"Les Grandes affaires criminelles" sous la direction de Jean-Marc Berlière : sept siècles de faits divers qui en disent long sur la nature humaine. Instructif…<!-- --> | Atlantico.fr
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"Les Grandes affaires criminelles" sous la direction de Jean-Marc Berlière
"Les Grandes affaires criminelles" sous la direction de Jean-Marc Berlière
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"Les Grandes affaires criminelles" sous la direction de Jean-Marc Berlière est publié aux éditions Perrin.

Gilles Antonowicz pour Culture-Tops

Gilles Antonowicz pour Culture-Tops

Gilles Antonowicz  est chroniqueur pour Culture-Tops.

Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).

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"Les Grandes affaires criminelles" sous la direction de Jean-Marc Berlière

Perrin - 364 pages - 22€

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Thème

17 affaires, célèbres (L’énigme des servantes aux mains sanglantes : les sœurs Papin) ou mal connues (La Beauce à feu et à sang ? Les chauffeurs d’Orgères), oubliées (Les « sauvages » du Palais-Royal : une affaire de mœurs en 1791) ou mythifiées (Gilles de Rais), vues par la lorgnette de 17 historiens s’attachant à mettre en évidence ce que chaque dossier, chaque fait criminel « donne à lire d’une époque, de ses angoisses, de sa sensibilité, de ses phobies ».

Points forts

À l’inverse du policier, des magistrats du parquet et des avocats, l’historien n’a pas de thèse à défendre. Contrairement au juge, il n’est soumis ni aux passions du moment, ni à la pression de l’opinion. À la différence du journaliste, il n’est pas en quête de sensationnel. Autant dire qu’en travaillant sur les archives, il dispose du recul et de la sérénité nécessaires pour tenter de cerner la vérité au plus près et, en le contextualisant, de mieux comprendre le crime commis.

Si les dossiers traités n’ont pas tous le même poids, ils ont le mérite, par leur diversité, de toujours raviver l’intérêt. Citons, parmi les meilleurs (si l’on peut dire …), la célèbre affaire Calas (Jean Calas, commerçant protestant toulousain, est accusé d’avoir assassiné son fils Marc-Antoine pour l’empêcher de se convertir au catholicisme ; roué vif le 10 mars 1761, il sera réhabilité post mortem grâce à Voltaire, certes, mais pas seulement : Antoine Louis, le chirurgien qui donnera ses lettres de noblesse à la médecine légale en démontrant que la mort de Marc-Antoine résultait d’un suicide, y prit sa part) ; l’affaire Joseph Vacher, le tueur de bergers (popularisé par Michel Galabru dans le film de Bertrand Tavernier Le Juge et l’assassin) qui, de 1893 à 1898 terrorisa les campagnes ; l’affaire Jules Durand, ce syndicaliste havrais surnommé le « Dreyfus ouvrier » victime en 1910 d’un « crime judiciaire » qui lui fit perdre la raison ; l’affaire Weidmann, le tueur en série arrêté en 1937 sur fond de guerre des polices qui fut le dernier condamné à mort à être guillotiné en public ; l’assassinat de Marx Dormoy au Relais de l’Empereur de Montélimar en juillet 1941 et les questions politiques induites par cet attentat.

Signalons tout particulièrement la façon dont Fabien Gaveau, historien spécialiste de la ruralité, éclaire sous un jour nouveau l’épouvantable crime collectif de Hautefaye (Dordogne), crime dont Alain Corbin s’était déjà emparé dans son livre Le Village des cannibales (Flammarion, 1995).

Points faibles

Il est permis de regretter ici ou là le survol des enquêtes policières, ce qui empêche parfois de comprendre dans quelles circonstances les coupables ont été découverts.

 Il est surtout permis de regretter la manière dont  Perrin, l’éditeur, renvoie une fois de plus les notes en fin d’ouvrage. Que l’on mette les notes « sources » en fin d’ouvrage, cela peut se comprendre. Mais que l’on relègue les notes « commentaires » au purgatoire des dernières pages, cela ne l’est pas. C’est même extrêmement désagréable pour le lecteur. Les notes doivent figurer en bas de page !

En deux mots ...

 De Gilles de Rais, exécuté le 26 octobre 1440, à la condamnation en décembre 1996 des assassins de Jacques Roseau, la dernière victime de l’Algérie Française, sept siècles de « faits divers » qui en disent aussi long sur la nature profonde de ces époques que sur la nature humaine.

