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Qui est Kristalina Georgieva, la candidate européenne à la succession de Christine Lagarde à la tête du FMI ?
©Brendan Smialowski / AFP

Parapluie Bulgare

Sa désignation comme candidate s'est fait dans la douleur pour l'UE.

Bruno Alomar

Bruno Alomar

Bruno Alomar, économiste, auteur de La Réforme ou l’insignifiance : 10 ans pour sauver l’Union européenne (Ed.Ecole de Guerre – 2018).

 
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Les européens ont décidé de présenter Kristalina Georgieva à la succession de Christine Lagarde à la tête du FMI. Est-ce un bon choix ?

Bruno Alomar : Sur la forme, observons d’abord que c’est un non choix, ou plus exactement un choix par défaut. Une fois de plus, après le roman feuilleton qu’a été la nomination de Mme Van der Leyen à la tête de la Commission européenne, les européens ont fait étalage de l’ampleur de leurs dissensions, qui augurent mal de l’évolution de l’Union européenne (UE) dans les années à venir. 

Sur le fond, les raisons pour lesquelles Mme Georgieva a été sélectionnée comme champion des européens sont, elles aussi, mauvaises. 

D’abord, comme pour la Commission européenne, il fallait, nous dit-on, absolument une femme. Non pas, évidemment, qu’il n’y ait pas de femmes extrêmement compétentes, ou que la compétence soit le monopole des hommes. Si le contraire était vrai, nous n’en serions pas là. Mais poser la question en ces termes, c’est sexualiser la politique, alors que le seul critère qui devrait entrer en ligne de compte, c’est évidemment la compétence. Imaginez-vous que Margaret Thatcher, Golda Meir, Loyola de Palacio ou Simone Veil aient été choisies sur ce critère ? 

Ensuite, il fallait mettre du baume au cœur des pays de l’Est européen, grands perdants des récentes nominations. La manœuvre est habile. Les pays de l’Ouest européen font semblant de faire un cadeau aux pays de l’Est européen avec lesquels ils sont en réalité en très forte opposition…en poussant la candidature d’une personne dont les convictions sont l’opposé de celles affichées par la plupart des gouvernements en Hongrie, Pologne etc.

Vous semblez considérer que le critère de compétence n’a pas été pris en compte au titre de cette nomination. 

Il a été pris en compte, mais comme un critère second, voire secondaire. Or, être directeur du FMI, comme d’ailleurs patron de la BCE, exige des connaissances économiques approfondies. Quand comprendra-t-on qu’une part essentielle des problèmes des institutions européennes, internationales et des gouvernements occidentaux est précisément que l’on croit, à tort, pouvoir confier des responsabilités importantes à des personnes – hommes ou femmes - qui ne connaissent pas ou mal les sujets qu’elles traitent ? Il y aurait beaucoup à dire sur Messieurs Draghi ou Strauss Khan : mais ils comprenaient les sujets complexes qu’ils traitaient. Ce ne sera pas le cas de Mme Georgeva, qui contrairement par exemple à Mme Lagarde, a étudié l’économie, mais n’a pas exercé de compétences économiques et financières importantes récemment.

Mais tout de même, ne serait-ce pas une bonne chose qu’un tel poste revienne, comme une tradition s’est établie à ce titre, aux européens, la banque mondiale restant, elle, dirigée par un Américain ? 

Vous touchez là un point tout à fait central, et qui est sans doute l’une des principales sources d’inquiétude. Il ne suffit pas d’être européen pour protéger les intérêts européens, à la tête d’une institution qui, tel le FMI est, rappelons-le, mondiale, et au sein de laquelle les instances dirigeantes doivent pour partie oublier leur origine. 

Dans le cas de Mme Georgeva, les choses sont assez claires. Pure politicienne, tout son parcours a consisté à servir le plus fort de ses maîtres. 

Née derrière le Rideau de Fer, elle fait partie de ces apparatchiks bulgares qui ont été formés par les soviétiques. Je rappelle que son premier diplôme est une maîtrise de politique économique et sociologie au Haut institut d'économie « Karl Marx ». Bien sûr, il y a des réalités qui s’imposent quand on est jeune, né(e) dans un pays que l’on n’a pas choisi. Ayant moi-même des liens forts avec la Bulgarie, je vous dirais juste que son surnom y est « Stalinka »…

Puis elle a poursuivi ses études et fait une partie essentielle de sa carrière aux Etats-Unis, pays pour lequel elle nourrit une affection et une admiration qu’elle n’a jamais démentie, pas même quand elle était commissaire européen où elle ne craignait pas, en cercle restreint, de dire combien l’Europe et l’UE lui semblaient étroites et médiocres comparées aux Etats-Unis. On comprend mieux que le Secrétaire d’Etat américain ait pris les devants pour indiquer que les Etats-Unis ne verraient pas d’obstacle à la modification statutaire de l’âge limite, pour le porter au-delà des 65 ans, ce qui constituait l’un des obstacles à la nomination de Mme Georgeva.

Tout de même, n’a-t-elle pas été Commissaire européen. Quel est son bilan ? 

Il est difficile à tirer, mais ne se distingue ni en bien ni en mal. C’était un Commissaire européen plutôt assidu, qui n’a pas à rougir de son bilan…dans deux Commissions (Barroso 2, puis Jean-Claude Juncker) qui n’ont pas particulièrement brillé. Comme Commissaire au budget aux ressources humaines, son deuxième portefeuille, l’une des reformes auxquelles elle tenait le plus, était l’ajout, sur les fiches de postes mis à la vacance au sein de la Commission, à coté de « he » (il) et « she » (elle), de « it » (neutre), afin que les personnes transgenres ne soient pas discriminées. Chacun ses priorités ! 

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