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Syrie : Comment expliquer
le véto russo-chinois au Conseil
de sécurité ?
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Seuls contre tous

La Russie et la Chine ont opposé jeudi un nouveau "double véto" à une résolution occidentale menaçant le pouvoir syrien de sanctions, au lendemain de l'attentat de Damas, ayant tué trois membres du cercle proche de Bachar el-Assad. Preuve que les deux pays croient encore en sa capacité à ramener l'ordre en Syrie.

Ardavan Amir-Aslani

Ardavan Amir-Aslani

Ardavan Amir-Aslani est avocat et essayiste, spécialiste du Moyen-Orient. Il tient par ailleurs un blog www.amir-aslani.com, et alimente régulièrement son compte Twitter: @a_amir_aslani.

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Le double veto Russo-chinois du ce jour au conseil de sécurité à propos d’une résolution sur le conflit syrien traduit une compréhension de la situation par ces deux pays qui contraste avec celle qu’est souvent véhiculée par les médias. En effet, il est difficile d’imaginer que ces deux pays qui continuent de maintenir leur représentation diplomatique sur place à Damas ainsi que leur coopération militaire avec le régime syrien, prennent le risque de prendre une position aussi radicale en faveur du régime sans être convaincu que le pouvoir d’Assad est encore fermement enraciné dans la pays. A leurs yeux le pouvoir d’Assad est loin d’être moribond.

Ce double veto prend d’autant plus d’ampleur qu’il intervient en dépit de l’insistance pressante du secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, pour que le Conseil de Sécurité adopte une position concertée et unanime sur la question. Par ailleurs, ce veto, intervenant au lendemain d’un féroce attentat ayant partiellement décapité le régime démontre que tant la Russie que la Chine ont encore foi dans la capacité de Bachar el-Assad de ramener l’ordre dans ce pays qui est depuis hier officiellement entré en guerre civile.

Pourtant la résolution du conseil de sécurité en tant que telle ne contenait pas de mesure exécutoire d’application directe immédiate ou de sanctions nouvelles. Elle n’appelait qu’à la prorogation de la mission d’observateur de l’ONU sur place et à la transition du régime sans le concours de Bachar el-Assad. Or, elle a quand même fait l’objet d’un veto !

Ce veto a moins à avoir avec la volonté des Russes et des Chinois de défendre, coûte que coûte, la dynastie meurtrière des Assads que de rappeler au monde que la bipolarisation est de retour dans les relations internationales. Que la Russie tient à continuer à jouer un rôle au Moyen-Orient en soutenant le dernier allié fidèle qui lui reste dans la région. Mais aussi que l’alternative proposée en remplacement d’Assad ne convient guère. En effet, il faut bien reconnaître qu’un amas de groupement islamiste plus ou moins salafiste ne représente pas une solution idéale de changement. On peut difficilement considérer comme un progrès, le remplacement d’un régime brutal laïc par un régime brutal islamiste. A moins de vouloir comme nouveau gouverneur de Damas un ancien de Guantanamo comme c’est le cas à Tripoli aujourd’hui !

Par ailleurs, les russes et les chinois ont chez eux les mêmes problèmes que connait le régime syrien. C’est-à-dire des minorités religieuse profondément hostile au pouvoir central, tant à Moscou qu’à Pékin. Rappelons le cas des Ouighours dans le Turkestan pétrolifère chinois ou les tibétains ou encore les tchétchènes et les daghestanais en Russie.

Les dirigeants de Moscou et de Pékin ne peuvent que s’interroger sur le sort qui pourrait leur être réservé par la communauté internationale si des révoltes ethniques nouvelles devaient se reproduire sur leur sol. Leurs doubles vétos visent aussi à les protéger contre l’éventualité de l’éclatement de situation similaire sur leur propre territoire. Rappelons que la deuxième guerre tchétchène en Russie, à peine il y a plus de dix ans, a entrainé cinquante mille morts, soit plus de trois fois ce qu’a connu le conflit syrien à ce jour.

L’exercice de leur droit de veto a ainsi un double objectif. D’abord celui de rappeler au monde que la Russie et la Chine ont leur mot à dire sur les conflits du moyen orient et ensuite pour s’auto-protéger contre une répétition de l’histoire chez eux.

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