Puritanisme : Facebook suspend la page Atlantico à cause d’une photo de "L’Origine du Monde" jugée pornographique<!-- --> | Atlantico.fr
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En février 2011, Frode Steincke, un Danois qui avait "osé" diffuser ce visuel sur son profil, avait tout simplement vu son compte suspendu.
En février 2011, Frode Steincke, un Danois qui avait "osé" diffuser ce visuel sur son profil, avait tout simplement vu son compte suspendu.
©DR

Censure

Le réseau social a procédé à la suspension (temporaire) de la page d’Atlantico suite à un article dont l’image d’illustration était le célèbre tableau de Gustave Courbet.

Facebook n'a visiblement guère apprécié l'image accompagnant un article publié sur la page Facebook d'Atlantico. La photo en question ? Une représentation du célèbre tableau "L'Origine du Monde", de Gustave Courbet. Une œuvre d'art exposée au musée d'Orsay depuis 1886.

Ce n'est pas la première fois que le réseau de Mark Zuckerberg pose des problèmes à certains de ses utilisateurs suite à la diffusion de ce tableau. En février 2011, Frode Steincke, un Danois qui avait "osé" diffuser ce visuel sur son profil, avait tout simplement vu son compte suspendu. Dans les heures qui ont suivi l'éclosion de l'affaire, les photos de profil de nombreux utilisateurs se sont subitement transformées en reproductions de Courbet, des pages et des groupes dédiés demandaient le rétablissement du profil visé. La lutte contre la censure aveugle affolait les utilisateurs du réseau social. Finalement, Steincke a vu son compte rétabli... mais seulement après s'être publiquement excusé et expliqué avoir posté cette image "par mégarde".

Interviewé par Atlantico, le philosophe Luis de Miranda estime que "le tableau révèle en soi l'origine même de Facebook puisque le réseau social a été créé par des étudiants, dont Mark Zuckerberg, pour noter l'apparence des étudiantes à partir du trombinoscope de leur université. Une hypothèse probable est celle de la volonté de Facebook de censurer ses propres origines. Mais il est également probable que se soit les utilisateurs du réseau qui aient eux-même signalé la publication".

Après ces affaires, l’hypothèse la plus citée pour expliquer cette modération était le côté tatillon des modérateurs de Facebook au Danemark. Pourtant, le réseau social n'avait visiblement pas compris l'impact de l'affaire et allait frapper - encore. Quelques semaines plus tard, une plainte est en effet déposée contre le réseau social devant le tribunal de grande instance de Paris. La cause du problème ? Identique: Frédéric Durand-Baïssas, l’utilisateur en question, a vu son profil suspendu après avoir… posté le lien d’une vidéo d’un documentaire consacré au tableau. Les mails de réclamation du plaignant sont restés sans réponse, jusqu'à ce qu'il prenne donc la décision de traîner l'affaire en justice.

Deux histoires similaires, un même objet du délit : a priori, toutes les équipes de modération de Facebook étaient désormais prévenues de l'existence de ce tableau, histoire de ne pas le censurer de manière aveugle. A priori, donc, jusqu'à ce jeudi matin.

Les "standards de la communauté Facebook" précisent les différentes raisons pour lesquelles des contenus peuvent être modérés et/ou supprimés. A côté des incitations à la violence, au suicide ou encore à l'harcèlement, figure une catégorie "Nudité et pornographie" dans laquelle a été classée le message nous informant du blocage du compte. Il y est précisé : "Nous souhaitons bien entendu respecter le droit que chacun devrait avoir de publier des contenus importants, qu'il s'agisse d'une sculpture du David de Michel-Ange ou de la photo d'un bébé contre le sein de sa mère". Facebook reconnait ainsi, en théorie, faire attention à ces "exceptions" artistiques, dont fait légitimement partie "L'Origine du Monde" de Courbet. Mais de la théorie à la pratique, il semble y avoir un pas...

"Nous assistons à une américanisation des esprits à travers Facebook qui se manifeste par la volonté de chasser tout ce qui a trait au politiquement incorrect, domaine où la France et une partie de l'Europe excellent davantage " précise Luis de Miranda. 

Nous n'avons heureusement pas eu à présenter nos excuses publiques, encore moins à prêcher la mégarde, pour recouvrir la pleine acuité des fonctions de notre page Facebook - et celles des profils de ses administrateurs, puisque tous ont dû effectuer les mêmes démarches. Mais ce fâcheux désagrément pose question : doit-on procéder à une autocensure à chaque fois qu’un papier, par exemple, est accompagné d’une image potentiellement sensible ? Doit-on tolérer ce puritanisme ?

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Ajout , mardi 7 août : Contacté avant la publication de cet article, Facebook nous a envoyé ce mardi ces quelques lignes : 

La sécurité des utilisateurs de Facebook est notre priorité. Nos conditions d’utilisation interdisent effectivement la publication de photos de personnes nues, et non de photos de peintures ou de sculptures. Plus de 300 millions de photos sont téléchargées chaque jour sur Facebook. Il est possible que parmi celles-ci, certaines photos de peintures soient retirées par erreur. Encore une fois, notre objectif est de rendre la plateforme la plus sûre possible, y compris pour les nombreux adolescents (de plus de 13 ans) présents sur Facebook.Facebook n’a en revanche pas désactivé la page Facebook d’Atlantico, même temporairement.

Atlantico confirme la suspension temporaire de sa page.

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