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L’Europe, bientôt dindon de la farce de la trêve commerciale entre Chine et États-Unis
©NICOLAS ASFOURI / AFP

Fin du bras de fer

Après les craintes d'une guerre commerciale, le gouvernement chinois a finalement décidé de baisser drastiquement ses droits de douane sur les produits américains. L'Europe a-t-elle encore son mot à dire ?

Emmanuel Lincot

Emmanuel Lincot

Professeur à l'Institut Catholique de Paris, sinologue, Emmanuel Lincot est Chercheur-associé à l'Iris. Son dernier ouvrage « Le Très Grand Jeu : l’Asie centrale face à Pékin » est publié aux éditions du Cerf.

 

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Atlantico.fr : Le gouvernement chinois a décidé de baisser de moitié ses droits de douane (un total de 75 milliards de dollars) sur les produits américains, mettant de côté leurs inimitiés et marquant une trêve dans la guerre commerciale qui divise les deux puissances.

Qu'attendre concrètement de cette trêve ? Est-ce un jeu à somme positive pour les deux pays ? L'un des deux peut-il en bénéficier plus que l'autre ?

Emmanuel Lincot : c'est une victoire essentiellement électoraliste pour Donald Trump. La guerre commerciale n’est pas un sujet. Le déficit commercial de 500 milliards de dollars des États-Unis avec la Chine bénéficie pour moitié à des sociétés américaines. Quand un iPhone est vendu par la Chine en Amérique, seuls 7 % de la valeur ajoutée sont réalisés en Chine. Les milliards qui restent vont chez Apple. La véritable guerre est technologique et elle va durer. Aujourd’hui, l’Amérique cible Huawei car c’est la seule entreprise qui la concurrence vraiment. Dans les autres secteurs, les États-Unis ont beaucoup d’avance. Les Chinois veulent attirer des ­investissements étrangers mais aussi des techno­logies, d’où l’attrait de celles venant d’Europe. 

Qu'en est-il de l'Europe dans tout cela ? A-t-elle encore son mot à dire ou va-t-elle être mise de côté dans cette "nouvelle amitié" entre la Chine et les Etats-Unis ?

Thales sur la smart city, Legrand sur les objets connectés, ont beaucoup à apporter. Les entreprises chinoises le savent. L'avenir est à l'industrie connectée. Les Smart Cities dans la région des perles, située au sud de la Chine, est en cela un laboratoire et une opportunité pour les entreprises européennes, françaises en particulier. Clairement, le déficit de notre efficacité politique ne nous permettra pas à nous Européens de rivaliser avec les géants du net qu'ils soient Chinois ou Américains à moins que nous travaillions pour les deux. Mais le risque dans la guerre ­technologique des deux superpuissances comme le rappelait récemment David Baverez, c’est de devenir leur Yémen, c’est-à-dire l’endroit où l’Iran et l’Arabie saoudite se font la guerre, en dehors de chez eux. 

Cette trêve entre les deux pays est-elle durable ? L'Europe peut-elle en profiter ou est-elle déjà trop en retard ?

Les États-Unis font l’impasse sur les industries du XXIe siècle liées à l’environnement. Cela nous ouvre une opportunité fantastique, donc il faut nous lancer. Il faut aussi taper du poing sur la table et exiger des Chinois qu’ils ouvrent leur marché. Enfin, il faut savoir jouer de la concurrence entre Chinois. La Chine divise l’Europe tous les jours, il faut diviser à notre tour la Chine mais aussi les Etats-Unis. La crise du coronavirus en Chine va de surcroît rabattre les cartes. A nous de saisir les opportunités qui vont en découler.

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