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Post réveillons : non, les régimes (ou les aliments) detox n’existent pas. Mais le jeûne intermittent, si
©Reuters

Repas d’abondance, et après ?

Après les fêtes, si vous souhaitez perdre du poids, pensez au régime intermittent.

Guy-André Pelouze

Guy-André Pelouze

Guy-André Pelouze est chirurgien à Perpignan.

Passionné par les avancées extraordinaires de sa spécialité depuis un demi siècle, il est resté très attentif aux conditions d'exercice et à l'évolution du système qui conditionnent la qualité des soins.

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Il faut quand même le rappeler il n'y a pas de régime détox, pas de jus détox, pas de tisane détox car votre alimentation n’est pas toxique. Quand elle l’est, la plupart du temps par la présence de micro-organismes qui peuvent produire une toxine c’est une intoxication alimentaire qui se déclenche, avec parfois une hospitalisation et c’est grave. Dans ce cas, pour détruire les norovirus, les Campylobacter, Salmonelles, E.Coli et autres Listeria il faut, quand il existe, un traitement anti-infectieux. Il n’y a pas de régime purge non plus car il faut y penser avant de laisser votre estomac se vider dans l'intestin, les Romains le savaient. Alors les à peu près 281 000 000 résultats (0,45 secondes) obtenus pas le moteur de recherche Google à partir de “détox” sont du vent? Probablement. Ce business du détox, pour cyclique qu’il soit, est fascinant car il n’est assis que sur des manipulations, de la culpabilité et des fausses informations. Peut on y voir plus clair rationnellement?

Toxique: le mot sous entendu qui fait peur et “détox” celui qui fait vendre

Les aliments consommés par les français lors des repas de Noël ou du réveillon du jour de l’An se caractérisent par leur quantité et aussi leur caractère inhabituel. Les aliments achetés par les français pendant cette période sont souvent de qualité supérieure et ils sont écoulés rapidement ce qui aurait plutôt tendance à diminuer le risque de contamination bactérienne et de toxicité. L’alcool en revanche est toxique et de ce fait il est métabolisé par le foie. La charge calorique est aussi gérée par le foie en fonction des nutriments absorbés et des signaux hormonaux déclenchés par leur concentration dans le sang. Le principal signal est envoyé par la glycémie qui entraînera à la hausse la sécrétion d’insuline et stoppera toute sécrétion du glucagon. En fonction de ces données métaboliques (excès d’apports caloriques par rapport aux dépenses, prédominance des sucres, apports en nutriments essentiels satisfaisants), le foie va schématiquement stocker le maximum de calories en transformant les sucres en triglycérides et les graisses XXXX en et envoyer ces stocks de calories vers le tissu adipeux. Il n’y a donc aucune “toxicité” mais au contraire une période favorable d’alimentation abondante et riche qui est une information que notre physiologie traduit par: moment privilégié de stockage pour des restrictions voire des famines à venir. C’est ce qui nous a permis de survivre. Rien ne va plus depuis que nous avons changé la suite inéluctable des événements passés avec l’industrialisation et l’économie de marché. La pénurie alimentaire ne survient plus. Le défi est bien de gérer l’abondance, l’excès et non pas de lutter pour détoxiquer.

Cette semaine le prestigieux New England Journal of Medicine nous fait un cadeau: une explication par le menu du jeune intermittent et de ses avantages.

Depuis longtemps des travaux sérieux ont démontré que chez l’animal et chez l’homme la restriction calorique prolonge la vie et diminue le risque de maladie chronique dégénérative. Trop de calories nuit à la vie. En réalité, et là c’est à l’envers du dogme académique, le conseil de ne pas sauter de repas n’a aucune base scientifique, exactement comme celui de manger équilibré… Le deuxième pilier solide du jeune sur le plan scientifique c’est le caractère intermittent. Nul besoin de faire des jeûnes prolongés car le risque d’entamer sa masse musculaire est réel, et surtout il s’agit d’adopter un mode de vie où le jeune a une place toute l’année.

Comment en est on arrivé à découvrir les multiples avantages du jeûne intermittent?

Il y a les faits concernant l’obésité.

