Petits conseils pour gérer son anxiété face à une actualité déprimante et angoissante<!-- --> | Atlantico.fr
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dépression angoisse stress
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©DR / Capture d'écran

Second Impact du Covid-19

Avec la crise sanitaire, la période de reconfinement, la crise économique et la menace terroriste, l'actualité peut générer de l'angoisse et avoir un fort impact mental et psychologique. Comment faire face à cette situation et comment réduire son stress face à l'anxiété de cette période ?

Pascal Neveu

Pascal Neveu

Pascal Neveu est directeur de l'Institut Français de la Psychanalyse Active (IFPA) et secrétaire général du Conseil Supérieur de la Psychanalyse Active (CSDPA). Il est responsable national de la cellule de soutien psychologique au sein de l’Œuvre des Pupilles Orphelins des Sapeurs-Pompiers de France (ODP).

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Atlantico.fr : Pourquoi sommes-nous anxieux ?

Pascal Neveu : Dans un premier temps, il faut sans doute préciser que l’anxiété est un sentiment et un mécanisme normal, sauf dans certains cas.

Il est issu d’un sentiment de peur qui « surchauffe »notre cortex préfrontal et nous empêche de « réfléchir » et trouver une solution à un problème de vie, d’autant plus si nous sommes seul confronté à une situation anxiogène.

L’anxieux est finalement un être qui doit faire l’apprentissage d’une situation nouvelle qu’il ne contrôle pas encore.

Des climats anxiogènes, comme par exemple celui lié à la COVID-19, amènent à plusieurs types de comportement :

-       je suis dans le déni, et je continue à penser que ce n’est qu’un « gripette »n voire même je n’écoute plus les informations.

-       je suis anxieux, et comme nous l’avons encore vu il y a quelques jours, tout comme en mars : je fais des stocks de pâtes et de papier toilette.

-       je canalise mon anxiété en m’adaptant au monde réel, en restant cependant avec un état de conscience éveillée (réalité, sens critique mesuré), sans comportement hystérique ou paranoïaque.

-       …

Chaque épreuve anxieuse peut créer en nous quelque chose de nouveau pour notre Moi qui évolue avec le temps, et pour notre vie sans cesse confrontée à un fleuve peu tranquille.

Qui n’a jamais été anxieux dans sa vie ? 

Prenons l’exemple des étudiants qui passent des examens et des concours. Quelle anxiété pour eux et leurs familles et proches ?

Mais l’anxiété principale est celle à laquelle la personne concernée est confrontée.

Et là, le cerveau, dans tout ce qu’il comporte de conscient et inconscient, peut s’adapter et gérer cette anxiété en trouvant des solutions, grâce à son cerveau.

Par exemple des études sur les rêves menées par le Pr Arnulf (Pitié-Salpétrière-Paris) montrent que celles et ceux qui ont relaté les pires cauchemars la veille de leur examen, sont celles et ceux qui ont le mieux réussi ! Autrement dit, c’est comme si l’anxiété avait été gérée par le cerveau, en anticipant et en canalisant tous les paramètres d’anxiété (savoir, lieu, sujet…).

Notre cerveau, notre psychisme sont capables de travailler une situation, d’autant plus que nous la ressentons anxieuse.

Tout comme nous pouvons avoir en face de nous une personne très anxieuse, qui a organisée et choisie sa vie personnelle et professionnelle à travers un cadre qu’elle sait gérer. Où il n’y a pas de place à l’imprévu.

Son anxiété intérieure l’amène justement à privilégier des environnements qu’elle sait contrôler, ce qui lui permet d’oublier, d’occulter les autres formes d’anxiétés.

Elle met en place un compromis psychique, mais sera peut-être plus « vulnérable » qu’une autre le jour où elle sera confrontée à une situation incontrôlée jusqu’à ce jour.

Mais pensons aussi à l’anxiété d’une mère de famille, confrontée au nouveau-né : les cris, les pleurs, les nuits… Comment les interpréter, les gérer ?... Les études montrent que cette mère de famille va finalement créer un mode de communication nouveau avec son enfant et dépasser son anxiété… parce qu’elle se sera fait confiance.

Beaucoup d’anxiétés nous relient à la peur de mal faire, de ne pas bien réagir, d’être dans un état de non-survie immédiat, à des enjeux majeurs… des enjeux liés à notre éducation, une reconnaissance, le refus de l’échec…

« Que dois-je faire là ? » est la question qui dirige le bal de l’anxiété.

