Greta Thunberg a 18 ans et veut façonner le monde à son idée. Mais est-on vraiment un adulte à cet âge-là ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Greta Thunberg 18 ans anniversaire environnement adulte jeunesse génération
Greta Thunberg 18 ans anniversaire environnement adulte jeunesse génération
©FILIPPO MONTEFORTE / AFP

Joyeux anniversaire

La militante pour le climat Greta Thunberg vient de fêter ses 18 ans. La période actuelle force-t-elle les jeunes à devenir des adultes plus tôt ou au contraire à rester plus longtemps des enfants ou des adulescents ?

Michel Fize

Michel Fize

Michel Fize est un sociologue, ancien chercheur au CNRS, écrivain, ancien conseiller régional d'Ile de France, ardent défenseur de la cause animale.

Il est l'auteur d'une quarantaine d'ouvrages dont La Démocratie familiale (Presses de la Renaissance, 1990), Le Livre noir de la jeunesse (Presses de la Renaissance, 2007), L'Individualisme démocratique (L'Oeuvre, 2010), Jeunesses à l'abandon (Mimésis, 2016), La Crise morale de la France et des Français (Mimésis, 2017). Son dernier livre : De l'abîme à l'espoir (Mimésis, 2021)

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Atlantico.fr : Greta Thunberg vient de célébrer ses 18 ans. Peut-on considérer que c’est cet anniversaire qui fait de la jeune femme, connue depuis plusieurs années pour son engagement pour le climat, une adulte ? 

Michel Fize : Cette question présuppose qu’être adulte c’est accéder à un statut supérieur. C’est aujourd’hui un simple point de vue. Il faut plutôt se demander ce qu’est exactement un « adulte ». Derrière cette réalité psycho-sociale, se cache aujourd’hui surtout un ensemble de situations qui ne font pas rêver les jeunes. L’« adulte » en effet n’est-il pas d’abord celui qui est chargé de multiples et parfois pénibles obligations : familiale, professionnelle, financière… ? Peut-on avoir de telles aspirations à 20 ou 25 ans ?

Le sens commun décrit l’âge adulte comme l’âge de toutes les capacités, de la pleine réflexion. C’est une opinion, pas (toujours) une réalité. Les capacités, on le voit aujourd’hui, sont de moins en moins reliées à l’âge. Conformément à la maxime bien connue : « la valeur n’attend pas le nombre des années ». Lorsque l’on considère l’exemple de Greta Thunberg, l’on s’aperçoit qu’une jeune fille de 15 ou 16 ans a été tout-à-fait capable de déclencher et d’animer un mouvement mondial de protestation contre le désordre écologique – avec naturellement le soutien de ses proches et, probablement, d’une « armée » de conseillers.

L’âge de 18 ans est en fait un âge très arbitraire. C’est un totem qui fait passer un individu de la minorité à la majorité avec notamment l’octroi du droit de vote, un droit d’abord très alléchant pour les jeunes. Pour revenir à Greta Thunberg, il me paraît donc plus pertinent de nous demander quel type d’adulte elle va devenir. Continuera-t-elle à développer toutes ces intelligences dont elle nous gratifie depuis deux ans ?

La période actuelle force-t-elle les jeunes à devenir des adultes plus tôt ou au contraire à rester plus longtemps des enfants, ou des adulescents ? 

Les jeunes d’aujourd’hui évoluent dans un système très actif de réseaux sociaux qui leur permet de construire des projets révélant de leur part d’étonnantes capacités. Chacun, grâce au monde numérique, peut devenir quelqu’un : il suffit d’un peu de talent, d’ambition, d’envie.

Le monde de la jeunesse est en réalité, depuis longtemps, un monde qui grandit à part, qui ne se situe pas, n’agit pas en fonction du monde adulte. Vouloir par conséquent comparer ces deux mondes n’a aucun sens. Ils évoluent parallèlement – sans hiérarchie entre eux. Les jeunes en fait se soucient fort peu de ce pensent d’eux les adultes. Ils ne se positionnent en aucun cas par rapport à leurs aînés.

Il faut relire ici Edgar Morin qui, le premier en France, a traité cette question au début des années 1960, dessinant cette « culture jeune », autrement dit un monde prenant de plus en plus ses distances par rapport au monde adulte. Mais, soulignons-le, le « fossé des générations » n’est pas total. Le monde des jeunes et celui des adultes se rejoignent parfois. Il y a d’ailleurs des collaborations « contraintes », comme celles se nouant dans le monde de l’entreprise.

En conclusion, l’on peut dire qu’à la faveur de la crise épidémique, les jeunes ont tout juste continué à dérouler leurs capacités, à multiplier les initiatives.

Michel Fize va publier "De l'abime à l'espoir : les années folles du mondialisme (1945-2020), aux Editions Mimésis en mars 2021. 

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