Figure N°2 : la fin d’un mythe, l’obésité croit en France au même rythme qu’ailleurs. Même tendance, mêmes causes? 

Ensuite il y a la chaine des complications.  Un sujet omniprésent en physiologie humaine et singulièrement dans les études sur le vieillissement depuis cette épidémie d'obésité, de syndrome métabolique et de diabète type 2. Certes l’excès calorique fait grossir. Mais comment cet apport alimentaire excessif conduit aux complications dégénératives suivantes:

  • Foie stéatosique non alcoolique

  • obésité centrale: le taux d'obésité en France a doublé entre 1995 et 2004 (à 11,3% de la population).

  • Insulinorésistance

  • Diabète type 2 avec ses différentes complications qui ne sont que des processus d’accélération du vieillissement au niveau de l’oeil, du rein, des artères et du cerveau. 

Essentiellement en raison de conséquences sous estimées qui associent:

-un état inflammatoire chronique qui trouve son départ au niveau du tissu adipeux hypertrophié mais aussi à cause de l’hyperglycémie systémique

-une déviation métabolique permanente conduisant à l’utilisation exclusive des sucres comme source d’énergie dans les tissus et à l’insulino-résistance puis progressivement à l’épuisement de la sécrétion d’insuline. 

-le métabolisme particulier de certains sucres comme le fructose qui s’accumule dans le foie et le galactose très oxydatif, associé aux maladies cardiovasculaires.

-d’autres conséquences aggravantes liées au déséquilibre des acides gras poly-insaturés

Ensuite il y a les études cliniques. Nous avons rapporté dans ce même journal l’absence de signification des études observationnelles. Dans le jeûne intermittent plusieurs essais randomisés ont été effectués et en général ignorés dans la presse. Cet essai en particulier a mis en évidence la bonne tolérance du jeûne intermittent et l’amélioration des paramètres suivants:

  • meilleure sensibilité à l’insuline

  • Amélioration de la fonction pancréatique de sécrétion d’insuline

  • diminution de la pression artérielle

  • diminution de l'appétit.

En alternant les périodes de jeûne ces études ont révélé qu'une ancienne adaptation humaine à la pénurie alimentaire est relancée et que les cellules commencent à convertir les graisses en énergie - un changement qui n'est jamais déclenché par le régime des trois repas par jour et de l'alimentation “équilibrée”.

Le jeûne intermittent stoppe l’ingestion du glucose alimentaire comme source d’énergie et peut déclencher la production de corps cétoniques

Le sucre dont les amidons ne représentent pas des aliments essentiels. On doit ingérer des acides gras essentiels (oméga 3 et oméga 6), on doit avoir un apport en acides aminés des protéines, on doit absorber des vitamines et quelques micronutriments essentiels,  mais il n’y a pas d’apport minimal vis à vis du glucose ou d’aucun autre sucre. Pourquoi? Notre foie est capable de transformer les sucres en triglycérides, cela est maintenant bien connu par le public. Mais notre foie peut aussi fonctionner dans l’autre sens et fabriquer du glucose et des corps cétoniques qui sont utilisés pour produire de l’énergie. La gluconéogenèse se produit dans le foie et les reins. La gluconéogenèse répond aux besoins en glucose plasmatique entre les repas. Elle est stimulée par les hormones diabétogènes (glucagon, hormone de croissance, épinéphrine et cortisol). Les substrats gluconéogènes comprennent le glycérol, le lactate, le propionate et certains acides aminés. C’est la voie métabolique du jeune qui prive l’organisme de nouvelles calories qui permet de gérer les excès de stockage des périodes d’abondance alimentaire qui n’en finissent pas…

Le jeûne intermittent est adapté à notre physiologie et il permet d'avoir des apports essentiels largement suffisants à quelques conditions près

Il est essentiel pour maintenir une santé cellulaire de pratiquer ce jeûne intermittent dans le cadre d’une alimentation sans produits transformés et avec un maximum de repas préparés chez soi à partir d’aliments entiers achetés crus ou congelés. Ainsi après le jeûne vous récupérez les micronutriments qui font défaut aux produits industriels qui prétendent vous permettre de faire un régime cétogène ou bien les préparations très transformées que donnent certaines listes de recettes dites “cétogènes”.

