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Duels aux législatives : 
le FN a autant bénéficié 
de reports de voix en provenance 
de la gauche que de la droite
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Kif kif

Le cordon sanitaire n'a pas plus sauté (ou pas moins) dans un camp que dans l'autre. Les reports de voix du FN vers la droite, eux, dépendent de la région de vote et de l'origine socio-politique des électeurs.

Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet est directeur du Département opinion publique à l’Ifop.

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Atlantico : Six semaines après la victoire de François Hollande à l'élection présidentielle, les Français ont confirmé dimanche l'alternance au second tour des élections législatives en offrant à la gauche et ses alliés la majorité absolue à l'Assemblée. Comme pour la présidentielle, l'UMP a-t-elle souffert du report des voix FN et dans quelle proportion ?

Jérôme Fourquet : Rien n'indiquait en effet un report pure et parfait des voix du FN vers l'UMP. A ce titre, la présidentielle est riche d'enseignements...

Par exemple, dans ce cas précis, 55% des électeurs de Marine Le Pen s'étaient reportés sur Nicolas Sarkozy, 15% sur François Hollande, et les 30% restants s'étaient abstenus.

Concernant les législatives, il n'y a pas encore précisément de chiffres au global. Il faudrait pour cela se pencher sur chacune des circonscriptions où il y avait des duels droite / gauche, et où le FN était éliminé. Reste l'enseignement de la présidentielle... Il faut donc démystifier l'idée fausse qui voudrait que les électeurs FN se reportent comme un seul homme sur le candidat de droite qui reste en lice.

La situation est-elle analogue dans le Sud de la France, ou la sociologie électorale montre-t-elle un report plus fréquent des voix FN pour l'UMP ?

Il est vrai que dans le Sud de la France, la tendance pour un électeur FN à se reporter sur un candidat de droite est plus forte. Et encore une fois, les reports de voix à la présidentielle le prouvent.

Au niveau national, tout l'électorat FN ne se reporte pas sur la droite, en sachant que certains préfèrent s'abstenir et d'autres se tourner vers le candidat de gauche. Ensuite, cela varie assez sensiblement selon les régions, et l'origine socio-politique de l'électorat frontiste.

A savoir, dans des régions populaires et industrielles (Nord-Pas-de-Calais et Picardie), le report des voix FN est moins automatique et moins bons pour la droite. En revanche, dans le Sud, si les reports sont meilleurs pour la droite, c'est parce-que l'électorat FN vient originellement de la droite : classe moyenne, commerçants, artisans et retraités...

Le 11 juin, Marine Le Pen dressait une liste de quatre candidats de gauche et quatre de l'UMP à fairebattre à tout prix lors du second tour des législatives, au nom de la moralisation de la vie politique, mais aussi de l'attitude à adopter face au Front national. Le comportement des électeurs FN montre-t-il un respect ou non des consignes de vote ?

Premièrement, la victoire ou la défaite d'un candidat de droite comme de gauche ne dépend pas uniquement du comportement des électeurs frontistes. Ce n'est qu'une des variables.

Ensuite, l'électorat frontiste comme les autres électorats est assez indépendant et autonome. Il vote en son âme et conscience, et s'abstient volontiers... Marine Le Pen le sait évidemment, mais cherchait avant tout à faire "monter la pression". Un sondage réalisé dans la circonscription qui a vu l'élection de Nathalie Kosciusko-Morizet le prouve : une courte majorité de l'électorat FN s'est reportée sur l'UMP, d'autres se sont abstenus... Mais s'abstenir, ce n'est pas la faire battre.

Encore une fois, à la présidentielle, Marine Le Pen n'avait pas donné de consignes de vote, et pourtant plus de la moitié de son électorat à voter pour Nicolas Sarkozy. S'il on s'intéresse à d'autres électeurs que ceux du FN, les comportements autonomes sont les mêmes. Ainsi, à la Rochelle, l'électorat de gauche a voté pour Olivier Falorni. Contrairement à l'abstentionniste, l'électeur qui se déplace est motivé et déterminé, plus à même de s’abstraire des consignes de vote.

Du côté des reports de voix de l'UMP, la stratégie de Jean-François Copé du "ni à gauche ni au FN" a-t-elle été suivie par les électeurs de droite ?

Ce n'est pas ce qui est constaté. Dans les duels l'opposant à la gauche au second tour (21 duels), le FN est passé en moyenne de 23% à 39,2%, soit un gain de 16,2% dans l'entre-deux tours. Cela plaide quand même pour un report assez important des voix de l'UMP sur le FN.

Toutefois, quand il s'agit d'un duel droite / FN (9 duels), le FN passe de 23,3% à 40%, soit une progression de 16,7% en moyenne. La digue et le cordon sanitaire entre droite et extrême n'a donc pas spécialement cédé, l'électorat de droite ne votant pas de manière décomplexée pour l'extrême-droite. Dans tous les cas, pas plus que l'électorat de gauche, puisque le report des voix vers le FN s'établit dans les mêmes proportions.

Les réserves de voix du FN se situent donc à gauche et à droite, comme pour les cantonales.

Propos recueillis par Jean-Benoît Raynaud

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