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Les suppressions d'emplois chez HSBC annoncent une casse sociale sans précédent dans le secteur bancaire européen
©Reuters

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En confirmant la suppression de 35 000 emplois dans les deux ans, le groupe bancaire européen HSBC annonce la mutation la plus profonde qui va bouleverser l'ensemble du secteur bancaire européen.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

Il est aussi l'auteur du blog http://www.jeanmarc-sylvestre.com/.

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Après avoir été pendant un demi-siècle le plus gros créateur d’emplois, l’activité bancaire a entrepris depuis quelques années une mutation contrainte et forcée qui va l’obliger à se séparer d’une grande partie de ses personnels.

Avant l’an 2000, la banque était encore toute puissante. Partout dans le monde, l’industrie financière régnait sur la vie quotidienne en dominant les stratégies industrielles. La banque était incontournable.

Depuis une vingtaine d’année, tout a changé. Pour affronter la concurrence interne et consolider les garanties tout en assumant des nouveaux risques internationaux, les établissements bancaires se sont regroupés et en se regroupant, ils ont crée des synergies au niveau du personnel obligé de muter. Moins d’agences d’un coté, plus « de traders » de l’autre. Mais les traders aussi sont menacés par les robots.

L’arrivée du digital a progressivement transformé les banques en immense système informatique capable de traiter des milliards de données. Après avoir tout fait pour fidéliser ses clients, la banque s’est mise à traiter la data portée par ce même client.

Mais peu-à-peu, la banque s’est aussi aperçue que d’autres acteurs possédant de la « data » et des moyens de communications aussi importants pouvaient eux aussi brancher le client et leur offrir un service identique et moins cher.

Facebook, Google, Amazon et d’autres sont sans doute parfaitement capables de devenir des banquiers aussi efficaces et presque plus séduisants que les banquiers traditionnels. Tout cela dans un univers où les taux d’intérêt sont presque à zéro et ils le sont durablement. Or le taux d’intérêt pour un banquier, c’est l’élément clef de son business. Le taux d’intérêt lui permet d’intéresser son client, l’épargnant comme l’emprunteur. Le taux d’intérêt lui permet aussi de fabriquer de la marge.

Depuis presque dix ans maintenant, les banquiers laminés par la concurrence du digital ne fabriquent plus de marge, donc très peu de valeur.

Tout leur problème est de définir des nouveaux métiers, sur des nouveaux marchés avec des nouvelles stratégies.

Les banques tiennent debout aujourd’hui parce qu’elles gèrent les dettes d’Etat et que la banque centrale recycle les vieilles créances mais c’est une activité peu profitable et génératrice de crise. Le nerf de la guerre, c’est le financement de l’industrie et la gestion des finances personnelles. Des segments qui sont captés de plus en plus par de nouveaux acteurs.

Le résultat, c’est que le secteur de la banque s’apprête à vivre ce que la sidérurgie européenne a vécu à la fin du siècle dernier.

Ce qui se passe chez HSBC est prémonitoire. Elle commence par tailler dans ses effectifs en en supprimant 15% dans les deux ans pour réduire ses coûts de fonctionnement de 4,5 milliards de dollars par an. Il n’y a pas si longtemps, la Deutsche Bank annonçait près de 20 000 suppressions d’emplois. Ne parlons pas des banques espagnoles qui sont sponsorisées par les régions. Quant aux banques italiennes, elles sont quasiment sous perfusion de la banque centrale européenne. Et tout le monde s’interroge pour savoir si Mme Lagarde aura les mêmes attentions que celles que Mario Draghi, son prédécesseur, leur prodiguait.

Ces problèmes structurels de la banque sont systémiques. Ils affectent l’équilibre de toute l’économie européenne. Ils posent évidemment deux questions auxquelles il faudra trouver des solutions ;

Une question sociale très grave mais soluble. Les suppressions d’emplois liées à la modernité digitale en général, vont affecter des personnels plutôt formés et jeunes  qui peuvent donc se reconvertir dans d’autres activités. Selon une étude très récente réalisée par Willis Towers Watson, l’un des plus grands cabinets de conseil de courtage et de solutions logicielles au monde, 4 salariés sur 10 sont très inquiets des progrès de la robotisation pour leur emploi... Mais ils sont prêts à investir dans de nouvelles compétences. Cette étude confirme que

-89% des organisations automatiseront certaines tâches dans les trois ans à venir 

- 26% du travail effectué par un salarié le sera par un robot dans les trois prochaines années 

- 2 travailleurs sur 5 estiment que leur emploi pourrait être automatisé d’ici dix ans 

- C’est pourquoi, 65% d’entre-deux sont disposés à investir dans le développement de leurs compétences.

On sait donc qu’il y a des solutions dans le système de formation notamment qui peut répondre à une telle mutation. C’est l’objet de la loi formation votée en France mais qui n’est rien d’autre que le rattrapage d’un retard que nous avons pris.

La deuxième question est plus politique. La banque est au cœur du système de confiance dans le fonctionnement de l’économie. C’est la raison pour laquelle au lendemain de la crise de 2008, tous les gouvernements ont renforcé les conditions de garanties de fonctionnement des institutions financières et de solvabilité. Tous les gouvernements l’ont fait, à l’exception du gouvernement américain. Le résultat est que les banques européennes sont sans doute les plus sécurisées du monde, mais ce sont aussi les moins performantes puisque la sécurité limite par définition leur liberté de prendre des risques. Elles se sont donc laissées dépasser par les banques américaines et sont devenues plus vulnérables à la concurrence des nouveaux entrants. Ajoutons à cela que le secteur est systémique. La crise de 2008 a démarré aux Etats-Unis par la faillite d’une grande banque de New-York. La banque européenne est protégée, mais elle reste menacée par ses propres faiblesses internes ( l’Italie par exemple ). Elle reste menacée par le dérapage non contrôlée d’une banque américaine ou même chinoise.

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