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La dure réalité du métier d'avocat et les dérives qui menacent la profession
©IGOR PREYS / POOL / AFP

Bonnes feuilles

Maître Gérald Pandelon publie "Le métier d’avocat en France" aux éditions PUF (collection Que sais-je ?). Maître Gérald Pandelon décrit les us et coutumes du métier d'avocat. Cette alliance entre tradition et modernité fonde la spécificité d'une profession méconnue et parfois décriée, pourtant particulièrement indispensable. Extrait 2/2.

Gérald Pandelon

Avocat à la Cour d'appel de Paris et à la Cour Pénale Internationale de la Haye, Gérald Pandelon est docteur en droit pénal et docteur en sciences politiques, discipline qu'il a enseignée pendant 15 ans. Gérald Pandelon est Président de l'Association française des professionnels de la justice et du droit (AJPD). Diplômé de Sciences-Po, il est également chargé d'enseignement. Il est l'auteur de L'aveu en matière pénale ; publié aux éditions Valensin (2015), La face cachée de la justice (Editions Valensin, 2016), Que sais-je sur le métier d'avocat en France (PUF, 2017) et La France des caïds (Max Milo, 2020). 

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Le métier d’avocat change. Il suit en cela les transformations profondes qui, depuis une dizaine d’années, bouleversent l’institution judiciaire en général. La société de confiance a laissé place à une société de défiance, où la vérité n’est plus le référent essentiel ; seules comptent surtout l’efficacité ou la célérité des procédures. Dans nos sociétés, le souci éthique est délaissé au profit de valeurs censément plus utiles ou immédiates.

Désormais, l’avocat plaide de moins en moins. Et les premiers plaideurs, les pénalistes, sont ceux qui ont le plus lieu de s’en plaindre. La justice pénale est de plus en plus négociée ; elle repose sur l’aveu, signe l’échec de la verticalité entre justice et justiciable, au profit de l’horizontalité ou de la régulation sociale, modifiant la hiérarchie des pouvoirs. Aux yeux de l’opinion, ce bouleversement n’est sûrement pas perceptible. Il n’en est pas moins réel et pose en définitive la question de l’avenir des principes directeurs du droit.

Désormais, la profession d’avocat est travaillée par une robotisation croissante des pratiques : quelle place les legal tech laisseront-elles à la part d’humanité qui est au fondement de toute justice, et singulièrement du métier d’avocat, acteur empathique par définition ?

À l’heure de la justice prédictive et de la technologie du droit, il faut bien sûr se réjouir que les tâches chronophages et répétitives soient bientôt effectuées par la machine. L’avocat pourra davantage encore être à l’écoute de son client et se concentrer sur l’élaboration d’une stratégie sur mesure et efficace. Mais après l’« ubérisation » des legal tech, c’est l’intelligence artificielle (IA) et ses solutions prédictives qui menacent le métier d’avocat. Désormais, à l’aide d’algorithmes couplés au big data (en l’espèce, l’ensemble des décisions de justice qui seront mises gratuitement à la disposition du public), il sera possible de calculer ses chances de gagner son procès et connaître le montant approximatif des indemnités à en attendre. Le réseau Eurojuris, qui compte notamment huit cents avocats répartis dans toute la France, a d’ailleurs passé récemment un partenariat avec Legalstart.fr, qui produit des documents juridiques pour les TPE et les PME (statuts, contrats de travail…). Mais loin de permettre à l’avocat de prospérer, ces évolutions risquent de conduire à une paupérisation croissante de la profession.

Des défis restent à relever, comme ceux de la formation initiale dispensée dans les écoles d’avocats, qui paraît être en décalage avec la réalité de la profession, ou encore celui qui a trait à la gestion de la mobilité ; le plus important demeurant toutefois celui de la révolution numérique, une mutation qui, à bien des égards, tranche avec l’essence de la profession d’avocat, son humanité, en dernière analyse, son serment.

Extrait du livre de Maître Gérald Pandelon, "Le métier d’avocat en France", publié aux éditions PUF dans la collection Que sais-je ?. 

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