De quelles manières s’exprime l’anxiété ?

Il faut différencier l’anxiété de l’angoisse, et donc les définir précisément.

L’anxiété est une réaction psychologique et physiologique face à une situation stressante. C’est une réaction normale liée à des ressentis, des sentiments de peur et de crainte, face à une situation, un événement inévitable, non maîtrisé, non contrôlé, que l’on ne peut pas fuir ou éviter, auquel il faut faire face, se confronter.

Il est très proche de l’état de stress décrit par Hans Selye dans les années 40 qui précise, après ses études auprès des animaux, que l’être humain peut être victime d’un syndrome général d’adaptation. Plus précisément, tout changement brutal d’une habitude peut entraîner chez un individu des perturbations psychologiques et physiologiques.

L’angoisse, en revanche, est un état de mal-être profond qui plonge celle ou celui qui y est confronté dans un ressenti violent et profond d’oppression, de mort imminente, inévitable. Le symptôme anxieux devient alors un syndrome à la fois psychologique et existentiel.

Il prend la forme d’un trouble de l’anxiété généralisée avec un ensemble de symptômes décrits dans le manuel de diagnostic psychiatrique de l’OMS (DSM-IV) : palpitations, battements de cœur, transpiration, tremblements, impression d'étouffement, sensation d'étranglement, douleur, gêne thoracique, nausée ou gêne abdominale, sensation de vertige ou d'évanouissement, déréalisation (sentiment d'irréalité) ou dépersonnalisation (être détaché de soi), peur de perdre le contrôle de soi ou de devenir fou, peur de mourir, sensations d'engourdissement, frissons ou bouffées de chaleur, fatigue, pleurs.

De cet état découle un versant psychopathologique qui distingue les névroses d’angoisses, mais également les psychoses, les troubles phobiques, organisations états-limites…

Ces deux troubles sont à différencier.

Durant la dernière période de confinement nous avons du gérer un grand nombre de crises d’angoisse, des attaques de panique… la mort rôdant, alors que notre psychisme privilégie la vie et déni, par mécanisme de défense normal, la mort.

Comment faire face et comment réduire son stress ?

Les études démontrent que l’organisme (dans sa globalité psychocorporelle) est capable de supporter ces variations anxieuses via notre système endocrinologico-immunologico-neuronal.

En gros, l’adaptation est possible face à toute situation même après un état de choc.

Mais nous ne sommes pas tous équipés de la même manière, sans que nous en connaissions réellement les explications.

Certains vont donc privilégier la médication. Elle est bien évidemment à ne pas rejeter dans le cas d’angoisses profondes et chroniques, en même temps qu’un suivi psychothérapeutique.

Il faut tout d’abord se dire  que l’anxieux n’est pas un malade mental !

Il faut donc être capable de communiquer de notre état d’anxiété, si ce n’est auprès d’un thérapeute, auprès de ses proches, de sa famille. Il faut également le mesurer afin d’évaluer la prise en charge.

Si on aborde le sujet du reconfinement et de la pandémie, l’exposition trop régulière et obsessionnelle à la télévision n’est pas conseillée. En effet, le cerveau ne s’aère pas dans ces cas là, mais rumine.

Le cerveau a besoin de distractions. Nous avons 2 hémisphères cérébraux à faire fonctionner, et un corps à faire vivre, souvent laissé de côté lors des états anxieux.

D’ailleurs beaucoup d’anxieux vont régresser dans des comportements oraux, la satisfaction de besoins primaires, car vitaux, comme si la vie s’arrêtait.

Dès que l’anxiété émerge, il faut tenter occuper son cerveau autrement, car c’est une sorte de spirale infernale qui se met en route. Donc téléphoner à un proche, regarder un film drôle, lire un roman qui nous plonge dans un autre univers, dessiner… permet au cerveau de passer sur un autre mode fonctionnel et faire baisser la tension psychique.

Une partie de cette tension psychique repose sur le fait de ne pas avoir trouvé de solution à notre problématique du moment, ou en tout cas de ne pas encore en avoir retiré les bénéfices à court terme.

Le sport est également une activité qui va mobiliser d’autres aires cérébrales et libérer des hormones du plaisir.

Parvenir à gérer l’anxiété qui n’est pas angoisse, c’est finalement se découvrir soi-même et retrouver l’estime de soi.

Car  l’anxiété peut être positive.

Sans anxiété… que seraient nos artistes, nos acteurs, nos créateurs, chanteurs… ?



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