En réalité nous pratiquons le jeûne intermittent aléatoire depuis les débuts de l’humanité. La figure N°1 de l’article en question permet de comprendre l’intérêt du jeune. Il y a d’abord la production d’énergie sans sucre alimentaire. La restriction calorique envoie un signal fort qui permet au tissu adipeux de faire circuler des acides gras libres dans le sang (dénommés FFA). C’est la flèche qui part des adipocytes en jaune en bas de la figure. Ensuite le foie privé de calories alimentaires produit du glucose à partir de son stock de glycogène puis au terme commence à convertir des acides gras en corps cétoniques ou bien à produire de l’énergie en utilisant les acides gras libres liés au Coenzyme A dans ce que l’on appelle le cycle de Krebs dans la mitochondrie. Tous ces substrats peuvent être utilisés par les cellules de l'organisme dans le coeur, le cerveau les muscles striés et autres. Ensuite d’autres signalements complexes interviennent lors du jeûne et contribuent à de meilleures défenses immunitaires, une réparation plus rapide des plaies et une résistance supérieure au stress.

Pour autant la réponse au jeûne même intermittent est très variable comme pour toute modification alimentaire. C’est pourquoi il ne s’adresse pas en particulier à ceux qui prennent des médicaments hypoglycémiants ou ont recours à l’insuline. 

Figure N°1: La restriction énergétique pendant 10 à 14 heures ou plus entraîne une diminution des réserves de glycogène hépatique et une hydrolyse des triglycérides (TG) en acides gras libres (AGL) dans les adipocytes. Les AGL libérés dans la circulation sont transportés dans les hépatocytes, où ils produisent les corps cétoniques acétoacétate et β-hydroxybutyrate (β-HB). Les AGL activent également les facteurs de transcription, le récepteur α activé par les proliférateurs des peroxysomes (PPAR-α) et l'activation du facteur de transcription 4 (ATF4), ce qui entraîne la production et la libération du facteur de croissance des fibroblastes 21 (FGF21), une protéine ayant des effets généralisés sur les cellules de la corps et cerveau. La β-HB et l'acétoacétate sont activement transportés dans les cellules où ils peuvent être métabolisés en acétyl CoA, qui entre dans le cycle de l'acide tricarboxylique (TCA) et génère de l'ATP. La β-HB a également des fonctions de signalisation, notamment l'activation de facteurs de transcription tels que la protéine de liaison des éléments de réponse AMP cyclique (CREB) et le facteur nucléaire κB (NF-κB) et l'expression du facteur neurotrophique dérivé du cerveau (BDNF) dans les neurones. Des niveaux réduits de glucose et d'acides aminés pendant le jeûne entraînent une activité réduite de la voie mTOR et une régulation positive de l'autophagie. De plus, la restriction énergétique stimule la biogenèse mitochondriale et le découplage mitochondrial

Les repas après le jeûne intermittent

L'objectif principal et de conserver des apports en sucres bas. Le deuxième objectif est de choisir des aliments goûteux, rassasiants, soit par nature soit par préparation. L’inventivité culinaire est infinie. Surtout dans un pays de grande diversité alimentaire. 

Le jeûne intermittent est économiquement avantageux, sans effets secondaires adverses et scientifiquement efficace

Pendant les périodes d’alimentation normale vous pouvez consacrer plus de ressources à des aliments très qualitatifs. Ensuite vous êtes sûr de faire d’une pierre deux coups: 

  • laisser votre tube digestif se reposer

  • investir dans l’avenir c’est à dire la restriction calorique qui vous préservera des maladies chroniques et pourrait allonger votre vie.

En revanche le jeune ne s’adresse pas à ceux qui prennent des médicaments hypoglycémiants ou ont recours à l’insuline.


Jeûne intermittent : mode d’emploi

Stopper l’apport calorique pendant 10 à 14 heures 

Boire de l’eau, du thé, du café, des décoctions avec un minimum de 20 ml/kg/24h sans compter l'hydratation per ou post exercice. Sans ajout de sucre, miel, crème ou lait.

Mener une vie normale y compris l’activité physique

Reprise de l’alimentation avec peu de sucres (un fruit frais), des aliments goûteux et rassasiants ad libitum

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