean-Paul Bailly sur le travail dominical, s’il est aussi timide et prudent (pour ne pas écrire timoré) que celui que l’ancien patron de la Poste a déjà rédigé sur le même sujet en 2007, risque fort d’en être une illustration supplémentaire.

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