Un extrait

Le mardi 16 août 1870 à Hautefaye (arrondissement de Nontron, Dordogne), un jeune noble, Alain de Moneys, est sauvagement assassiné, victime d’un engrenage qui fait croire à une foule en furie qu’il appartient à un groupe hostile au second Empire et qu’il espère la victoire de la Prusse dans la guerre récemment déclarée. En ce jour de foire, après trois longues heures de supplice, agonisant sans que personne ne parvienne ou ne veuille le sauver, il est traîné sur un bûcher improvisé. Les flammes le calcinent, figeant un corps qui dit l’intensité de la souffrance. L’annonce des faits à Périgueux le 18 août stupéfie la ville. Très vite, la justice inculpe cinq hommes pour homicide volontaire et seize autres pour participation active. Ils deviennent l’incarnation des sauvages, des barbares, des « cannibales ».

L'auteur

Professeur d’histoire émérite, spécialiste des questions de police au XIXe et au XXe siècle, Jean-Marc Berlière est notamment l’auteur de Policiers sous l’occupation (Perrin, Tempus, 2009), Le Sang des communistes : les bataillons de la jeunesse dans la lutte armée, automne 1941 (Fayard, 2004), Liquider les traitres : la face cachée du PCF (1941-1943) (Robert Laffont, 2015), Ainsi finissent les salauds : séquestrations et exécutions clandestines dans Paris libéré (Tallandier, Texto, 2018), Liaisons dangereuses : miliciens, truands, résistants, Paris 1944 (Perrin, 2013), et d’une somme de 1 357 pages, préfacée par Patrick Modiano, rassemblant trente années de recherches : Police des temps noirs : France, 1939-1945 (Perrin, 2018).

À noter également, son livre remarquable, écrit en compagnie de Frank Liaigre : L’Affaire Guy Môquet : enquête sur une mystification officielle (Larousse, 2009).

Le clin d'œil d'un libraire

LIBRAIRIE AUGUSTE BLAIZOT. QUAND LE LIVRE DEVIENT UNE ŒUVRE D’ART

Faire du lèche vitrine rue du Faubourg Saint Honoré à Paris n’est plus  un luxe mais cela reste un privilège surtout lorsqu’on a la chance d’entrer au 164 chez Claude Blaizot dans la librairie éponyme de père en arrière petit- fils depuis 1870, ou au 178, chez notre ami Jean Izarn qui a repris la fameuse librairie Chrétien ou encore dans la librairie Picard au 128. Blaizot est, on peut le dire, un monument historique, le temple du livre rare, sinon unique, le royaume du livre précieux dans tous les sens du terme. « Chez Blaizot, nous sommes tout autre chose que des commerçants.  Nous sommes des artisans-libraires ». Sous leur enseigne sont réunis depuis des générations tous les métiers du livre d’art : éditeur, typographe, illustrateur, relieur, collectionneur bien sûr et avant tout découvreur.

Les éditions les plus rares sont à découvrir chez Blaizot, uniques sont certains exemplaires anciens, très limités sont les tirages. Mais le prix n’attend pas le nombre des années. Surprenant : un Houellebecq relié tiré sur Velin d’Arches à 120 exemplaires vaut ici 3 000 euros, un Le Clézio plus de 2 000 ! « Notre coup de cœur : Petits et grands verres, écrit et illustré par Laboureur, édité en 1927 (Au Sans Pareil éd. Tirage, 270 ex. !) ». Le prix ? Celui d’un Château Petrus 1947…

Que l’on se console : une simple visite vaut le « coup » d’œil : décor art déco 1920 dans son jus, vitrail du maître verrier Grüber, poème de Pierre Lecuire, « l’architecte du livre », selon Claude Blaizot (« il voit des âmes au plafond… »). Partage d’émotions garanti avec le maître des lieux : «Là où on peut donner le plus de soi, c’est dans l’édition, et le tourment le plus dur du libraire, c’est justement de se séparer d’un ouvrage qu’on a près de soi ».

 Librairie Auguste Blaizot, livres précieux : 164, Faubourg St Honoré 75008 PARIS  

Texte et interview par Rodolphe de Saint-Hilaire pour la rédaction de Culture Tops.

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