Copé Fillon : l'UMP face au duel de tous les dangers<!-- --> | Atlantico.fr
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L'absence d'un ou (d'une) troisième candidat(e), provoque un choc frontal entre personnalités, dont les entourages sont déjà chauffés à bloc et distillent les petites phrases assassines.
L'absence d'un ou (d'une) troisième candidat(e), provoque un choc frontal entre personnalités, dont les entourages sont déjà chauffés à bloc et distillent les petites phrases assassines.
©Reuters

Choc frontal

Sans surprise, la bataille pour la présidence de l'UMP va se résumer à un duel Copé/Fillon, les autres candidats s'étant heurtés à l'obstacle des parrainages. Le parti aura donc droit au scénario tant redouté du "combat fratricide", qui n'est pas sans rappeler la guerre Chirac/Pasqua-Séguin qui avait conduit à l'éclatement du RPR.

Anita Hausser

Anita Hausser

Anita Hausser, journaliste, est éditorialiste à Atlantico, et offre à ses lecteurs un décryptage des coulisses de la politique française et internationale. Elle a notamment publié Sarkozy, itinéraire d'une ambition (Editions l'Archipel, 2003). Elle a également réalisé les documentaires Femme députée, un homme comme les autres ? (2014) et Bruno Le Maire, l'Affranchi (2015). 

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Contrairement à ce qui se passe quand on a bu un verre de trop, c’est parce qu’il n’y a que deux candidats en lice pour briguer la présidence de l’UMP que l’on redoute les dégâts. L’absence d’un ou (d’une) troisième candidat(e), provoque un choc frontal entre personnalités, dont les entourages sont déjà chauffés à bloc et distillent les petites phrases assassines. La fin de la course aux parrainages avait encore un côté "concours de potaches" avec deux protagonistes produisant leurs milliers de parrainages. François Fillon a créé la surprise en coiffant Jean-François Copé au poteau, avec 45 000 signatures revendiquées, alors que le secrétaire général du mouvement croyait supplanter son rival avec plus de signatures. L’entourage de Copé crie "au bluff ". Chez Fillon on savoure : après avoir fait croire que "c’était difficile" de faire le plein, faute d’accès au fichier des adhérents, le nouveau député de Paris a vu les adhésions à sa candidature "s’emballer" au cours des derniers jours, explique, jubilatoire, Valérie Pécresse, qui postule aux fonctions de secrétaire générale auprès de l’ancien Premier ministre. Cette supériorité numérique revendiquée créera-t-elle une dynamique irréversible au sein de l’UMP en faveur de François Fillon, déjà favori des sondages ? Telle est la question.

En tous cas le duel qui va opposer les deux hommes pendant deux longs mois (l’élection du président de l’UMP a lieu le 18 novembre), ne va pas se dérouler à fleurets mouchetés. Et ce n’est une hypothétique Commission des sages chargée de veiller au bon déroulement de la campagne interne et du scrutin qui va pacifier les esprits. Cette bataille rappellera aux plus anciens le conflit entre Charles Pasqua et Jacques Chirac qui a scandé la vie de l’ex-RPR pendant des années (avec un embrasement comparable à celui d’aujourd’hui au moment du Congrès en 1990), et qui s’est alors soldé par la sécession de l’ancien ministre de l’Intérieur, parti fonder son Rassemblement pour la France.

Les temps ont changé, les sujets de dispute aussi, mais les ambitions sont les mêmes : tenir l’appareil dans la perspective d’une candidature à l’élection présidentielle, et bien sûr, gagner cette élection. Jean-François Copé et François Fillon ont beau jouer à "plus sarkozyste que moi tu meurs", le retour de l’ex-président sur la scène politique ne les ferait pas tomber à la renverse de bonheur : ils ne se disputent pas la direction de l’appareil du parti par vocation d’apparatchik, mais pour se positionner en "chef de l’opposition" en vue de la primaire pour 2017.

Entre eux l’inimité est ancienne : le premier se revendique "bébé Chirac", tandis que le second se place dans la filiation de Philippe Séguin. Leur premier affrontement remonte à 2002, lorsqu’ils travaillaient tous les deux sur le projet électoral de Jacques Chirac en vue de sa réélection à l’Elysée. Fillon et Copé en revendiquent chacun la paternité ! On ne saura jamais qui a raison. Plus tard, Copé s’est rapproché de Jean-Pierre Raffarin et de Dominique de Villepin. Entre Raffarin et Fillon les choses se sont vite gâtées pendant le débat sur la réforme des régimes spéciaux de retraites, le premier reprochant au second (alors ministre du Travail et des Affaires sociales), d’avoir négocié et lâché du lest dans son dos. Ajoutez à cela l’épisode de la canicule de 2003, qui a coûté son ministère à Jean-François Mattéi, tandis que François Fillon, ministre des Affaires sociales, n’a pas le moins du monde été inquiété par cette épreuve, grâce à une discrétion exemplaire. Ce sont des épisodes qui ne s’oublient pas et Jean-Pierre Raffarin a de la mémoire. C’est sans doute l’une des raisons pour lesquelles l’ancien Premier ministre de Jacques Chirac soutient aussi activement l’actuel secrétaire général de l’UMP.

Mais il n’y a pas que cela : le 18 novembre prochain les militants UMP ne sont pas seulement appelés à élire un nouveau chef : ils vont aussi devoir se prononcer en faveur de différentes motions qui consacrent l’instauration de courants au sein de l’UMP. Il fallait le parrainage de dix parlementaires issus de 10 départements différents pour qu’une motion soit agréée par la commission électorale. Il y en aura sept au total, dont les signataires sont "mixtes", les uns soutenant Jean-François Copé, les autres François Fillon.

Comment ces "mouvements" vont-ils exister dans la future organisation, selon que le vainqueur s’appellera Fillon ou Copé ? Sous la présidence Sarkozy, les libéraux et les centristes de l’UMP ne cachaient pas leur frustration de se voir bridés, priés de taire leurs différences. Dans l’opposition, ils se montreront moins dociles. De toute évidence, l’ancien Premier ministre a une conception plus bonapartiste, plus centralisatrice que son rival, qui tient cependant à ses prérogatives et a jusqu’à présent solidement verrouillé l’appareil du parti. Et nul ne sait précisément quel sera le poids de ces différentes motions dans les instances du mouvement. Les membres du Conseil national et du Bureau politique seront-ils désignés à la proportionnelle ? Disposeront-ils de moyens matériels et financiers à l’UMP ? Mystère, car cette course à la direction de l’UMP est une véritable course d’obstacles à laquelle vient chaque jour s’ajouter une haie supplémentaire.

Le tempérament du futur président comptera beaucoup dans cette organisation. Par tempérament, l’ancien Premier ministre a une conception plus bonapartiste, plus centralisatrice que son rival. Mais les tenants des futurs courants, qui tireront une forme de légitimité des suffrages obtenus, ne s’en laisseront plus compter comme auparavant. Les germes d’un éclatement figurent bel et bien dans ce scrutin, ce qui signerait la fin du "grand parti de droite". Jean-Louis Borloo, qui rêve de refonder le centre et veut tendre la main aux déçus de l’UMP, n’attend que cela.

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