La schizophrénie de l'État actionnaire<!-- --> | Atlantico.fr
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Chantier en Tôlerie pour optimiser les surfaces chez Renault.
Chantier en Tôlerie pour optimiser les surfaces chez Renault.
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Renault

En pleine semaine de l'industrie et alors que le gouvernement français se veut le défenseur de l'industrie française, les deux principaux constructeurs automobiles nationaux optent pour des stratégies diamétralement opposées. Renault, partiellement public, délocalise pendant que l'entreprise privée PSA se fait le champion du patriotisme économique. Que fait l'État quand le chômage est au plus haut et que l'emploi demeure la principale préoccupation des Français ?

Philippe David

Philippe David

Philippe David est cadre dirigeant, travaillant à l'international.

Il a écrit trois livres politiques : "Il va falloir tout reconstruire", ouvrage qui expliquait le pourquoi du 21 avril,  "Journal intime d'une année de rupture", sorti en 2009 aux éditions de l'Ixcéa, qui retrace les deux premières années de présidence Sarkozy et  "De la rupture aux impostures", Editions du Banc d'Arguin (9 avril 2012). 

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La nouvelle est tombée vendredi, à priori accidentellement, Renault n’ayant manifestement pas envie que la presse en parle, mais les deux nouveaux moteurs Renault seront fabriqués à Pitesti en Roumanie et à Valladolid en Espagne.

Hasard du calendrier, on apprenait le même jour que les deux nouveaux moteurs de PSA seraient fabriqués à Tremery en Moselle et à Douvrin dans le Pas de Calais, Douvrin qui va perdre de 200 à 400 emplois du fait de la perte de production des moteurs Renault.

Douvrin, usine connue sous le nom de « Française de Mécanique » qui produisit pendant des années le seul V6 Français, le fameux PRV, est détenue à 50-50 par les deux constructeurs français d’automobiles mais assure désormais 70% de sa production pour PSA.

Peugeot le patriote vs. Renault le mondialiste

Aujourd’hui Renault fabrique 29% des ses moteurs en France contre… 85% pour PSA.

Pour ce qui est des véhicules, on est également en droit de se demander si Renault est encore un constructeur français. Les Twingo et Wind ? Fabriquées en Slovénie. Clio ? Fabriquée en partie à Flins (environ le tiers de la production, la majorité étant faite en Turquie et une partie en Espagne) aujourd’hui mais la Clio IV, dont la sortie est prévue en 2012, sera elle fabriquée en Turquie même si, suite à l’intervention de Nicolas Sarkozy, Patrick Pelata s’est engagé à continuer à produire des Clio à Flins (les miettes, on peut facilement l’imaginer). Modus et Mégane ? En Espagne. La Fluence ? En Turquie. Les Koleos et Latitude ? En Corée du Sud.  Seules, parmi les véhicules particuliers, sont produites en France les Kangoo, Scénic, Laguna et Espace c'est-à-dire les modèles qui ne se vendent peu ou pas (à l’exception du Scénic).

Résultat  : quand en 2010 PSA a réalisé 37% de sa production mondiale en France, Renault n’a réalisé que 19.8% de sa production dans l’hexagone c'est-à-dire environ la moitié (source CCFA).

L'État schizophrène 

Rappelons simplement que Renault a pour principal actionnaire l’Etat français, qui détient 15% du capital, tandis que PSA est une entreprise privée à 100%...

Dès lors plusieurs questions se posent : A quoi sert l’Etat actionnaire ? A créer de l’emploi en France ? A avoir une politique industrielle destinée à assurer un avenir à l’industrie française ? Comment expliquer qu’un acteur privé français produise en France le double de ce que produit un acteur partiellement public ? Comment expliquer la totale inaction de l’Etat pour « renverser la vapeur » chez Renault (vue la gestion de la pseudo affaire d’espionnage par les dirigeants de cette entreprise, il est pour le moins surprenant qu’aucune tête ne soit tombée en haut de la hiérarchie) ? Comment expliquer à des investisseurs étrangers que la France est un bon endroit pour investir alors qu’une entreprise partiellement publique y investit moins qu’un opérateur purement privé ?

Inutile de dire qu’une fois de plus nos gouvernants font preuve d’une schizophrénie totale quand ils disent la main sur le cœur qu’ils ont toujours lutté, luttent et lutteront toujours pour défendre l’industrie française. 

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