Étudiante et fauchée : comment la prostitution est devenue un moyen de financer ses études<!-- --> | Atlantico.fr
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Internet, dans ce domaine comme dans les autres, donne une dimension virtuelle à cette prostitution.
Internet, dans ce domaine comme dans les autres, donne une dimension virtuelle à cette prostitution.
©Reuters

Petit boulot

Vendre son corps, un moyen rapide et efficace pour payer ses frais de scolarité quand on est une étudiante sans le sous. Bernard Rouverand explique comment ce "bon plan" peut virer au cauchemar. Extraits de "De la prostitution comme sport collectif" (2/2).

Bernard Rouverand

Bernard Rouverand

Bernard Rouverand a été régulièrement en contact avec une dizaine d'associations œuvrant dans le domaine de la prostitution. Il a tenu de nombreuses conférences d'information et de sensibilisation, travaillé sur le terrain et participé à des actions de lobbying auprès des organismes concernés.

Il est l'auteur de "De la prostitution comme sport collectif" aux éditions Max Milo.

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Un ami m’a décrit comment, il y a quelques mois, il a découvert les avantages des prostituées étudiantes. Il avait été abordé par une jeune étudiante qui s’était assise à côté de lui dans son café habituel. Il avait compris beaucoup plus vite que pour le supermarché. L’offre était claire. Un peu étonné, il avait bavardé avec elle. Elle lui avait décrit ses difficultés pour payer ses études, la chambre, les repas. Elle n’osait pas demander davantage à ses parents. Un soir, elle s’était fait inviter en boîte par un type qu’elle avait déjà vu une ou deux fois. Il lui plaisait, ils avaient passé la nuit ensemble. Le matin au réveil, le type était parti, mais il avait laissé 100 euros à côté de son sac à main. Elle en avait été profondément choquée, mortifiée. Puis cela l’avait fait réfléchir, et depuis, strictement en fonction de ses besoins, elle jetait son dévolu sur des hommes qui lui plaisaient et se faisait payer pour passer un moment avec eux. Comme elle était jeune et mignonne, c’était facile et elle demandait un bon tarif.

Pour lui, ce n’est qu’un complément rajeuni à son tableau de chasse habituel. Il n’y voit aucune malice. Cette pauvre fille rencontre des difficultés pour payer sa scolarité, mais elle veut réussir, voilà qui est tout à son honneur. Elle sait qu’un bon diplôme l’aidera à tracer sa route. Elle a déjà vécu quelques aventures et s’interroge :

« Au fond, pourquoi ne pas me payer de temps en temps un mec qui a du fric. Je le choisis, c’est moi qui mène le jeu, je me fais payer un bon week-end avec en prime un peu de liquide pour boucler mon budget. Voilà qui est beau et bon. » Elle furète, observe, et soudain me met le grappin dessus parce que je suis le meilleur et je ne parais pas fauché. Tout bénéfice. Une fille jeune, éduquée, délurée, encore fraîche et douchée, avec une réelle motivation, et qui a envie de s’envoyer en l’air tout en s’appliquant pour gagner un maximum. Il résume :

– Le bon plan. Le volontariat, il n’y a que ça de vrai. Je dirais même que je préfère ce genre d’étudiante payante à ces bénévoles du sexe qui couchent à droite et à gauche pour rien, comme on siffle un demi au café. Je paie et ça fait partie du plaisir. Et ces filles, ou garçons pour certains, sont volontaires, il en existe partout, contrairement à ce que de prudes frustrés s’emploient à nous faire croire. Ces étudiantes, quoi de plus compréhensible que disposer d’une chambre pour coucher, puis coucher pour disposer d’une chambre ? Elle veut un lit, elle l’a, même envie que moi qui adore les lits garnis. Conjonction bienvenue. Et si ce n’est pas la chambre qui fait difficulté, si c’est bêtement s’offrir un petit cadeau, des bottines ou le dernier Blackberry, ou un iPad… Je les approuve ces filles, elles en ont marre de coucher avec des copains désargentés qui ne savent pas forcément les faire jouir, alors que moi, client musclé, non seulement je sais m’occuper d’elles mais je les apprécie à leur juste prix, je leur prouve qu’elles valent quelque chose. Je serai peut-être le premier à le leur dire. J’ai la suprême délicatesse de ne pas leur poser de questions indiscrètes, je respecte leur libre arbitre avec le même soin que j’inspecte leur corps.

[...]

Il me choque. Je n’imaginais pas que la prostitution puisse être aussi cela. Je pense à des amis plus âgés, j’imagine leurs filles étudiantes, leurs garçons aussi, parce qu’ils sont autant touchés. Ou plutôt j’ai du mal à imaginer, parce que mes amis ne sont pas dans le besoin. Et pourtant si, j’imaginais que certains de ces enfants étudiants puissent se vendre uniquement pour manifester leur hostilité vis-à-vis de leurs parents, de leurs conventions, un peu comme on faisait une fugue dans le temps. Et puis maintenant c’est si facile, discret. Internet, dans ce domaine comme dans les autres, donne une dimension virtuelle à cette prostitution. Pour eux, ce qu’ils font n’est vraisemblablement pas de la prostitution. Par contre, celles et ceux qui se vendent parce qu’il s’agit de leur survie, ce n’est pas du tout le même jeu. Les contraintes sont là pour les entraîner, et certainement courront-ils davantage de risques fatals.

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Extrait de "De la prostitution comme sport collectif" aux éditions Max Milo

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