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Derrière la désobéissance civile, le spectre de la décroissance pour tous
©Tolga AKMEN / AFP

Rebelles décroissants

Derrière ces actions de rebellion, les activistes ont pour objectif d’imposer de facto un principe de décroissance et de déconsommation au nom des intérêts des animaux et de la planète, notamment via le concept d’« état d’urgence climatique et écologique ».

Eddy  Fougier

Eddy Fougier

Eddy Fougier est politologue, consultant et conférencier. Il est le fondateur de L'Observatoire du Positif.  Il est chargé d’enseignement à Sciences Po Aix-en-Provence, à Audencia Business School (Nantes) et à l’Institut supérieur de formation au journalisme (ISFJ, Paris).

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Différents événements récents tendent à montrer que l’on est en train d’assister au grand retour de la désobéissance civile. Le 24 mars, des militants du mouvement Extinction Rebellion France réunis place de la Bourse à Paris se déclarent officiellement « en rébellion contre l’extinction du vivant ». Le groupe Extinction Rebellion a été créé au Royaume-Uni en octobre 2018. Il se présente comme un « Mouvement mondial de désobéissance civile en lutte contre l’effondrement écologique et le réchauffement climatique ». Il s’est notamment fait connaître par plusieurs actions assez spectaculaires de blocages à Londres au mois d’avril dernier. Extinction Rebellion France a vu le jour en novembre 2018.

Le 19 avril, Greenpeace, Les Amis de la Terre et ANV-COP21 lancent l’opération « Bloquons la République des pollueurs », qui était censée être la plus grande action de désobéissance civile jamais organisée en France. Plus de 2 000 activistes bloquent l’accès à quatre bâtiments du quartier de la Défense (les tours de Total, d’EDF, de la Société générale et des locaux du ministère de la transition écologique et solidaire) en y pénétrant et en y restant plusieurs heures. Si les actions « coups de poing » de Greenpeace sont bien connues, c’est moins le cas d’ANV-COP21. Il s’agit d’un « mouvement citoyen de masse » dont l’objectif est de « relever le défi climatique » en s’inspirant « des victoires obtenues [par les] grands mouvements de lutte non-violente ».  ANV signifie justement Action non-violente. Le mouvement organise d’ailleurs des formations à l’action non-violente et à la désobéissance civile.

Le 4 mai, un boucher bio du marché couvert de Saint-Quentin dans le Xe arrondissement de Paris est victime d’une agression de la part d’une vingtaine de militants antispécistes qui répandent du faux sang sur le sol, sur la vitrine de son étal et sur lui. Il dit avoir été frappé d’un coup de poing par des activistes (ce qu’ils nient). Cette action a été revendiquée par l’association antispéciste 269 Life France.

Enfin, le 22 mai, l’association DXE France poste une vidéo sur sa page Facebook. Ce sont des images tournées dans un élevage intensif Fleury Michon suite à une intrusion à laquelle a participé le député LFI Bastien Lachaud. DXE France, qui a été créée en février 2018, s’inspire des pratiques de désobéissance civile du mouvement international Direct Action Everywhere lancé aux Etats-Unis en 2013, avec des « libérations d’animaux » censées s’effectuer à visage découvert, mais aussi de la diffusion de vidéos d’élevages de l’association L214.

Ces actions directes dites non-violentes qui relèvent de la désobéissance civile sont ouvertement revendiquées par ces activistes. Dans une tribune publiée dans Libération le 22 mars 2019, le collectif Extinction Rebellion explique ainsi que « nous sommes prêt-e-s à enfreindre la loi et à en subir les conséquences, y compris l’emprisonnement ». Le nom même du mouvement DXE, à savoir Direct Action Everywhere, en est aussi un bon exemple.

A l’évidence, cela représente une menace nouvelle pour les entreprises et les acteurs économiques. Les actions de désobéissance civile mises en œuvre jusqu’à présent par les zadistes ont pu aboutir à l’abandon de projets (retenue d’eau de Sivens, aéroport de Notre-Dame-des-Landes) ou à un blocage (Center Parcs de Roybon dans l’Isère). Des actions de ce type perpétrées par les Faucheurs volontaires ont aussi conduit à la fin de la recherche publique sur les OGM en France.

Néanmoins, les actions directes des antispécistes et de ceux qui ont été quelquefois désignés comme « rebelles du climat » sont d’une autre nature. Il ne s’agit pas de bloquer un projet local ou une innovation spécifique, mais bien de délégitimer aux yeux des consommateurs, des investisseurs ou des autorités publiques certaines activités (comme l’élevage intensif, voire l’élevage tout court) et, par extension, tous les secteurs d’activité qui sont jugés nuisibles pour l’environnement, la biodiversité et le climat (automobile, énergies non renouvelables, chimie, etc.). Or, on voit bien que, derrière ces actions, les activistes ont pour objectif d’imposer de facto un principe de décroissance et de déconsommation au nom des intérêts des animaux et de la planète, notamment via le concept d’« état d’urgence climatique et écologique », que le groupe LFI de l’Assemblée nationale a voulu faire passer mi-mai par le biais d’une proposition de résolution visant à inscrire la « règle verte au sommet de la hiérarchie des normes » et qui a été adopté récemment par la Chambre des communes en Grande-Bretagne.

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