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Faut il faire revenir la Russie au conseil de l’Europe ?
©FREDERICK FLORIN / AFP

Aveu de faiblesse ou pragmatisme ?

Le Conseil de l’Europe s’apprête à lever ses sanctions contre la Russie et à rouvrir ses portes à Moscou. Une décision guidée par le pragmatisme mais qui ouvre certaines portes dangereuses.

Cyrille Bret

Cyrille Bret

Cyrille Bret enseigne à Sciences Po Paris.

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Atlantico : Quelles pourraient être les conséquences concrètes de cette réintégration de la Russie dans le Conseil de l'Europe ? La Russie a-t-elle souffert de cette exclusion ?

Cyrille Bret : L’Europe du Conseil de l’Europe n’est pas l’Europe de l’Union européenne. Le Conseil de l’Europe est une institution intergouvernementale bien distincte de l’Union européenne. C’est une organisation internationale classique, réunissant 47 Etats parties au Traité de Londres de 1949. Cette organisation a pour mission principale la promotion des droits de l’homme partout sur le continent, bien au-delà des frontières de l’Union.

Ainsi, la Convention Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) et la Cour Européenne des Droits de l’Homme sont les institutions les plus actives pour assurer cette mission. Ainsi, régulièrement, la Cour est saisie par des citoyens des 47 Etats du Conseil pour faire annuler des décisions attentatoires aux droits fondamentaux. En 2014, lors de la crise en Ukraine, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe avait sanctionné la Fédération de Russie, membre depuis 1996, en excluant la délégation des parlementaires russes de ses travaux.

Aujourd’hui, cinq ans après l’annexion de la Crimée, le Conseil de l’Europe vise la réintégration de la Russie dans le fonctionnement normal de ses institutions. Comment interpréter cette décision ? D’un côté, les avocats des droits de l’homme peuvent s’inquiéter : les sanctions sont levées sous l’influence d’Etats soutiens de la Russie et régulièrement condamnés par la Cour. Mais, d’un autre côté, c’est une bonne nouvelle pour les droits de l’homme. En effet, au moment où la lutte pour la liberté d’expression, de parole, etc. bat son plein en Russie, il est de la plus haute importance que les citoyens russes puissent compter sur le Conseil de l’Europe pour faire entendre leur voix.

Par son exclusion, l'Europe sanctionnait la Russie de l'annexion de la Crimée et de la guerre dans le Donbass. Alors que la Crimée reste russe et que la guerre fait toujours rage dans le Donbass, l'Europe ne fait-elle pas preuve de faiblesse en levant les sanctions sans contreparties ?

Encore une fois, l’Union européenne ne lève pas les sanctions. C’est le Conseil de l’Europe qui réintègre les parlementaires russes dans les institutions du Conseil de l’Europe. Toutefois, cela crée un précédent et sera mis en évidence par ceux qui, au sein de l’Union, militent pour le démantèlement des sanctions contre la Russie comme Matteo Salvini en Italie, Marine Le Pen en France, le FPÖ en Autriche…

Les Européens présentent-ils un front uni face à la Russie ? 

L’Union européenne n’a pas (encore) de « politique russe » à proprement parler. Certes, elle reconduit les sanctions économiques, financières, diplomatiques et consulaires envers la Fédération de Russie et certains de ses dirigeants. Mais, en Europe comme dans le Golfe, un arsenal de sanctions ne fait pas une ligne politique. Or, sans ligne politique, l’unité des Etats-membres de l’UE et des Européens en général est impossible. Les relations bilatérales avec la Russie ne sont pas toujours alignées avec les relations multilatérales avec elle. Ainsi, un Etat membre comme la Hongrie se dit régulièrement favorable à la levée des sanctions de l’UE envers la Russie. La proximité politique – relative – entre le Premier ministre Orban et le Président Poutine y contribue. En revanche, la Pologne et les Etats baltes, soucieux de préserver leur intégrité territoriale et inquiet de l’action de la Russie dans la zone en général et en Ukraine en particulier, sont sur une ligne dure envers la Russie. De même, la position de l’Allemagne est particulière : elle a soutenu le régime des sanctions depuis le début de la crise en Ukraine. Mais elle est dépendante de la Russie en énergie car elle a renoncé à l’atome. De sorte qu’elle soutient le projet de gazoduc Nord Stream 2, considéré comme attentatoire à la souveraineté de l’Europe par les Polonais et les Danois. La France elle-même est partagée entre le rapport de force et la normalisation avec Moscou.

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