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Politiques de lutte contre la crise : pourquoi les PME n'ont plus le temps d'attendre
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Invisibles

Les acteurs économiques de terrain (PME, professions libérales, indépendants, etc.) ont l'impression de ne pas être entendus, voire d'être oubliés par le gouvernement et les syndicats patronaux.

Hervé Lambel

Hervé Lambel

Hervé Lambel est candidat à la présidence du Medef et co-fondateur du CERF (Créateurs d'emplois et de richesse en France).

D’une lignée d’entrepreneurs, il est diplômé de l’EPSCI (Essec). Il entre en 2000 à la CGPME, puis fonde en 2003 le CERF, dont il devient Président et porte-parole en 2004. Il fait notamment partie des premiers lanceurs d'alerte sur la crise économique et les problèmes de trésorerie des entreprises. Il est également le créateur d’HLDC, société de service et d’investissement.

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La situation poursuit sa dégradation sur le terrain économique. Outre les chiffres historiques du chômage, une enquête menée par l'observatoire Trendeo montre que les entreprises de taille intermédiaire créaient début 2012 trois fois plus d'emplois qu'elles n'en supprimaient. Début 2013, elles n'en créent plus qu'1,2 fois plus. Les défaillances explosent dans les entreprises de plus de 100 salariés (+8%), laissant craindre un effet domino sur les fournisseurs et une poursuite de la hausse du chômage.

S’ajoutant aux problèmes de trésorerie et de marges, dans une autre mesure qu’en 2008, les entreprises doivent faire face à une réduction de leur carnet de commande, les privant de toute visibilité. Cette inquiétude conduit malheureusement à oublier les perspectives de croissance et à envisager une récession. Le financement reste la préoccupation majeure.

Nous sommes confrontés à une situation et un climat anxiogènes dont d’aucuns ne mesurent ni la gravité ni les conséquences sur les années à venir tout en persévérant dans des priorités qui n’en sont pas : sur les 20 milliards d'euros à trouver l'an prochain pour respecter les engagements français sur le déficit, 70 % (16 milliards) viendraient des entreprises.

Je crois que nous avons au contraire besoin de propositions concrètes et opérationnelles, simples et efficaces immédiatement, pour libérer les entreprises.

La véritable urgence est d’agir sur les marges mais surtout la trésorerie, l’oxygène des entreprises, et paradoxalement la ressource la moins bien financée. Le Crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) baisse le coût du travail et agit sur les marges, mais continue de peser sur la trésorerie. Les aménagements dont le dispositif a fait l’objet sont positifs mais insuffisants. Il faudrait bénéficier du CICE en amont et non a posteriori. La méconnaissance des entreprises et des mécanismes de leur gestion conduit le gouvernement à élaborer une telle mesure et de s’en satisfaire. Oui, cela aura un impact sur les marges, à terme. Mais nous n’avons pas le temps d’attendre ce terme… à moins d’accepter de continuer de détruire des entreprises et des emplois.

L’enjeu pour la majorité des entreprises, comme pour les ménages, c’est de garantir les échéances, à savoir disposer de la trésorerie nécessaire pour faire vivre l’entreprise au quotidien et faire face à ses créanciers chaque mois. Les entreprises courent ainsi après « le cash » pour ces raisons, la trésorerie est leur angoissante obsession, parce qu’elle leur est vitale.

C’est pourquoi je propose plusieurs mesures qui touchent au financement des entreprises.

En premier lieu, il s’agit grâce à une simplification de la collecte de la TVA, de rendre 20 milliards d’euros de trésorerie aux entreprises, soit l’équivalent du premier plan de soutien au crédit mis en place en octobre 2008 par le précédent gouvernement et près de 10 fois plus que ce que prévoit de faire la BPI cette année. Cette mesure a l’avantage de ne pas augmenter les dépenses de l’Etat. Au contraire, elle permet même de substantielles économies pour Bercy, tout en  permettant de réduire la fraude.

De même, le gouvernement doit promouvoir les dispositions existantes que beaucoup de chefs d’entreprises ignorent : la possibilité, par exemple, de demander le report du versement des charges sociales auprès des organismes sociaux quand ils rencontrent des problèmes de trésorerie.

L’impact du coût du travail sur la structure financière des entreprises en France n’a pas encore été pleinement mesuré. Car il dépasse la simple notion de compétitivité : de nombreuses entreprises qui ne sont pas soumises à la concurrence internationale sont ainsi fragilisées. Mais qui le dit ? Le gouvernement doit avoir le courage de s’engager dès maintenant dans une étape supplémentaire de la compétitivité adossé à une baisse substantielle des charges qui pèsent dramatiquement sur l'emploi. La baisse du coût du travail passera par une plus grande fiscalisation des recettes de la sécurité sociale.

Nos dirigeants entretiennent depuis des années une défiance vis-à-vis des entreprises, des patrons et du travail. Rien de moins étonnant quand on voit l’emballement autour de la question de la rémunération des patrons. Je trouve cela scandaleux et je renvoie à la seule réalité, celle que les patrons gagnent en moyenne moins de 2 000 € par mois avec un revenu médian inférieur à celui des salariés. Considérons également que 13% ne prennent aucune rémunération. Chaque fois qu’on laisse s’installer le débat sur les très hauts revenus, on occulte les vrais problèmes, avec pour seul effet de diviser les Français. On dégrade l’image de l’entreprise et de l’entrepreneuriat sans apporter de solution à leurs problèmes : on nourrit le populisme.

Or il nous faudra penser la fiscalité en termes de soutien à la croissance et non en termes purement redistributifs.

Il est, par exemple, possible de réformer l’ISF en profondeur, pour en retirer les effets négatifs et en faire un levier du financement des entreprises, notamment en levant tous les plafonds relatifs à l’ISF PME. Mais d’autres dispositions peuvent et doivent être prises sur le plan fiscal.

Pour y parvenir, l’exécutif et le législateur devront écouter des organisations par lesquelles les chefs d’entreprises se sentiront pleinement représentés. Je parle des ETI, PME, TPE et de tous les indépendants que je rencontre régulièrement depuis douze ans sur le terrain et qui doutent à plus de 72% de leur représentation. Ma candidature à la présidence du Medef vise à changer leur regard sur notre organisation, afin de les mobiliser pour soutenir notre action dans une période difficile. Ce changement et cette mobilisation devront se mesurer en 2015 lors des prochaines élections aux Chambres de commerce et d’industrie, afin de poursuivre les réformes profondes qui doivent être engagées. Mon expérience, acquise depuis 10 ans au Cerf, sera un levier essentiel pour le Medef au service des entreprises.

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