Quelles alliances possibles pour le RN aux municipales si on regarde du côté des électeurs ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Politique
Quelles alliances possibles pour le RN aux municipales si on regarde du côté des électeurs ?
©GERARD JULIEN / AFP

Prospective

Dans la perspective des élections municipales de 2020, des alliances pourraient permettre au Rassemblement national de remporter des mairies. Par rapport aux scrutins précédents, le parti de Marine Le Pen est dans une position dominante vis-à-vis des Républicains.

Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet est directeur du Département opinion publique à l’Ifop.

Voir la bio »

Atlantico : Dans le cadre des élections municipales de 2020, à quel type d'alliances à droite pourrait-on s'attendre dans des régions où le Rassemblement National bénéficie d'une certaine popularité ou implantation ?

Jérôme Fourquet : Il y a deux choses. D'une part, la question des alliances avec le RN se pose de manière totalement différente que par le passé. Historiquement, si on remonte aux années 1990, à l'époque où la question se posait pour la droite, il était question, pour une droite dominante, de savoir si on pouvait s'allier tactiquement pour remporter des élections avec une formation plus faible, le Front National, qui pouvait apporter le complément de voix manquant pour gagner. Aujourd'hui, on est dans une configuration totalement différente, c'est le Rassemblement national qui est la force dominante. Ce n'est pas pareil de passer des alliances avec un partenaire junior ou avec un partenaire senior. Deuxième point : jusqu'à présent, on envisageait des stratégies d'alliance de parti à parti, au niveau national, déclinées localement. Ce n'est plus la question à l'approche de la prochaine échéance municipale. On peut avoir, non pas une stratégie générale déclinée localement, mais une politique très pragmatique adaptée aux réalités du terrain et donc à géométrie variable.

Quand on combine ces deux éléments, ce qu'on peut éliminer, c'est un accord en bonne et due forme entre les Républicains et le RN pour les municipales. Ce qui n'est pas à exclure en revanche, c'est que certains élus sur le plan local, décident sous des modalités diverses, éventuellement, de s'allier ou de passer des accords avec le Rassemblement national. Tout cela va beaucoup dépendre aussi de la situation locale puisque, quand on pense aux deux grandes régions dans lesquelles le Rassemblement national est très bien implanté, c’est-à-dire le Nord-Est, en particulier avec son foyer des Hauts-de-France, et d'autre part le Sud de la France, si le Rassemblement national y est bien implanté, la droite, elle, n'est pas du tout dans la même situation dans les deux territoires. Dans le Nord-Est, notamment dans l'ancien bassin minier, le Nord-Pas-de-Calais, la droite est inexistante. Par conséquent, le Rassemblement national n'a aucun intérêt à faire des concessions et pourrait, dans certains endroits, gagner sous ses propres couleurs. Dans le sud du pays, par exemple à Perpignan, à Nîmes ou dans le Vaucluse, il y a encore une droite. Là cela peut être regardé différemment par le Rassemblement national.

Sur quelle base programmatique ces alliances pourraient-elles se faire ?

Encore une fois, vue les conditions, et comme les alliances ne se feraient qu'au niveau local, la question programmatique passe au second rang. D'une part il n'y a pas plus locales que les élections municipales. Donc vous allez avoir un certain nombre de gens qui vont vouloir s'allier pour gagner. Deuxièmement, on est dans une situation pour l'état-major LR qui est très particulière : vu le score obtenu aux élections européennes, et étant donnée la fin du cumul des mandats, l'état-major LR n'a plus la même force de rappel, la même capacité de faire pression sur un certain nombre d'élus locaux qui sont tentés par des accords, ou des alliances, ou même des arrangements avec le Rassemblement National (parce que parfois ce n'est pas aussi officiels que cela) qu'auparavant, en disant : attention à notre légitimité politique, vous êtes tributaires de notre marque LR, attention donc à ce que vous faites. Quand vous avez une droite à 20 ou à 25%, vous avez la possibilité de faire pression sur ces élus en utilisant cette marque LR. Aujourd'hui aucune personnalité nationale LR n'est en capacité d'empêcher les maires de faire ces alliances.

Thierry Mariani a déclaré qu'il était certain qu'il n'y aurait "jamais d'alliance avec les LR". De fait, serait-ce vers les maires "sans étiquette" que les alliances pourraient se concrétiser ?

Thierry Mariani est un bon exemple pour répondre à votre question. Vous avez des gens qui peuvent avoir des casquettes changeantes : vous allez avoir un candidat ou un maire qui va créer un mouvement de type "Rassemblement pour Pézenas" et qui va prendre ses distances avec LR. Vous n'allez pas avoir un maire clairement estampillé LR qui va faire ces alliances avec le RN. Thierry Mariani, c'est exactement ce qu'il a fait : il y a quelques mois, il était LR et il s'est rallié au RN. Pour reprendre le titre d'un livre qui a eu un grand succès, on peut dire qu'on aura Cinquante Nuances de gris ! Ce qui peut se passer, c'est donc aussi ce qu'a fait par exemple Ménard à Béziers : un rassemblement des droites sans étiquette Rassemblement national. Cela ne pourra pas se passer avec les étiquettes officielles, parce que LR ne peut pas se permettre de faire des alliances avec le RN, et de son, côté, Marine Le Pen n'en a pas envie contrairement à sa nièce, Marion Maréchal, historiquement élue dans le Vaucluse. C'est aussi la position de Louis Alliot, le compagnon de Marine Le Pen, qui ambitionne de conquérir la mairie de Perpignan et pour ce faire, aura besoin d'avoir la confiance d'un certain nombre d'élus, et s'adjoindre une partie de la droite locale qui aujourd'hui lui échappe encore.

Quels territoires insoupçonnés pourraient voir émerger des maires RN ?

Ce qu'on devrait voir à l'occasion de ces municipales, c'est la poursuite de ce qui s'est passé depuis deux ans, c’est-à-dire : pour la droite, le ralliement au bloc central macronien d'une partie de l'électorat et des cadres de la droite modérée, notamment dans les grandes villes ; et des alliances de la composante plus droitière de LR, à certains endroits, avec des éléments du Rassemblement national ou des gens qui s'y sont affiliés.  

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !