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Paul Bablot : "En Asie, les persécutions envers les chrétiens sont réelles partout mais sous différentes formes"
©AAMIR QURESHI / AFP

Minorité

Très régulièrement depuis quelques années, la presse nous rappelle que les Chrétiens sont les croyants les plus persécutés du monde. L'Asie n'est pas épargnée.

Paul Bablot

Paul Bablot

Paul Bablot est consultant. Il a été volontaire dans le nord de la Thaïlande avec les Missions Etrangères de Paris. Il est diplômé d’un Master Business Consulting de l’Université Paris Dauphine. Paul Bablot a publié "Du Mékong à la place Saint-Pierre, 20.000 km à la rencontre des Chrétiens" (ed. Première partie). 

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Atlantico : Votre livre, "Du Mékong à la place Saint-Pierre" (éditions Première partie) raconte votre périple de 20.000 km, long de plus d'un an, lors duquel vous êtes allé à la rencontre des communautés chrétienne de l'Asie à l'Europe de l'Est en passant par le proche Orient. Très régulièrement depuis quelques années, la presse nous rappelle que les Chrétiens sont les croyants les plus persécutés du monde. Vous qui avez traversé tout le continent asiatique, est-ce quelque chose que vous avez perçu ? Si oui, quelles formes prennent ces persécutions ?

Paul Bablot : Il est tout à fait juste de parler de persécutions envers les chrétiens en Asie, mais il s'agit de nuancer le discours puisque les situations dépendent à chaque fois de multiples éléments locaux. J'ai eu la chance de rencontrer des communautés chrétiennes dans tous les pays traversés, de l'extrême Orient jusqu'au Levant, et les persécutions envers les chrétiens sont réelles partout mais sous différentes formes. 

Bien souvent nous retrouvons une marginalisation des chrétiens, mis au ban de la société, par l'interdiction d'exercer un certain nombre de métiers ; des difficultés à exercer leur Foi ; les confiscations de biens et terrains ; ou encore l'interdiction du prosélytisme et d'annoncer le Christ aux autres. 

Autant de difficultés qui sont souvent liées avec des intimidations et une discrimination de fait. 

Les appareils d'Etat sont également en première ligne pour les discriminations religieuses. Le communisme en Asie centrale, en Chine et au Vietnam a profondément marqué l'Eglise locale qui y a développé une résilience impressionnante. 

Ces régions connaissent-elles pas pourtant pour beaucoup d'entre-elles une implantation très anciennes ? Comment expliquez-vous, avec votre regard de voyageur, la montée de ces tensions dans certains pays que vous avez traversé ?

Effectivement les Nestoriens dès le 4e siècle, ainsi que de nombreuses missions lors du premier millénaire, ont implanté la chrétienté très tôt dans l'histoire Orientale. 

Mon regard se tourne immédiatement vers la Perse, l'Iran aujourd'hui, qui est la matérialisation de ces tensions éminemment complexes. Alexandre le Grand y posait son camp de base et apportait des éléments culturels de l'Occident au 4e siècle avant notre ère, alors que les caravanes échangeaient sur les routes de la soie depuis déjà des siècles.  

La mondialisation des échanges et des conflits a apporté un regain de tensions dans toutes ces régions où les ressources désormais accessibles et exploitable pour d'autres aiguisent les appétits. 
Comme toujours, le fragile équilibre lentement et patiemment construit vole en éclat lorsque les enjeux deviennent planétaires. La chute de l'URSS agit comme un catalyseur des tensions qui se voyaient tout d'un coup laissées sans contraintes et où les intérêts privés peu scrupuleux purent proliférer. 

Nous pouvons également distinguer la politisation et l'affirmation des Etats autour de grands mythes nationaux depuis une vingtaine d'années qui visent à unifier les pays autour de la majorité de la population, faisant passer les minorités comme une population de seconde zone. Il s'agit bien d'une volonté politique à chaque fois (Ouzbékistan, Iran, Chine) puisque la population reste -elle - fidèle à des traditions ancestrales que les changements de régimes ne saurait altérer. 

L'accueil et les règles immuables de l'hospitalité ont toujours cours en Orient, quelle que soit la religion ou l'origine du visiteur. 

Vous affirmez cependant que l'Eglise connait une vraie vitalité dans ces régions malgré les difficultés. Comment l'expliquez-vous ?

Paradoxalement, les années 2000 ont vu l’arrivée de nouveaux missionnaires tant physiquement que via les réseaux de communication. 

Les Eglises, dormantes durant de nombreuses années à cause d'oppressions politiques, peuvent désormais donner toute leur mesure à l'annonce du message du Christ. Les contraintes directes levées, les missionnaires oeuvrent sans relâche, en montrant l'exemple par leur vie, de ce qu'est le christianisme. 

L'athéisme longtemps proposé par les pays sous le joug communisme est un terroir fertile pour la mission car la quête d'absolu et d'ancrer sa vie sur le roc est forte dans la population. 

Il faut bien sûr rendre hommage à tous les prêtres, religieux et religieuses qui oeuvrent sans relâche et parfois au péril de leur vie pour évangéliser. Ce sont eux qui sont en première ligne, sur le terrain, et qui forment les chrétiens d'Asie de demain. 

Votre livre est marquant notamment du fait de l'importance des rencontres et de l'hospitalité que vous ont donné bien des gens sur votre route. Quelles leçons tirez-vous de ces moments de partage ?

L'hospitalité est une ancestrale et immuable tradition orientale qui ne pourrait souffrir d'approximations. Pour nous occidentaux cela nous surprend, en Asie c'est habituel ! Partout lorsque le voyageur frappe à la porte, il est normal de l'accueillir comme un frère. L'Evangile nous le matérialise d'ailleurs très bien. 

Ainsi j'ai été hébergé par une famille lao, un moine tibétain, un fermier ouzbèke, un businessman iranien, des agriculteurs turcs, des soeurs palestiniennes, un moine Orthodoxe serbe, un boulanger italien... 

L'accueil fut parfois difficile, parfois il était compliqué de poursuivre la route tant mes hôtes voulaient que je reste ; mais à chaque endroit nous nous quittions heureux, chacun ayant l'impression d'avoir reçu plus que donné.

J'en retire la ferme conviction qu'il y a en chacun du bon, parfois profondément enfoui, mais qu'il existe. 

Nous n'avions souvent que peu de choses en commun, une langue rarement, des racines aucunement. Et pourtant nous réussissions à échanger, rire, toucher en plein coeur l'autre par de multiples moyens. 

Chaque Homme ou Femme possède un coeur qui ne demande qu'à s'ouvrir. Sachons provoquer ces moments pour ouvrir les coeurs débordants d'amour.  

A lire aussi sur Atlantico, un extrait de l'ouvrage : Le témoignage d’un évêque du Kazakhstan sur la situation des chrétiens dans les ex-républiques soviétiques

Du Mékong à la place Saint-Pierre, 20.000 km à la rencontre des Chrétiens" de Paul Bablot, publié aux éditions Première partie. 

Lien direct vers la boutique : ICI

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