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Covid-19 : En laissant un lourd passif aux jeunes, on creuse l'écart générationnel
©DENIS CHARLET / AFP

Génération sacrifiée

Dans un contexte de crise sanitaire et économique importante, la jeune génération fait preuve, sans en être pleinement consciente, d’une solidarité sans précédent.

Shana Aiach-Kohen

Shana Aiach-Kohen

Shana Aiach-Kohen,  diplômée de l’ECP-grandes écoles, est responsable du développement dans une start up française spécialisée en intelligence artificielle.

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Alors qu’il y a encore 3 mois, La France était embarquée dans des grèves infernales pour sauver la retraite à 62 ans, l’État français est aujourd’hui en train de lancer une intervention inégalée, endettant le pays sur potentiellement plusieurs générations pour sauver des vies et notamment celles de nos aînés. La jeune génération fait preuve, sans en être pleinement consciente, d’une solidarité sans précédent dans ce contexte.

Il faut tordre le cou aux idées reçues : l’oisiveté est un mot qui fait horreur à la jeune génération couramment appelée « Millenials ». Il s’agit des jeunes qui ont approximativement entre 25 et 38 ans, soit les actifs qui participent à la plus grande partie de la création de valeur économique et qui sont au sommet de leur dynamisme professionnel et physique.

Loin de la caricature des Millenials qui passeraient plusieurs heures chaque jour sur les réseaux sociaux, on voit en ces temps de crise une forte volonté des jeunes de continuer à faire fonctionner l’économie et les entreprises. Le télétravail s’est organisé et une agitation générale – dont l’utilité est parfois à questionner – témoigne de l’ambition de persévérer pour faire avancer le monde et sauver les entreprises confrontées à une crise soudaine et d’une violence inédite.

Ces efforts interviennent dans le cadre du confinement initié le 17 Mars 2020. Aux antipodes d’un darwinisme débridé, le choix du confinement est le choix de sacrifier la santé économique au profit de la vie et notamment celle des plus âgés. En effet, plus de 92% des morts du Covid19 ont plus de 65 ans et 75% des hospitalisés ont plus de 65 ans. Le confinement – dont l’ultime but n’est pas d’endiguer le virus mais plutôt d’en temporiser la propagation afin de pouvoir subvenir aux besoins des malades (en particulier en s’adaptant aux capacités d’accueil des hôpitaux) représente donc le choix louable de privilégier la vie des plus âgés au détriment de la qualité de vie des plus jeunes qui devront bien rembourser les milliards de dettes contractés par l’Etat et faire les frais du chômage de masse, comme c’est déjà le cas aux Etats-Unis.

Cette décision n’a quasiment pas été contestée et très peu de Millenials ont blâmé cet effort national ou souligné l’impact matériel qu’ils allaient subir pour sauver la vie de leurs compatriotes. Mais il est essentiel de reconnaître et féliciter cet acte de solidarité de la jeune génération envers ses aînés. Il sera également nécessaire de s’en souvenir lorsque ce sera au tour des aînés de sacrifier une partie de leur confort de vie pour le bien collectif ; ce sujet sera central, évidemment, quand reviendra l’heure de parler des retraites.

La crise actuelle ne doit pas nous rendre amnésiques. Les efforts considérables que les jeunes consentent à faire interviennent, ironie de l’Histoire, à peine un mois et demi après la fin des grèves massives pendant lesquelles certains ont usé de leur pouvoir de blocage de la société et de l’économie pour exprimer leur désaccord sur la réforme des retraites. Encore une fois, alors que certains s’enrageaient d’une refonte du système des retraites, les jeunes n’ont pas hésité à se mettre en risque pour continuer de travailler malgré l’arrêt total des transports en commun. En témoignent l’augmentation de 200% des accidents de vélo et les innombrables malaises dans les transports en commun... S’il est difficile d’avoir des statistiques sur l’âge des manifestants, les données relatives aux adhérents de la CGT sont éloquentes. L’âge moyen est de 49 ans, soit largement au-dessus de la moyenne nationale et seuls 4% des adhérents ont moins de 30 ans. La conclusion est claire, ceux qui refusent d’avancer l’âge de la retraite (alors même que la durée de vie a augmenté de 6 ans sur les 20 dernières années) ne sont pas les Millenials, mais ceux qu’on peut d'ores et déjà appeler les « seniors ». Dans un monde post Covid19, quand des millions de personnes auront perdu leur emploi pour contenir l’épidémie, sera-t-il encore possible de mettre le pays à feu et à sang pour défendre égoïstement son droit de départ à la retraite à 62 ans ?

De leur côté, les jeunes se demanderont comment maintenir leur niveau de vie. Plus que jamais les intérêts générationnels vont diverger et les aînés devront à leur tour se montrer attentifs et solidaires.

Mais parce que la solidarité seule ne pourrait suffire, il semble indispensable que cette tension intergénérationnelle se retrouve sur le terrain des élus de la Nation, de la gouvernance des entreprises, des syndicats etc. Nous avons beaucoup parlé de la parité́ de genre, il est temps d’introduire dans tous les registres de l’organisation de la vie de la Nation, l’exigence de la parité générationnelle.

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