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Et si les délocalisations permettaient aussi de créer des emplois ?
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Idée reçue

Si les délocalisations détruisent de nombreux emplois, Renaud Chartoire explique comment elles contribuent aussi à en créer. Extraits de "En finir avec 20 idées reçues sur l'économie française." (1/2).

Renaud  Chartoire

Renaud Chartoire

Renaud Chartoire est agrégé de sciences économiques et sociales et enseigne l'économie en classes préparatoires aux grandes écoles.

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Lorsqu'une entreprise se délocalise, elle ne délocalise le plus souvent qu'une partie de sa production. Quand en particulier l'objectif de la délocalisation est de profiter de coûts de production plus faibles, il est clair que ce sont les stades du processus de production qui demandent le moins de technologie et de qualifications de la part des salariés qui vont être concernés par ce processus. Si les centres d'appel ou la production de textile bas de gamme peuvent généralement sans trop de problèmes être localisés dans des pays du Maghreb, les centres de recherche, les services de comptabilité, de gestion, de marketing, les étapes les plus techniques de mise en production ne peuvent quant à eux être implantés dans de tels pays. Par conséquent, la délocalisation d'une partie de la production va induire en France la création d'emplois de logistique et de gestion pour faire le lien avec les unités délocalisées, ainsi qu'un accroissement d'emplois d'accompagnement au niveau des services bancaires, des services de consultants, d'avocats d'affaires internationaux, de traducteurs, etc. Évidemment, si ces créations sont réelles, elles ne sauraient en rien compenser quantitativement les destructions précédemment présentées.

Il existe donc aussi d'autres sources de créations d'emplois, plus indirectes celles-ci. Par exemple, lorsque l'entreprise française a gardé comme fournisseurs d'autres entreprises françaises avec lesquelles elle travaillait auparavant, si cette délocalisation lui a permis de gagner en compétitivité et donc d'augmenter ses parts de marché au détriment de concurrents étrangers, alors elle va accroître ses commandes à ses fournisseurs et donc y régénérer des besoins de main d'oeuvre. Il y a alors un effet de stimulation des exportations françaises vers la filiale du pays d'accueil. De plus, une entreprise française peut aussi localiser une partie de sa production dans un autre pays non pas pour y rechercher des coûts plus faibles, mais pour y conquérir de nouveaux marchés. Et à l'heure du « patriotisme économique », on peut comprendre qu'une telle stratégie puisse devenir essentielle pour garder ou gagner des parts de marché à l'étranger. Quel rapport avec l'emploi national ? A priori aucun ; si les consommateurs étrangers se mettent à acheter des produits français faits à l'étranger, tant mieux pour l'emploi dans les pays concernés, mais au niveau français, on cherche vainement le gain. Pas inutilement en fait ; si l'entreprise française génère des profits grâce à cette production réalisée hors de ses frontières, elle pourra éventuellement les utiliser pour développer ses activités dans son pays d'origine.

Mais ce n'est pas tout. Lorsque Toyota par exemple s'implante à Valenciennes, il se donne une image de « producteur national » quand bien même chacun sait pertinemment qu'elle reste une entreprise japonaise. Et lorsque j'achète une voiture Toyota, comment savoir si elle a été produite en France ou au Japon ? Et si elle a été produite en France ou au Japon ? Et si celle a été produite en France, quelle part l'a réellement été ? En fait, à partir du moment où une entreprise est parvenue à se donner cette image, elle peut espérer augmenter ses ventes dans le pays étranger, et ce même pour les produits qu'elle continue à produire dans son pays d'origine ! Ainsi, elle peut, en délocalisant une partie de sa production, donner des débouchés aux parties de son activité productive qu'elle continue à réaliser dans son pays d'origine. Et qui dit hausse de l'activité, dit hausse des emplois.

Les délocalisations seraient à l'origine d'une évolutions structurelle de l'emploi vers plus de qualification, car les emplois délocalisés seraient prioritairement des emplois à faibles compétences et ceux créés, à fortes qualifications. Il y a alors un effet indirect de glissement d'emplois peu qualifiés vers des emplois plus qualifiés.

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Extrait de "En finir avec 20 idées reçues sur l'économie française", Ixelles éditions (26 septembre 2012)

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