Moi, président, Moi président, Moi président... un an après<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
France
"Un quinquennat se juge à son début et se sanctionne à sa fin", selon André Bercoff.
"Un quinquennat se juge à son début et se sanctionne à sa fin", selon André Bercoff.
©Reuters

Bla bla bla

Il y a un an, François Hollande marquait le débat de l'entre-deux tours de son volontarisme affiché, bien camouflé depuis. L'écrivain André Bercoff sort à cette occasion un livre brocardant cette attitude de désenchantement. Le point sur un an de renoncement permanent.

André Bercoff

André Bercoff est journaliste et écrivain. Il est notamment connu pour ses ouvrages publiés sous les pseudonymes Philippe de Commines et Caton.

Il est l'auteur de La chasse au Sarko (Rocher, 2011), Qui choisir (First editions, 2012), de Moi, Président (First editions, 2013) et dernièrement Bernard Tapie, Marine Le Pen, la France et moi : Chronique d'une implosion (First editions, 2014).

Voir la bio »

Atlantico : Vous ouvrez votre essai avec cette référence à Pierre Viansson-Ponté qui avait écrit dans Le Monde : "La France s’ennuie", en commentant "mots qui avaient pris toute leur signification deux mois plus tard, quand s’élevèrent les premières barricades de Mai 1968. Aujourd’hui, si l’on en croit sondeurs et médias, politiques et sociologues, la France ne s’ennuie plus : elle implose." Avec les manifestations contre le mariage pour tous, allons-nous vers un climat de révolte ? Votre analyse du climat social ?

André Bercoff : Henri Rochefort écrivait au début en 1868 : "La France compte 36 millions de sujets sans compter les sujets de mécontentement." Aujourd’hui, à plus de 60 millions de citoyens, le mécontentement s’est transformé en rage et frustration. Du chômage au mariage pour tous, de la fin de l’ascenseur social aux problèmes identitaires, tout s’additionne pour une situation dont on ne sait si elle débouchera sur une subite explosion ou sur une lente implosion. On sait que l’histoire de France est parsemée de réformes qui ne se font qu’à la suite de secousses plus ou moins violentes. Nous sommes en phase de répétition générale et il n’est pas sûr que l’affirmation de Marx, selon laquelle l’Histoire est d’abord tragédie pour ensuite se mimer en farce, soit encore fondée.

Le titre de votre deuxième chapitre est : "Un quinquennat se juge à son début et se sanctionne à sa fin." (dixit François Hollande). Alors le jugement est-il, selon vous, sans appel un an après sa prise du pouvoir ?

Si le pouvoir actuel continue cette chute vertigineuse dans les sondages, il pourra sans doute découvrir des gisements de pétrole ou de gaz de schiste, ce qui arrangerait notre économie. Trêve de plaisanterie, il y a dans la démarche de Hollande, à la fois l’entêtement de celui qui a montré une certaine résistance à la tête du PS et la faiblesse intrinsèque d’un chef qui ne sait pas maîtriser ses troupes, tellement obsédé par le consensus et la tactique qu’il oublie qu’aujourd’hui, on ne demeure dans l’ambiguïté qu’à son propre détriment. L’époque des manœuvres politiciennes et des stratégies d’appareil est révolue.

Quand vous rappelez à juste titre "Il a fallu la révolte des jeunes entrepreneurs du numérique – les déjà célèbres « pigeons » – pour que le gouvernement recule sur la taxation des plus-values de cession des entreprise.", pensez-vous qu’il y aura d’autres révoltes sorties du déni de réalité ? Mais surtout, comment expliquez-vous ce déni du gouvernement Hollande face à une crise économique et de société sans précédent ?

Qu’ont fait les hiérarques, énarques et autres apparatchiks du PS pendant les dix ans qu’ils ont passé dans l’opposition ? On se le demande. A voir leurs promesses de Gascon, leurs chiffres lancés en l’air comme des bilboquets de magiciens dont l’amateurisme le dispute au désordre, alors qu’ils avaient tout lieu et toute compétence pour regarder en face les réalités françaises, européennes et mondiales, on ne comprend pas. Il entre en effet quelque chose de mystérieux dans cette non-appréhension d’une crise grave, commencée il y a une décennie et dont chacun savait qu’on ne sortirait pas en faisant des promesses à tire-larigot et en traçant des échéances inatteignables. La bonne volonté social-démocrate ne suffit pas quand il faut calmer manu militari, les ardeurs de la gauche planificatrice et redistributrice. Tout cela sans que l’on touche suffisamment aux hallucinants gaspillages de la dépense publique et du laisser-faire privé.

Vous concluez l’un de vos chapitres sur "La gauche PS agonise, la droite UMP défaille, et François Hollande lui-même, qui le sait mais ne peut pas le dire, ne se sent pas très bien.", mais alors cela signifie que les partis sont morts et dépassés et qu’il faut revoir à la base la vie militante et politique. Est-ce une caractéristique des pays du sud de l’Europe ? 

L’exemple de Beppe Grillo en Italie et de la « Manif pour tous » en France montre à l’envi que les partis politiques sont dépassés par les événements sociétaux et par ceux qu’ils sont censés représenter. De toutes parts, le pouvoir central est en décomposition, rattrapé, voire dépassé par des contre-pouvoirs qui se multiplient et qui mordent de plus en plus les mollets et autres talons d’Achille du système. S’ils ne le mettent évidemment pas à terre, ils l’ébrèchent de spectaculaire façon. Nous sommes entrés dans l’ère de la post-politique. Le terrain est loin d’être tracé. Ce n’est pas seulement une caractéristique du sud de l’Europe : les pays émergents sont eux-mêmes atteints par cette crise du pouvoir. Il suffit de regarder notamment ce qui se passe en Chine.

Dans votre conclusion, vous écrivez : "Mais, monsieur le président, vous ne pouvez plus ignorer le doute existentiel qui ronge ce pays à qui l’on a tout fait pour ôter le sens du collectif, doute qui peut s’exprimer sous les formes les plus intéressantes comme les plus haïssables.", alors qu’aimeriez-vous qu’il dise ou fasse concrètement pour rassembler tous les Français ?

Qu’il paraphrase, qu’il précise et qu’il explique la fameuse invocation de John Fitzgerald Kennedy : "Ne vous demandez pas ce que la France peut faire pour vous ; demandez-vous ce que vous pouvez faire pour la France". Et surtout qu’il définisse enfin ce qu’est aujourd’hui la France. Un guichet de Sécu ? Une caisse de retraite ? Un musée ? Un club de vacances ? Un Relais & Châteaux gastronomique ? Ou des idées neuves, un projet collectif, un aréopage de valeurs, d’éthique, de morale ? Une exigence de cette "décence commune" dont parlait Orwell ? Les paris sont ouverts.

Moi, président

Les promesses électorales n'engagent que ceux qui les écoutent, André BERCOFF

First (mai 2013), 12 euros.

A suivre sur : https://twitter.com/andrebercoff

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !