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La fête est finie :  les constructeurs automobiles obligés de tirer les leçons de la baisse importante de leurs ventes
©ERIC PIERMONT / AFP

Atlantico-Business

PSA a annoncé hier une baisse importante de ses ventes mondiales pour le premier semestre. Mais tous les constructeurs sont touchés. La Chine plombe l’activité. C’est grave, docteur ? Oui et il va falloir en tirer les leçons...

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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L’industrie automobile était portée depuis quatre ans par une telle euphorie que tous les experts finissaient par croire que les arbres du secteur pouvaient monter jusqu'au ciel. Les chiffres du 1er semestre de 2019 vont les ramener à la réalité. 

C’est le groupe PSA qui a dégainé le premier en annonçant au lendemain des fêtes du 14 juillet une baisse de 12,8% de ses ventes mondiales. Avec encore une très légère hausse en volume sur l’Europe (0,7%) mais un effondrement des ventes en Chine de 60%. 

Cela dit, au-delà des communiqués qui sont toujours tricotés de façon à ne pas dramatiser les marchés financiers, l’ensemble des constructeurs est pratiquement logé à la même enseigne. 

En juin, les seuls chiffres de ventes marquaient déjà un recul des immatriculations françaises de 8,4%. Alors les analystes maison avaient beau regretté que le mois de juin 2019 n’avait que 19 jours de ventes contre 21 l'année précédente, personne n’était dupe. Le marché était bel en bien en train de se renverser et quoi de plus normal, après des années euphoriques et une année 2018 de tous les records ?

Et ce renversement de cycle est entretenu par des vraies raisons qui vont obliger les constructeurs à accélérer des paris stratégiques.  

1ère raison, la conjoncture se tasse dans les pays développés et s’effondre en Chine. C’est vrai en Europe où, après 4 années de ventes exceptionnelles, le marché s’est un peu calmé. Les groupe PSA et Renault ont enregistré des baisses significatives. Sauf sur les quelques et rares nouveautés qui ont été dévoilées, les SUV notamment. Et parmi les grandes marques, il n’y a guère que les allemandes, Audi, Volkswagen, et Mercedes qui continuent d’enregistrer des augmentations de ventes. 

Mais c’est surtout la baisse du marché chinois qui a hypothéqué gravement le 1er semestre. Les ventes se sont effondrées de plus de 60% en Chine et en Asie du Sud-est pour Peugeot et de 68,3% en Afrique et au Moyen Orient. 

Au mois de juin, le marché chinois qui est devenu le premier marché mondial, celui dont la croissance était la plus rapide, a chuté de près de 10 % en un an. Ce qui a obligé les constructeurs à organiser des baisses de prix, donc à sacrifier les marges. Le gouvernement chinois lui-même en est arrivé à interdire aux autorités locales d’appliquer les interdictions à la circulation qui avaient été prises pour réduire les embouteillages et la pollution.

Sur les marchés occidentaux, il paraît évident qu’après les frénésies de renouvellement, le marché du neuf est proche de la saturation sur les gammes de voitures actuelles.

Cette conjoncture mondiale en voie de dépression est directement liée à la tentation du protectionnisme. Donald Trump travaille à la fin du multilatéralisme et au ralentissement du libre-échange. Donald Trump ne modifiera pas radicalement l'ordre du monde ? Cela dit, il va peser sur son évolution et ceux qui en pâtissent le plus sont les pays émergents, dont la Chine. Est-ce durable et tenable ? Donald Trump le pense, du moins jusqu'à sa réélection. Après ? On verra, c’est loin !

2e raison, la publication des nouvelles normes de pollution, la menace de nouvelles taxes sur l’énergie, la violence des gilets jaunes... Tout cela a sans doute troublé assez grandement les clients qui recherchent désormais la voiture idéale. Quelle puissance pour quel usage, quelle motorisation etc.? Un seul exemple, le débat entre la carburation essence, diesel ou électrique n’est pas tranché. Il n’y a pas de solution optimale. Pour beaucoup, les moteurs électriques paraissent offrir la meilleure solution pour éviter les émissions de CO2 certes, mais l’autonomie n’est pas garantie, les batteries ne sont pas fiables. Quant au diesel, si ce type de carburation émet plus de particules, tout le monde sait, qu’à kilométrage équivalent, la voiture diesel consomme beaucoup moins que la voiture essence. Bref, le client est perdu et passée l’ivresse des nouveautés, il en vient à suspendre ses décisions d’achat en attendant d’en savoir davantage. 

3e raison, la tendance au changement d’usage de la voiture est de plus en plus forte. L’automobiliste s’interroge sur le mode de carburation certes, mais au-delà, il s’interroge aussi sur l’usage même de la voiture. L’automobile est-elle encore l’outil capable de répondre au plus grand nombre d’usage ? La réponse est non, la voiture individuelle est difficile à utiliser dans les centres-villes et sur les longs trajets. La propriété même de la voiture est de plus en plus contestée. D’où les multiples formules que les consommateurs plébiscitent. La location longue durée, l’autopartage avec Blablacar, les VTC Uber etc. Toutes ces formules limitent de fait les ventes de voitures neuves, même si elles accélèrent le taux de rotation. 

Alors, face à ces changements d’ordre structurel, les constructeurs ne sont évidemment pas restés indifférents... Ils ont d’abord changé leurs stratégies commerciales en offrant le plus souvent des solutions de mobilité plus que la vente d’un outil à quatre roues. Mais le vrai changement appelle des investissements massifs. Il faut développer des innovations sur la batterie et la carburation qui entraineront de vraies ruptures et organiseront la baisse véritable des émissions de gaz à effets de serre au niveau mondial et macro-économique, ce qui n’est pas le cas actuellement. Les efforts consentis sur la voiture moderne ne sont pas suffisants pour compenser l’augmentation du nombre de voitures dans le monde. 

Les vrais changements commandent des innovations considérables en matière d’autonomie (voitures connectées et sans chauffeur). 

Par conséquent, ces changements vont encore provoquer des consolidations dans cette industrie afin d’atteindre des tailles qui puissent amortir les investissements. Le débat ouvert entre Renault-Nissan et Fiat s’inscrit dans cette nécessité. Mais PSA Peugeot Citroën n’est pas dispensé de cette réflexion. Les survivants mondiaux de cette nouvelle révolution automobile seront peu nombreux, mais capables de sortir plus de 15 millions de véhicules par an à partir de la même plateforme.

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