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Quand la santé s'ouvre à la compétition internationale : les hôpitaux britanniques partent à la conquête de nouveaux "marchés" pour renflouer leurs caisses
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Business is business

Le gouvernement britannique souhaite que son service de santé publique, entièrement gratuit, développe des filiales payantes dans les pays en développement.

Exporter son service de santé pour lui assurer davantage de ressources. L’idée proviendrait du gouvernement britannique lui-même. Le service national de santé public au Royaume-Uni (National Health Service, dit NHS) pourrait bientôt exporter des filiales et/ou transférer des compétences dans des pays du Golfe persique ou encore en Chine, au Brésil, en Libye, ou en Inde.

A la différence des services fournis Outre-Manche, dont l’accès est entièrement gratuit, ses filiales seraient pour leurs parts payantes. Le quotidien britannique The Independent a révélé la semaine dernière l’intention du gouvernement de coalition de David Cameron de créer une nouvelle organisation chargée de lancer des filiales payantes du NHS à l’étranger. Un organisme intergouvernemental, sous l’appellation Healthcare UK, devrait voir le jour d’ici l’automne et jouera un rôle d’intermédiaire entre les hôpitaux britanniques et les gouvernements étrangers. Seuls les gros hôpitaux de renommée internationale seront concernés. L'idée est simple : si à l'avenir, les riches habitants des pays en développement préfèrent se faire soigner dans leur pays plutôt que se déplacer, alors ce sont les hôpitaux qui se déplaceront.

Le directeur général de l’hôpital du King’s College à Londres, Tim Smart, estime que l’idée pourrait rapporter de précieuses ressources à ce service public au moment les budgets sont de plus en plus restreints. En raison de la politique de rigueur du pays, le NHS devra en effet faire des économies d'une hauteur de 20 milliards de livres sterling (soit plus de 25 milliards d’euros) d'ici 2015. "Le NHS dispose d’une réputation d’envergure internationale et ce projet permettra de l’utiliser au profit des patients et des contribuables", a déclaré la ministre de Santé, Anne Milton (BBC). Parce que si l’argent récolté par les futures filiales étrangères sera reversé au NHS, les investissements seront tirés des activités relevant du secteur privé des hôpitaux concernés. Ainsi, les investissements ne proviendront en aucun cas de l’argent public.

L’idée peut paraître séduisante, mais est loin de faire l'unanimité chez nos voisins d'Outre-Manche. De nombreuses associations de patients craignent que les hôpitaux ne se dispersent dans ces activités à l’étranger au détriment de leurs patients en Grande-Bretagne.  "Alors que le système de santé subit de profonds bouleversements, que les délais d'attente pour un rendez-vous ne cessent de s'allonger et que les hôpitaux se voient demander de faire 20 milliards de livres d'économies, on va encore se disperser dangereusement avec ce projet. La priorité pour l'Etat, l'hôpital public et les médecins, ce sont les patients du NHS", a déclaré Katherine Murphy, directrice d’une de ces associations citée par Courrier International. Par ailleurs, certains experts estiment que le jeu n’en vaut pas la chandelle. Les profits réalisés grâce à ces activités ne représenteraient qu’une goutte d’eau dans la mer comparée au coût de fonctionnement du NHS estimé à 100 milliards de livres par an. Et surtout,  cette idée ne bénéficierait qu’aux hôpitaux les plus riches, puisque chaque hopital est une entité financière indépendante. "Les gros hôpitaux universitaire deviendraient en effet plus riches, mais les hôpitaux de quartiers ne sont pas concernés par cette mesure",estime Max Pemberton, un médecin du NHSdans une tribune au Daily Express

L'autre problème du projet soulevé par ce médecin est d'ordre éthique. "Après avoir privé les pays en développement de leurs médecins et de leurs infirmières, nous allons désormais leur revendre nos services", s’indigne-t-il. Selon lui, si le gouvernement voulait réellement exporter le concept NHS, il pousserait les dirigeants des pays en développement à établir leur propre système de santé sur le même principe : l’égalité d’accès aux soins.

Cette idée n’est pas sans rappeler celle des hôpitaux parisiens de développer des soins facturés à un prix plus élevé que le tarif de la Sécurité sociale pour des riches patients étrangers afin d’accroître ses recettes.

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