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BCE :  l’opposition au vitriol contre Christine Lagarde se manifeste déjà dans les milieux d’affaires européens
©JOHN THYS / AFP

Atlantico Business

Christine Lagarde, qui va prendre la présidence de la BCE le 1er novembre, va se retrouver face à une opposition qui s’organise autour d’anciens membres du conseil de la BCE alliés à des présidents de grandes banques centrales européennes.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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La personne de Christine Lagarde n’est pas en cause, c’est la politique qu‘elle promet d’appliquer qui est visée. L’agence Bloomberg a publié un document d’une violence rare, qui fait le procès de la politique monétaire menée par Mario Draghi. Ce document est signé par un groupe d’anciens dirigeants de banques centrales européennes, en majorité de l’Europe du Nord et qui appartiennent ce qu’on appelle, à Francfort, le clan des faucons.

Alors, ce groupe est proche de Jens Weismann, l’actuel patron de la Bundesbank ou de Klass Knot, le gouverneur de la banque des Pays-Bas, mais on y trouve aussi Otmar Issing, économiste de l’Institut monétaire et Jürgen Stark, allemand lui aussi, qui avait démissionné avec fracas du conseil de la Banque centrale européennes en 2011. Parmi les signataires, les anciens patrons des banques d’Autriche et des Pays-Bas, mais aussi Hervé Hannoun, ex sous-gouverneur de la banque de France et qui a souvent dénoncé les incohérences de la politique européenne, mais qui avait aussi au moment des élections, instruit un procès contre l'Otan.

A noter, que la tribune Bloomberg est également soutenue par Jacques de La Rosière qui fut à la tête de la Banque de France.

Ce clan de personnalités, qui n’avaient jusqu'à maintenant pas exprimé de façon spectaculaire et publique leur opposition, se sont décidés à sortir du bois après les premières déclarations de Mme Lagarde. Déclarations très politiquement correctes qui confirmaient sa volonté de poursuivre la politique monétaire menée par Mario Draghi, compte tenues des incertitudes qui continuent de peser sur la croissance mondiale et européenne.

Ça n’est donc pas la personnalité de Christine Lagarde qui les gène, mais on devine qu’ils auraient souhaité un profil d’économiste plus affûté. Les éloges dont a bénéficié l’ancienne dirigeante du FMI, sur son talent de communicante, son habileté politique, à trouver des compromis, son génie à  savoir s’entourer, sa parfaite maîtrise de la langue anglaise et la richesse de son carnet d’adresses mondiales... Tout cela ne fait que souligner le déficit d'une expérience de banquière et surtout déficit de l'expertise d’économiste académique. Bonjour l'hypocrisie !

Mais au-delà, c’est donc la politique qu’elle conduira dans la ligne de celle de Mario Draghi dont ce groupe fait le procès public. La charge est au vitriol.

1er point : ils considèrent que Mario Draghi s’est fourvoyé en installant sur le long terme une politique accommodante, non conventionnelle, avec une abondance de liquidités à destination des banques, parce que les résultats promis ne sont pas au rendez-vous .

2e point : ils expliquent que les objectifs réels poursuivis par Mario Draghi et la BCE ne sont pas ceux qui ont été annoncés. La politique monétaire de taux d’intérêt négatifs n’a pas engendré le retour de l’inflation, comme voulu. De plus, ils prétendent que la politique de la Banque centrale qui consiste à racheter des dettes d’Etats en contrepartie des liquidités émises, est contraire aux traités de l’Union européenne... Parce que cette politique monétaire a permis aux Etats de financer les dépenses budgétaires et gouvernementales par la politique monétaire, et non pas par des recettes propres à l’impôt.

3e point : ils soupçonnent que derrière cette politique monétaire se cache en réalité la volonté de protéger les gouvernements lourdement endettés d’une hausse des taux.

Le soupçon n’est pas infondé quand on sait que beaucoup d’Etats (et notamment la France ou l’Italie) seraient en grande difficulté si jamais les taux d’intérêt augmentaient. L’endettement français dépasse désormais les 100% du PIB.

Les signataires de cette tribune en tirent la conclusion que Mario Draghi n’a donc rien fait pour inciter les gouvernements à mieux gérer leurs finances publiques et réduire leurs dépenses sociales et publiques.

En clair, et ça s’adresse évidemment à Mme Lagarde, la politique monétaire que la nouvelle présidente de la BCE va incarner ne permet pas de soutenir l'activité économique des entreprises, ne permet pas d’autoriser les banques à prendre des risques pour l'investissement, et finalement encourage les Etats et les gouvernements au laxisme budgétaire.

On ne peut guère être plus sévère, clair et net.

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