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L’euro pourra-t-il survivre à la nouvelle crise économique qui se profile (et si non, que faire pour s’y préparer) ?
©PHILIPPE HUGUEN / AFP

Monnaie unique

En cas de nouvelle crise économique, financière et politique à l'échelle européenne, l'euro peut-il résister ? Eléments de réponses avec Jean-Luc Baslé.

Jean-Luc Baslé

Jean-Luc Baslé

Jean-Luc Baslé est économiste. Il travaille notamment pour la rédaction des Echos. Il est diplômé de Columbia University et de Princeton University. Ancien directeur de Citigroup New York (1972-1995), il est enseignant associé aux Ecoles de Saint-Cyr Coêtquidan et vice-président de l’Institut de Locarn. 

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Les faiblesses structurelles de l’euro

L’euro est né du Traité de Maastricht de 1992. C’est la première fois que des nations décidaient volontairement, sinon démocratiquement, d’abandonner leur monnaie au profit d’une monnaie unique. Il n’y avait donc pas de précédents dont les dirigeants européens pouvaient s’inspirer. Plusieurs économistes avaient théorisé sur ce sujet dont Robert Mundell, Ronald McKinnon et Peter Kenen. Pour le premier, les nations désireuses d’adopter une monnaie unique doivent avoir des structures économiques homogènes. Pour le second, plus les économies des nations concernées sont ouvertes au commerce international, plus grandes sont les chances de succès. Pour le troisième, c’est le degré de diversification des économies qui importe. Il n’y avait donc pas, au plan théorique, consensus sur les conditions à remplir pour réussir une telle expérience. Les concepteurs de l’euro ont donc bricolé un système ad hoc qui tient plus du marchandage politique que de la raison économique. L’euro est un projet économique au service d’une cause politique : la construction européenne. C’est sa plus grande faiblesse.

Aristote a défini les usages de la monnaie mais pas sa nature. Bien qu’elle ait pris de multiples formes au cours des âges, sa nature est immatérielle. Sa réalité ne repose que sur la confiance que ses utilisateurs lui accordent. Cette confiance s’exprime dans la valeur qui lui attribuent. La valeur de l’euro a énormément varié au cours du temps. Introduite sous sa forme scripturale au taux de 1,1591 dollar en janvier 1999, elle tombe à 0,8525 dollar en octobre 2000 pour quasiment doubler en juillet 2008 (1,5759), avant de s’effondrer à nouveau. Cette méfiance à son égard est confirmée par les statistiques du Fonds monétaire international. L’euro n’a jamais atteint le statut de monnaie de réserve internationale, comme le pensait ses thuriféraires. Le pourcentage moyen de réserves internationales libellé en euro est de 22%. Banquiers centraux et institutions internationales lui préfèrent le dollar en dépit des questions que l’on peut se poser sur l’économie américaine.

Cela tient au fait que l’euro est une monnaie sans nation. La valeur d'une monnaie dépend au premier chef de la nation dont elle est issue. Le dollar tire sa valeur de la nation américaine, de son pouvoir économique, politique et militaire.  La première banque fédérale américaine fut créée en 1816, vingt-neuf ans après l'adoption de la constitution américaine. Une monnaie suit la constitution d'une nation.  Elle ne la précède pas.  L'euro fait exception à ce principe.  La banque centrale européenne existe alors que l'Union européenne n'est pas achevée.  L'euro est donc une monnaie sans nation, et de ce fait ne bénéficie pas de la confiance des investisseurs au même titre que le dollar. C’est sa seconde grande faiblesse structurelle.

Alternative à l’euro

En cas de disparition de l’euro, le réflexe naturel serait un retour au Système monétaire européen. C’est oublier que ce système et celui qui le précéda, connu familièrement sous le nom de « Serpent dans le tunnel », furent des échecs. Le retour de l’un ou l’autre de ces deux systèmes conduirait au même résultat. On peut d’ailleurs se demander ce qui, au vu de ces échecs, poussa les dirigeants européens à se lancer dans une nouvelle tentative plus radicale et donc plus risquée que les précédentes en créant l’euro. Cela dépasse l’entendement.

Les économistes ont dépensé beaucoup d’énergie et de matière grise à la recherche d’une solution durable pour solutionner l’épineux problème des taux de change. Ils les ont imaginés fixes, flexibles, dirigés, ajustables (crawling pegs), etc. jusqu’à ce que leur imagination se tarisse pour la simple raison qu’il n’y a pas de solution miracle.

Pour qu’un système monétaire international fonctionne, il faut que les structures économiques des états-membres soient homogènes et que leurs politiques soient compatibles. Ce n’est jamais le cas. Le système monétaire international de Bretton Woods du nom de la station balnéaire dans le New Hampshire où se tint la conférence qui lui donna naissance en 1944, n’a duré qu’un quart de siècle. Son effondrement est une des causes indirectes, mais réelles, des tentatives des Européens de créer leur propre système.

Conséquences d’une disparition de l’euro

Il est impossible de les prédire. La première question qui vient à l’esprit est de savoir dans quelles conditions cette disparition se ferait. Dans une hypothèse optimiste où les Européens, l’acceptant comme inéluctable, se réuniraient autour d’une table pour y mettre fin dans les meilleures conditions, on peut imaginer une sortie, certes difficile et fâcheuse, mais à moindre coût. C’est bien sûr une vue de l’esprit. La disparition de l’euro sera économiquement brutale et douloureuse pour les populations. Elle entraînera une crise économique majeure au niveau européen et mondial, plus violente que celle de 1929, en raison de l’intégration profonde des économies nationales.

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