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Adroits et à droite : le visage de la génération des jeunes LR
©Sebastien SALOM-GOMIS / AFP

Avenir de la droite

Le Campus national des Jeunes Républicains du Touquet débute ce vendredi et se poursuit ce week-end. La jeunesse de droite semble être en rupture avec les leaders d'une autre génération.

Olivier Gracia

Olivier Gracia

Essayiste, diplômé de Sciences Po, il a débuté sa carrière au cœur du pouvoir législatif et administratif avant de se tourner vers l'univers des start-up. Il a coécrit avec Dimitri Casali L’histoire se répète toujours deux fois (Larousse, 2017).

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Geoffroy Lejeune

Geoffroy Lejeune

Geoffroy Lejeune est un journaliste français. Il est le directeur de la rédaction du magazine Valeurs actuelles depuis 2016.

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Atlantico.fr :  Le campus national du Touquet des jeunes LR commence aujourd'hui et va se poursuivre tout le week-end. La jeunesse de droite semble être s'éloigner idéologiquement de ses aînés. Entre les idées d'un Erik Tegnér, ou celles d'Aurélien Pradié, diriez-vous que la jeunesse de droite est en rupture avec les leaders qui viennent d'une autre génération ? Sur quels points en particulier ? 

Olivier Gracia : La question générationnelle n'a jamais été un problème pour la jeunesse de droite. Ce n'est pas une rupture générationnelle mais une rupture pragmatique dans le sens où lorsque la jeunesse de droite ne trouve pas de leader à la hauteur de ce qu'elle ambitionne, elle est évidemment divisée. D'une part par une partie libérale réformiste qui se retrouve parfaitement dans Emmanuel Macron. On ne peut pas cacher qu'une partie de la jeunesse de droite apprécie et soutient le quinquennat Macron. D'autre part, une jeunesse de droite toujours fidèle au parti Les Républicains qui reste minoritaire, à savoir quelle qu'en soit l'incarnation du leader. Puis une jeunesse de droite également plus identitaire qui a pu rejoindre les rangs du Rassemblement national même si cela reste relativement marginal. 

Aujourd'hui, il y a une jeunesse de droite complètement éclatée et finalement cela a toujours existé dans le sens où l'image de la droite n'a jamais été une seule et même droite. Il y a toujours eu des courants de pensée mais malheureusement pour la jeunesse de droite, il n'existe pas à ce jour de leader comme Nicolas Sarkozy l'avait été en 2007, capable de réconcilier toutes les opinions. Cela est précisément intéressant avec la droite en France, à partir du moment où la droite se dote d'un chef, quelles qu'en soient ses préférences, ses orientations idéologiques. Si ce chef a l'autorité nécessaire et suffisante et l'incarnation individuelle charismatique, il est capable de faire taire les divergences idéologiques et de faire naître un seul et même objectif. Cela a été le cas de Nicolas Sarkozy en 2007. Aujourd'hui, depuis Nicolas Sarkozy, tous les patrons de la droite ont échoué à cette mission qui consistait à rassembler au-delà des clivages de la droite. 

On en revient à cette question : ce n'est pas idéologique, ce n'est pas rationnel mais cela est une question individuelle et une question de chef. Tant que la droite n'aura pas un chef digne de ce nom, elle sera éclatée plus que jamais. Les jeunes républicains sont évidemment tous dans l'attente. Il est tout à fait possible que des républicains qui avaient déserté pour le parti macronien, l'aile gauche des LR ou pour le parti de Marine Le Pen, son aile droite, reviennent aux Républicains parce qu'ils y trouveraient le sens de leur engagement. A ce jour, la jeune droite ne peut pas s'identifier à un parti sans chef et marginalement sans idéologie non plus. Il est très compliqué depuis le départ de Laurent Wauquiez de mettre un marqueur idéologique clair Les Républicains. D'autant plus que les candidats qui se présentent aujourd'hui à sa tête ne sont pas pour certains républicains des leaders capables de rassembler. 

Geoffroy Lejeune : Il faut déjà savoir de quoi on parle quand on aborde le thème de "jeunesse de droite". Par exemple, au sujet d'Erik Tegnér : lorsqu'il était candidat pour la présidence des jeunes Républicains, il avait organisé une soirée sur une péniche remplie de jeunes. Aujourd'hui, il est très compliqué de retrouver autant de jeunes dans un rassemblement républicain. La jeunesse de droite ne se retrouve a priori pas seulement dans les partis. Elle est un peu mouvante, hésite, et se sent chez elle dans tous les partis. Elle ne peut pas uniquement se réduire aux militants engagés qui collent des affiches etc. Il y a aussi une jeunesse militante  qui n'est pas encartée et qui compose le plus gros des troupes de cette jeunesse de droite. 

