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Il faut détruire Jean-Luc Mélenchon et le secret de l’instruction avec…
©IROZ GAIZKA / AFP

Mélenchon delenda est

De l’affaire Fillon, à la mise en cause de Nicolas Sarkozy dans l’affaire libyenne, en passant par les assistants parlementaires du RN ou de la France insoumise, on ne compte plus les violation systématiques, récurrentes et pour tout dire quasi-institutionnelles du secret de l’enquête ou de l’instruction.

Rodolphe  Bosselut

Rodolphe Bosselut

Rodolphe Bosselut est avocat au barreau de Paris. Il assure plus particulièrement la défense pénale de victimes de sectes.

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Le Nouvel Observateur fait cette semaine sa Une sur l’affaire des assistants parlementaires européens de la France Insoumise.

Les articles révèlent en détail des pans entiers de l’information judiciaire en cours et citent allègrement des passages des procès-verbaux d’enquête.

La routine en somme.

Le principe du secret de l’instruction, pierre angulaire de notre système judiciaire, protecteur de la présomption d’innocence, de la sérénité et de l’impartialité de la justice, se présente désormais comme la hampe d’un drapeau fièrement dressée dans le ciel mais avec une bannière en capilotades qui pendouille piteusement.

Car de principe il n’en a plus que le nom.

De l’affaire Fillon, à la mise en cause de Nicolas Sarkozy dans l’affaire libyenne, en passant par les assistants parlementaires européens du RN etc,on ne compte plus les violation systématiques, récurrentes et pour tout dire quasi-institutionnelles du secret de l’enquête ou de l’instruction.

Ceux qui transmettent les informations secrètes à la Presse ne le font pas sans arrière-pensées. Le but étant de présenter des éléments dûment choisis et sélectionnés d’une enquête en cours comme autant de preuves de la culpabilité des mis en cause. Que vaut la parole de celui dont les turpitudes supposées sont exposées ? Rien ! D’autant que le plus souvent les révélations fracassantes dans la presse sont issues d’une enquête à laquelle le principal intéressé n’a même pas accès….

Avec de pareilles instrumentalisation les possibilités de nuire sont infinies et pour peu qu’on choisisse la bonne fenêtre de tir, le succès est garanti.

En France la campagne présidentielle demeure le meilleur moment. Doit-on rappeler l’empressement du PNF à ouvrir une enquête contre le candidat Fillon le jour même d’un article paru dans le Canard Enchaîné (l’encre étant tout juste sèche) pour des faits pour certains très anciens ? Enquête qui se fera à ciel ouvert sur les plateaux de télévisions et les colonnes de journaux.

Idem avec l’affaire dite des assistants parlementaires européens visant le FN, ouverte depuis 2015 et poursuivie à un train desénateur et qu’il était subitement devenue urgent d’accélérer en mars 2017 en demandant l’audition de Marine Le Pen en pleine campagne présidentielle, le tout avec publication dans la presse d’un pot-pourri des meilleurs procès-verbaux….

Aujourd’hui c’est la Gauche qui en fait les frais. Rien n’arrête la machine infernale.

L’autre avantage de cette violation est de faire apparaitre le scoop comme le fruit d’un long et précieux travail d’investigation alors que le média n’a joué in fine qu’au petit télégraphiste.

Faut-il une gigantesque tartuferie généralisée pour maintenir le secret de l’instruction au panthéon des principes les plus essentiels alors qu’il ne se passe pas un jour, qu’il ne soit malmené, violé le plus souvent d’ailleurs avec la complicité de ceux qui devraient le faire respecter.

Certes existent dans le code pénal les infractions de violation du secret de l’instruction et de recel du secret de l’instruction pour lutter contre ces errements, mais tous les praticiens du droit savent qu’elles demeurent quasiment toujours lettres mortes.

On nous objectera que ce secret doit de toute façon céder le pas à la liberté d’information. Dans une période où la transparence est une vertu cardinale le secret a décidément, si j’ose dire, mauvaise presse.

La dictature de l’information continue devient celle de l’immédiateté qui exige que le temps judiciaire, par définition long sinon laborieux, se mette à la page.

Il faut savoir et pouvoir débattre de tout, tout de suite.

Or le processus judiciaire, et notamment celui de l’instruction n’a de sens que dans la durée qui permet à l’émotion initiale de se décanter, aux parties mises en examen de demander des actes et de tenter de rééquilibrer les premiers éléments de l’enquête qui le plus souvent sont à charge ayant été recueillis dans une perspective unique d’accusation.

La violation du secret de l’instruction justifiée par les besoins de l’information aboutit au final à une mise au pilori médiatique de personnes qui ne sont pourtant judiciairement que suspectées et qui apparaissent définitivement comme coupables.

Bref il s’agit ni plus ni moins de la prééminence du court sur le long terme avec pour victimes collatérales la vie, la réputation, l’honneur « d’individus jetés aux chiens ».

Comme il est vain de penser que cette tendance qui va s’accroissant pourrait s’inverser, la question se pose de savoir s’il faut maintenir ou non le secret de l’instruction ?

Cette réflexion n’est pas neuve, Le comité Léger avait évoqué en 2009 la piste de la dépénalisation de la violation du secret de l’instruction mais dans une réflexion plus générale qui visait également à la suppression éventuelle du juge d’instruction.

Pour sortir de ces faux-semblants il faudrait sans doute préconiser la mise en œuvre d’une procédure contradictoire ou celui qui accuse (le Parquet) et celui qui se défend (mis en cause) seraient réellement à armes égales. Où il n’y aurait pas un troisième intervenantquelque peu schizophrène, le juge d'instruction, qui doit informer à charge et à décharge et dont les décisions comme celle de mettre en examen ont un poids symbolique aux yeux de l’opinion publique.

Aujourd’hui mise en examen signifie quasiment condamnation.

La situation serait plus saine avec un parquet qui poursuit qui enquête et une défense aux prérogatives beaucoup plus étendue qu’aujourd’hui qui pourrait contre-enquêter avec la même efficacité… Révolution copernicienne puisque cela reviendrait à s’inspirer directement du système américain et à modifier copieusement notre droit.

Ou alors si le courage nous manque, tout en restant dans notre système actuel, en aménageant a minima la phase de l’instruction en la rendant publique. Permettant ainsi à la défense de choisir de publier également certains actes de la procédure ou d’évoquer publiquement des demandes d’actes faits auprès du juge qui permettraient d’instruire à décharge et qui pourtant ont été refusé. L’opinion publique pourrait donc être prise à témoin du caractère inique de certaines instructions.

Autre piste,en obligeant pourquoi pas les médias qui révèlent certains PV à ouvrir leurs colonnes, leurs plateaux à ceux qui sont mis en cause pour leur permettre de répondre. Une obligation de publier concomitamment aux révélations du dossier de l’instruction la thèse ou l’argumentation de la défense.

Pas comme à l’heure actuelle, un simple droit de réponse ultérieur et déconnecté de l’article qui l’a suscité et de plus limité dans sa mise en œuvre par des règles restrictives...

Non en temps réel…

Tant qu’à louer l’immédiateté de l’information autant qu’elle fonctionne au bénéfice de tous…

Je rêve sans doute mais il devient de plus en plus surréaliste de scander « présomption d’innocence » « présomption d’innocence » comme des cabris à chaque violation du secret et de maintenir un tribunal médiatique univoque aux allures de tribunal populaire !

En ces heures de grand débat en voilà un qui a du sens.

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