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Une large étude de la Paris School of Economics montre que l’évaluation des professeurs, c’est bon pour les élèves. Et pour eux-mêmes
©PATRICK HERTZOG / AFP

Uberisation

L'évaluation des professeurs serait bonne pour les enseignants ainsi que pour les élèves, révèle une étude de la Paris School of Economics, se basant sur des statistiques de terrain.

Pierre Duriot

Pierre Duriot

Pierre Duriot est enseignant du primaire. Il s’est intéressé à la posture des enfants face au métier d’élève, a travaillé à la fois sur la prévention de la difficulté scolaire à l’école maternelle et sur les questions d’éducation, directement avec les familles. Pierre Duriot est Porte parole national du parti gaulliste : Rassemblement du Peuple Français.

Il est l'auteur de Ne portez pas son cartable (L'Harmattan, 2012) et de Comment l’éducation change la société (L’harmattan, 2013). Il a publié en septembre Haro sur un prof, du côté obscur de l'éducation (Godefroy de Bouillon, 2015).

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Atlantico : Les conclusions de cette étude, basées sur des statistiques de résultats d'élèves en classe de mathématiques montrent une hausse des résultats lorsqu'un professeur a été évalué et suivi sur plusieurs années. Comment analysez-vous ce résultat ?

Pierre Duriot : Oui, effectivement, la régularité des évaluations, qui sont aussi des moments de formation, est bonne pour la carrière, car les inspecteurs sont tenus par des règles administratives qui veulent qu'on n'ajoute à chaque fois ni trop ni trop peu de points à la note. Et des inspections régulières font monter la note et la maintiennent au niveau maximum, fonction de l'âge et de l'ancienneté du professeur, sachant qu'elle ne peut guère descendre et que déjà le maintien au niveau à l'issue d'une inspection est à considérer comme une sanction. Le demi-point de progression signe aussi une mauvaise évaluation. Et une note qui monte régulièrement, un contact périodique avec son inspecteur, ont un côté motivant pour le professeur qui va s'appliquer à maintenir une progression synonyme d'avancée de ses échelons et donc de son salaire.

 Que la qualité de sa pratique s'en ressente et les résultats des élèves également, tient donc d'une certaine logique. On peut y voir une différence avec d'autres professeurs qui pour des raisons diverses peuvent rester jusqu'à sept à huit années sans inspection dans un paysage où la moyenne devrait être de trois à quatre ans entre deux inspections.

La même méthode effectuée sur des enseignants en langue montre des résultats bien moins probants. Les mathématiques relèvent-elles selon vous d'un domaine particulier où l'évaluation de la méthode pédagogique peut améliorer plus concrètement l'enseignement ? Est-ce là la limite de l'évaluation au sens où l'entend cet article ?

D'une manière générale, l'inspection est aussi un moment de formation et l'inspecteur est donc également un formateur. Ancien professeur expérimenté lui-même, souvent ancien conseiller pédagogique, il est à même de compléter une formation initiale souvent peu dense et peu en rapport avec les réalités de terrain, bien que tout cela s'améliore bon an mal an. Les mathématiques, pour y revenir, sont une discipline très technique, très rigoureuse, laissant peut-être moins place à des pratiques personnelles hasardeuses ou des interprétations différentes d'un même contenu.

Il faut peut-être y voir aussi un profil psychologique et cognitif différent des professeurs de mathématiques qui n'ont effectivement, globalement, pas le même profil de personnes. Je ne crois pas que la régularité et la qualité du moment de formation de l'inspection soient les seul facteurs intervenant dans l'obtention des résultats auprès des élèves. Public d'élèves, qualité de l'équipe d'encadrement, interactions entre professeurs, sont des ingrédients important dans les résultats scolaires d'un établissement ou d'un secteur scolaire.

D'un point de vue plus général, l'évaluation des professeurs vous semble-t-elle aider ou non à l'amélioration de la pédagogie et des résultats des élèves ? Les résultats de l'étude montre une plus grande efficacité dans les zones d'éducation prioritaire. Comment analysez-vous cette différence ?

Plus que l'évaluation, l'inspecteur a aussi un rôle de formateur et de manager. A la suite de l'observation d'une séance de travail devant les élèves, l'inspecteur mène un entretien au cours duquel il a tout loisir de conseiller et de mettre l'accent sur des aspects du travail à améliorer dans une direction qu'il va impulser. Mais encore, l'inspecteur anime son secteur, lance des formations thématiques, propose des animations pédagogiques, se rend sur le terrain à l'occasion de problèmes et d'événements survenant dans les établissements scolaires. Non seulement l'évaluation permet l'amélioration générale de la qualité professionnelle des professeurs, mais les qualités de formateur et de manager de l'inspecteur lui-même se répercutent largement sur le niveau professionnel général et donc celui des élèves de son secteur.

Dans les zones prioritaires, le processus est connu, les problèmes sont nombreux et le travail collectif de terrain n'est pas une option, comme il peut l'être dans des terrains faciles ou ordinaires si tant est qu'il en existe encore, c'est une nécessité impérieuse. Dans ces zones prioritaires, les enseignants sont plus sur le terrain, jouent plus collectif, mènent souvent ce qu'on appelle des « analyses de pratiques », confrontent approches et méthodes à chaque problème, articulent leurs pédagogies plus qu'ailleurs, mènent des projets transversaux et la hiérarchie peut être amenée à plus de présence sur le terrain, dans un ensemble qui va tendre vers plus d'émulation et de formation.

Cela reste cependant tout relatif et très inégal, en fonction des terrains et des personnels. Si les professeurs ne sont pas tous des pédagogues émérites, les inspecteurs ne sont pas non plus tous des managers charismatiques, mais il est vrai que parfois, une alchimie réussie entre équipes pédagogiques, responsables d'établissements et inspecteurs peut mener à des avancées palpables en termes de résultats scolaires.

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