En revanche, de ce que j'en observe, elle est en effet extrêmement éloignée pour une raison simple : elle a été la spectatrice de l'échec de ses aînés. Aujourd'hui, un jeune de droite reproche à Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy et ceux qui arrivent juste après, Valérie Pécresse, Xavier Bertrand et Laurent Wauquiez, d'avoir gouverné la France pendant quinze ans sans avoir réussi à la changer. Cela vaut pour les questions régaliennes, c'est-à-dire les grandes promesses de Sarkozy sur l'insécurité, l'immigration, la progression de l'islam. Cela vaut aussi le reste pour les réformes économiques, les retraites, la dépense publique… 

La droite qui a gouverné depuis quinze ans a déçu son électorat, si bien que la jeunesse ne se reconnait pas dans des leaders décevants. Elle attend une plus grande radicalité dans les propositions et surtout une plus grande efficacité dans les actions. C'est d'ailleurs tout le défi des jeunes générations engagées politiquement à droite : retrouver la confiance de ces personnes-là qui ne le la leur accordent pas pour l'instant.  

Cette impression de rupture vient-elle d'un contrôle moins important, par les leaders de la droite, du recrutement des jeunes LR ? 

Olivier Gracia : Ce n'est pas qu'il y ait moins de contrôles. D'une part, je pense qu'il y a une baisse drastique du militantisme politique dans le sens où la jeunesse de droite ne peut pas se limiter à une jeunesse attitrée à un parti politique avec une carte d'adhérent. Emmanuel Macron a été le premier à faire ce diagnostic : de la désertion des partis traditionnels politiques et des systèmes politiques. Aujourd'hui, toute une jeunesse de droite n'est ni républicain, ni chez En Marche!, ni au Rassemblement national. C'est une désertion du travail et de l'appareil militant. La politique se conçoit autrement à ce jour que dans la sphère du militantisme. Elle se fait dans la sphère du privé, de la création d'entreprise, du think tank qui pullule partout. Il n'y a donc plus d'unité et d'endroit où la jeunesse se retrouve. Evidemment, les Républicains en perte de vitesse perdent aussi à l'évidence un nombre d'adhérents considérable. 

Geoffroy Lejeune : Quand Nicolas Sarkozy avait été candidat aux élections présidentielles, il y avait eu un boom de recrutements de jeunes venus faire cette campagne, qui étaient enthousiastes. Le phénomène que l'on peut observer est qu'il y a un tarissement de jeunes républicains ou de jeunes engagés à droite, en tous cas dans ce parti. Aujourd'hui, il y a de moins en moins de raisons  pour un jeune de droite d'adhérer à ce parti. La campagne pour la présidence des Républicains en ce moment donne assez peu de raisons à quelqu'un entre 18 et 25 ans de s'engager en politique et de tracter pour Christian Jacob. Il y a un phénomène de dégoût et de désintérêt massif qui se resserre de plus en plus sur son noyau sociologique, c'est-à-dire des personnes plus âgées, plus installées. Le Rassemblement national en revanche a beaucoup plus de militants jeunes. 

A l'époque au contraire, il y avait un phénomène d'adhésion de masse et zéro contrôle. Je ne crois pas qu'il y ait eu de processus de freinage de recrutement d'adhérents pour faire attention aux profils qu'ils avaient. Dans un mouvement de jeunes, on parle assez peu d'idéologie, c'est essentiellement le collectif, la combativité, le collage et le tractage. 

Y a-t-il une composante libérale dans cette jeunesse ? Qu'est-ce qui explique, selon vous, cette absence ?

Olivier Gracia : Bien sûr. Il existe une conjoncture libérale à l'évidence qui fait partie de la droite et de l'ADN en France. C'est lié à tout le travailleur qu'à entreprit l'extrême droite : une remise en question du libéralisme économique, une remise en question de la mondialisation avec un goût certain pour l'Etat providence interventionnel. Il y a alors toujours un marqueur libéral dans la jeunesse républicaine de droite mais une autre partie de ces jeunes se reconnaît davantage dans les vertus de l'Etat providence que dans le libéralisme tel qu'il est défendu par Emmanuel Macron. Les choses ne sont pas aussi simples. Cela reste à l'évidence le marqueur le plus fort de la droite parce que la valeur de liberté reste la valeur la plus forte de la construction de la droite en France ; le libéralisme étant un dérivé de la liberté. Quand on parle de libéralisme, il y a un peu deux modèles qui s'opposent.

Geoffroy Lejeune : La question économique n'est pas celle qui les intéresse le plus. J'observe d'après certaines de mes rencontres, que le vrai sens d'intérêt de la jeunesse est d'incarner une droite des valeurs qui ne renonce pas et surtout qui réussit à agir une fois au pouvoir. Le clivage économique arrive dans les têtes au moment où les jeunes commencent à payer des impôts, généralement vers 25 ans, ou lorsqu'ils commencent à travailler. Il y a sans doute une composante libérale, même si le message que j'entends le plus c'est que les jeunes sont des personnes qui s'engagent pour que la droite ressemble à la droite, qu'elle s'assume et qu'elle n'ait plus peur de la gauche et qu'elle incarnera des idées qu'elle mettra en place une fois au pouvoir. C'est cela qui motive vraiment à rejoindre le parti.   

Propos recueillis par Marianne Lecach

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