Le Mali se dote d'un gouvernement national : saura-t-il ravir le nord du pays aux islamistes ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
International
Conformément aux vœux de la Cédéao, le président de transition du Mali Dioncounda Traoré a présenté son gouvernement d’union nationale mercredi.
Conformément aux vœux de la Cédéao, le président de transition du Mali Dioncounda Traoré a présenté son gouvernement d’union nationale mercredi.
©Reuters

Dernière chance ?

Le président malien de transition, Dioncounda Traoré, a signé un décret pour la formation d'un gouvernement d'union nationale mercredi. Il répond ainsi à la pression de la Cédéao (Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest) qui souhaite une reconquête rapide du nord du pays, aux mains des islamistes.

Antonin Tisseron

Antonin Tisseron

Antonin Tisseron est chercheur associé à l’Institut Thomas More. Il est Consultant auprès de l’Office des Nations Unies  contre la Drogue et le Crime (ONUDC)  bureau pour l’Afrique de l’Ouest et centrale (ROSEN).

Il est spécialisé dans l'étude des doctrines militaires, des questions de sécurité en Afrique et des enjeux de défense européenne. Il travaille principalement sur le Maghreb et le Sahel.

 

Voir la bio »

Atlantico : Le Mali s'est doté ce mardi d'un gouvernement d'union nationale. Alors que le nord du pays est toujours aux mains des islamistes, le gouvernement de transition peut-il réellement rétablir l'ordre ?

Antonin Tisseron : La nomination de ce gouvernement constitue un évident pas en avant vers une progressive sortie de crise du Mali et peut permettre d’éviter la mise en place de sanctions à l’encontre du pays. Le 7 juillet, les chefs d'État de la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (Cédéao), avaient en effet fixé à Bamako un ultimatum jusqu'au 31 juillet pour la formation d'un gouvernement d'union nationale, et menacé de ne plus reconnaître et d’exclure le Mali de la communauté. Cet ultimatum avait ensuite été prorogé. Cependant, si presque tous les regroupements politiques maliens sont présents dans le nouveau gouvernement, des tensions demeurent et les équilibres restent fragiles.

Le Premier ministre Cheick Modibo Diarra, entré en fonction le 24 avril, est ainsi contesté par une partie de la classe politique, en particulier au sein du parti du président, qui avait exigé sa démission avant de le reconduire. Les anciens putschistes également peuvent être tentés de continuer de peser sur la scène politique malienne. En cela, les États africains et la communauté internationale doivent rester vigilants tout en encourageant les processus en cours.

Peut-on s'attendre à une intervention militaire de la part du gouvernement provisoire ?

Cela est difficile à dire. D’un côté, une intervention militaire dans le nord est souhaitée par la plupart des acteurs politiques maliens et les partenaires du Mali, qu’il s’agisse du gouvernement provisoire, des putschistes du 22 mars, de la Cédéao ou des Européens, inquiets de voir le nord du pays entre les mains de groupes armés extrémistes. De l’autre, le gouvernement malien a jusque là privilégié ses propres priorités, à commencer par la sortie de la crise politique à Bamako et la volonté de garder la main sur toute opération militaire, quand bien même serait-elle internationale.

Le Premier ministre, comme cela lui a été reproché, semble également très prudent sur une offensive. Il a ainsi annoncé le 27 juillet, sur les écrans de télévision, que l’occupation avait commencé depuis une décennie et que la reconquête serait longue. En tout cas, alors que les capacités opérationnelles des forces armées maliennes étaient très faibles au début de l’année, une intervention mal préparée – militairement mais aussi et surtout politiquement – serait catastrophique pour le pays.


Le 13 Aout dernier, Bamako a été le théâtre d'un grand meeting pour la paix. Concrètement, peut-on s'attendre à une sortie rapide de crise ou le Mali est déjà condamné à un enlisement du conflit ?

S’il pouvait y avoir une sortie de crise rapide au Mali, elle aurait très probablement déjà eu lieu. Concernant le grand meeting du 13 août, il ne me semble pas constituer une rupture majeure mais plutôt un révélateur. Alors que des Maliens sont descendus à plusieurs reprises dans les rues depuis le début de l’année pour manifester et demander des changements politiques, la mobilisation pour résoudre les maux du pays se poursuit, voire s’est accrue.

Ensuite, le meeting de Bamako s’est tenu à l'appel du Haut Conseil islamique du Mali (HCIM) dont le président, Mahmoud Dicko, possède une influence grandissante au Mali et a rencontré des membres des groupes armés islamistes dans le nord.

Les autorités traditionnelles religieuses veulent donc, et c’est une deuxième leçon, peser dans les processus en cours et contribuer à la résolution de crises dont les causes sont considérées comme antérieures à la rébellion du MNLA et dans lesquelles le Mali s’est déjà enlisé.

Propos recueillis par Charles Rassaert

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !