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Petite réflexion sur la richesse dans le monde capitaliste
©MATTHIEU ALEXANDRE / AFP

Possession(s)

Laurent Alexandre a été critiqué pour sa tribune qui prétendait que Louis XIV vivait moins bien qu'un ouvrier. La polémique passe à côté du sujet.

Ferghane Azihari

Ferghane Azihari

Ferghane Azihari est journaliste et analyste indépendant spécialisé dans les politiques publiques. Il est membre du réseau European students for Liberty et Young Voices, et collabore régulièrement avec divers médias et think tanks libéraux français et américains.

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Atlantico.fr : Les critiques du capitalisme reposent souvent sur une mauvaise compréhension de ce qu'est la richesse. Quelle bonne définition donner à la richesse de pays "riches" ?

Ferghane Azihari : Dès qu'on entend "richesse", la première chose à laquelle on pense est le revenu ou la valeur d'un patrimoine. Cette définition est confortée par le récit redistributif socialiste qui narre qu'il suffit d'équilibrer les portefeuilles et les comptes en banque des uns et des autres pour lutter contre la pauvreté. "Taxer les riches", c'est taxer les revenus ou les patrimoines. Et lutter contre la pauvreté, c'est faire un chèque aux pauvres. Cette conception simpliste et monétaire de la richesse et de la pauvreté est assez vieille. Ses origines remontent au moins au 16ème siècle avec les théories mercantilistes, qui estimaient que l'enrichissement d'un pays se constatait grâce à l'accumulation de métaux précieux. On a du mal à comprendre que la monnaie n'est qu'un instrument. Un moyen de se procurer des biens et des services de qualité pour satisfaire nos besoins insatiables : se nourrir, se loger, se vêtir, communier, se transporter, se soigner. C'est donc ces biens et ces services qui constituent ce qu'on pourrait appeler la richesse d'une nation.

Ce qu'on appelle plus communément la richesse, c'est-à-dire un ensemble d'actifs financiers plus ou moins liquides, n'est donc pas une richesse à proprement parler ? Pourquoi une telle divergence entre l'opinion courante et la définition économique ? 

Si les capacités productives du pays dans lequel vous vivez sont nulles, alors votre argent ne vous sert pas à grand chose. En ce sens, la tribune de Laurent Alexandre dans l'Express rappelant que Louis XIV était plus pauvre que les humbles citoyens que nous sommes était tout à fait pertinente. Le Roi-Soleil avait beau avoir beaucoup d'argent et beaucoup de patrimoine, il y a fort à parier que sa vie était moins confortable que la notre sur bien des plans, notamment ceux de l'hygiène et de la santé. Outre les biens et les services disponibles, on peut aussi rappeler que l'enrichissement peut s'évaluer en fonction du temps de travail nécessaire à leur acquisition. Dans un essai publié en 2010, l'essayiste britannique Matt Ridley donnait des chiffres intéressants en la matière. En 1800, il fallait travailler une heure pour obtenir 10 minutes de lumière artificielle. Aujourd'hui, cette même erreur de travail permet d'acheter 300 jours de lumière. Cette tendance - qu'on peut appliquer à d'autres industries - illustre à merveille l'enrichissement de nos sociétés depuis 2 siècles. On la retrouve bien sûr principalement dans les pays capitalistes. En 1870, les Européens devaient travailler plus de 3000 heures par en moyenne pour s'offrir le niveau de vie du XIXème siècle. Aujourd'hui, ils peuvent se permettre de travailler 1500 heures pour le niveau de vie du XXIème siècle. S'il fallait choisir un slogan pour désigner le capitalisme, ce serait " travailler moins pour gagner plus".

Pourquoi la définition de la richesse d'une nation par sa capacité productive et industrielle ne fait plus consensus ? 

Pendant longtemps, les libéraux et les marxistes partageaient le même critère d'évaluation pour juger la désirabilité d'une organisation politique et économique : sa capacité à sécuriser l'abondance de biens et de services nécessaires au bien-être des populations. Ce consensus est brisé par l'irruption des idéologies décroissantes qui voient dans la sanctification d'une nature sauvage le nouvel alibi destiné à légitimer leur aigreur contre les sociétés marchandes fondées sur le vice de l'appât du gain. Les anti-capitalistes nous promettaient à tous une vie de châtelain. C'est désormais à la vie monacale qu'ils nous assignent au nom d'un prétendu risque environnemental que les sociétés industrielles seraient incapables de maîtriser. Or toute la littérature économique montre au contraire que les sociétés développées sont les plus résiliantes face aux risques environnementaux et climatiques. Mais cela importe peu aux yeux d'un certain nombre d'enfants gâtés qui se plaisent à conspuer la civilisation industrielle pour compenser l'ennui paisible de leur vie bourgeoise en fantasmant sur les prétendues vertus de la vie sauvage. On peut y voir une sorte de résurgence du mythe rousseauiste du bon sauvage. Un éternel fantasme doté d'un grand pouvoir de séduction, du moins en théorie...En pratique, il est courant de voir les déshérités issus des régions les plus «sobres et vertueuses» de la planète risquer leur vie pour rejoindre les civilisations corrompues par l'opulence. L'inverse est un peu plus rare…

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