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Ci-gît François Bayrou
(1986 - 2012)
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R.I.P.

Avec 23% de suffrages dans sa circonscription, François Bayrou risque de ne pas être élu député. Son avenir politique et son parti, le Modem, pourraient ne pas s'en remettre.

Alexis Massart

Alexis Massart

Alexis Massart  est directeur d'Espol, école européenne de sciences politiques et sociales de l'Université catholique de Lille.

 

 

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Atlantico : François Bayrou vient de réaliser un score historiquement bas, pour ce premier tour des législatives. Ses chances d’obtenir un siège au Parlement sont mêmes sérieusement remises en question. Quel bilan le leader du Modem peut-il tirer de premier tour ?

Alexis Massart : Il attendait certainement un meilleur résultat mais ce qui est arrivé dimanche était prévisible au vu de son échec à l’élection présidentielle. Si je parle d’échec, c’est parce qu’il a perdu la moitié de ses électeurs entre 2007 et 2012. Il était déjà dans une situation problématique et les législatives ce font que confirmer cette tendance.

Sa seule possibilité d’être élu dans sa circonscription aurait été que le Parti socialiste ne présente pas de candidat. A partir du moment où le PS a décidé de placer quelqu’un dans la course, les choses sont quasiment courues d’avance.

C’est la fin pour François Bayrou ? S’il n’est pas élu comme député, que lui reste-t-il comme perspectives ?

On peut toujours se relever après un échec. Mais là, franchement, cela me paraît compliqué. Je ne dis pas qu’il n’y arrivera pas, la politique amenant pas mal de surprises par moments. Il pourrait y avoir des recompositions politiques, en coulisses, dans la foulée des législatives, pour ouvrir un espace à François Bayrou et ses idées.

Dans tous les cas, François Bayrou perd cette place particulière qui était la sienne sur la scène politique française.

Cette fuite des électeurs du Modem entre 2007 et 2012, comment l’expliquer ? François Bayrou est revenu sur sa déclaration de vote pour François Hollande mais est-ce la seule raison ?

A l’origine, en 2007, François Bayrou réalise un score important parce qu’il passe pour l’incarnation de la force antisystème. Il ne faut pas oublier qu’à ce moment-là, le souvenir d’avril 2002 est encore là : la population est secouée et rejette Jean-Marie Le Pen. A l’époque, on en vient à parler d’extrême-centrisme : François Bayrou vient incarner le rejet du fonctionnement traditionnel entre la droite classique et la gauche classique tout en étant une alternative aux autres extrémismes.

Entre temps, entre 2007 et 2012, le souvenir de 2002 s’est estompé. L’électorat a la mémoire courte. Les anciens acteurs antisystème ont récupéré une partie de leur espace, rognant d’autant celui de François Bayrou. Son électorat s’est rétrécis de plus en plus jusqu’à s’approcher de l’ancien électorat de centre-droit. C’est là, me semble-t-il qu’il y a eu une erreur stratégique : l’annonce du vote François Hollande. Ce n’est pas une erreur idéologique, ce choix étant parfaitement inscrit dans la logique intellectuelle de François Bayrou : ce centrisme peut travailler aussi bien avec la droite qu’avec la gauche. Ce positionnement n’a par contre pas été compris par son électorat.

Derrière le personnage de François Bayrou, il y a son parti, le Modem : là aussi, la dégringolade entre 2007 et 2012 est évidente. Cette formation politique a-t-elle encore un avenir ?

L’échec des candidats Modem est à relier à celui de François Bayrou. En 2007, c’est lui qui avait tiré vers le haut l’étiquette de son parti vers le haut. Cette fois-ci, il l’a tirée vers le bas. Le Modem est dans une situation particulière : il n’a pas de candidats sortants, pas de figures locales qui puissent chercher à se faire élire au-delà de l’échec de François Bayrou. Mais le Modem, plus que d’autres partis, est largement organisé, centré autour de la personnalité de François Bayrou.

A l’opposé, que ce soit pour le PS ou l’UMP, même lorsque leurs images sont au plus bas, des candidats parviennent à se faire élire parce qu’ils se reposent sur une forte implantation locale. Ils peuvent surmonter des inversions de majorité. Le Modem, lui, s’est vidé des parlementaires qui auraient pu incarner cette assise territoriale : les députés qui étaient proches de François Hollande ont rejoint le Nouveau centre.

Est-ce qu’il y a une relève, des équipes, des personnalités qui, au sein du Modem, pourraient incarner la continuité de François Bayrou ?

Il attire encore par son discours, qui peut être apprécié par une jeune génération qui aimerait se sortir du clivage traditionnel. Maintenant, pour vivre, un parti a besoin d’un réseau d’élus locaux pour survivre et là, le Modem n’a plus rien. Les quelques élus, notamment des maires, qui sont toujours présents dans ce parti, ont généralement été élus suite à des accords avec des personnalités du Parti socialiste.

Économiquement, le Modem peut-il encore être viable ?

Cela va être très compliqué. L’élection législative est l’étalon de mesures pour le financement des partis, qui dépend du nombre de candidats, du nombre d’élus et du total des voix. Vu le score du Modem, la situation financière du parti risque d’être très difficile et de remettre en question la viabilité du parti.

Propos recueillis par Romain Mielcarek

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